Au Mali, la partition du nord, occupé par plusieurs mouvements rebelles, n’est toujours pas acceptée par la communauté internationale. Parmi les nombreux groupes présents dans la région, entre terroristes et indépendantistes, les Touaregs pourraient être des interlocuteurs acceptables pour les Français.
Hélène Bravin, journaliste, spécialiste du Maghreb et auteure de « Kadhafi, vie et mort d’un dictateu r » (Editions Bourin), s’est entretenue avec Moussa El Koni, grand chef touareg libyen et représentant des Touaregs au Conseil National de Transition (CNT). Ancien consul général de Libye au Mali, Moussa al Koni a démissionné de ses fonctions pour rejoindre, en mars 2011, la révolution libyenne contre le régime de Khadafi. Celui-ci qui compte toujours sur son influence tente aujourd’hui de faire revenir en Libye les Touaregs libyens d’origine malienne et nigérienne qui ont fui la Libye vers le Mali et le Niger après la mort de Kadhafi et auprès de qui ils ont combattu jusqu’au bout. Sera-t-il entendu malgré sa défection précoce des rangs des fidèles de Kadhafi ? Convaincu que les Touaregs restent une communauté liée, il tente en tous les cas de les convaincre que la Libye reste leur pays refuge et d’une amélioration de leurs conditions de vie. Il dévoile aussi dans cet interview les tentatives de négociations que mène la France au Mali avec le mouvement Ançar Dine. Entretien réalisé avec la participation de Kamel Almarache, journaliste.
Atlantico : Qui sont ces Touaregs qui combattent au Nord du Mali pour l’indépendance du territoire Azawad ?
Moussa Al Koni : Ce sont des Touaregs venus de Libye. Ils sont Nigériens mais surtout Maliens. Ils ont acquis la nationalité libyenne depuis 1980 pour la plupart d’entre eux. Ils ont combattu aux côtés de Kadhafi durant la révolte. Ils sont venus en Libye lors de l’appel aux Touaregs lancé par Kadhafi en 1980 depuis la ville libyenne d’Oubari, considérée comme la ville principale des Touaregs en Libye. Ils ont été naturalisés massivement par Kadhafi. Celui-ci souhaitait faire pression notamment sur l’Algérie, le Niger, le Mali et la Mauritanie afin que ces pays reconnaissent son influence régionale ainsi que la cause des Touaregs marginalisés.Le second objectif de Kadhafi était aussi de les utiliser, notamment dans la guerre au Tchad et au Liban. A cette fin, Kadhafi les a intégrés dans l’armée et a même créé un bataillon spécial pour eux appelé « les Commandos courageux » en référence à Tariq Ibn Ziyad, conquérant berbère de l’Espagne. D’ailleurs, le leader d’Ançar Dine (Défenseur de l’Islam), Iyad Ag Ghaly , d’origine malienne a combattu pour la Libye au Liban avant de constituer le Mouvement population de l’Azawad (MPA). Le leader actuel du Mouvement National pour la Libération de l’Azawad (MNLA), Mohamed Ag Najim, également d’origine malienne, a aussi fait partie de l’armée verte de Kadhafi. Cette intégration dans l’armée a été faite très facilement. Elle a servi de promotion sociale aux Touaregs non éduqués et très pauvres.
Et leur rapport avec les Touaregs libyens ?
Les Touaregs maliens se sont établis aux côtés des Touaregs libyens, installés bien avant l’invasion arabe du VIIème siècle. Ils se sont concentrés dans le Sud, dans la localité d’Oubari, au sud-ouest de Sebbha et à Ghadamès. Les Touaregs libyens ont également été intégrés dans l’armée de Kadhafi – ce qui leur a permis aussi une ascension sociale – et ils ont combattu à ses côtés durant la révolte. Ils partagent certaines coutumes avec les Touaregs Maliens ou Nigériens.atlantico.fr
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