dimanche 30 septembre 2012

Vu de Bamako Un pays oublié de tous ? | Humanite

Vu de Bamako Un pays oublié de tous ? | Humanite
Du nord, aux mains des islamistes 
qui appliquent 
la charia, au sud, où les personnes déplacées viennent grossir les rangs 
de la misère, tout un peuple attend la suite des événements dans un climat d’anxiété 
et de précarité accrues. Dix jours dans la capitale nous 
ont permis de prendre le pouls d’une situation qui paraît encore inextricable.
Bamako (Mali), envoyée spéciale. Aux dernières nouvelles, al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi), sur un site mauritanien, menaçait de mort les six otages français au Mali si la France intervenait militairement au nord du pays. Le premier ministre de transition, Cheick Modibo Diarra, à Paris le mercredi 19 septembre, a déclaré : « Le temps presse (…), le temps est du côté des terroristes. » Le Mali a enfin fait appel à la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) et saisi l’ONU d’une demande d’appui et d’accompagnement : « Nous avons suffisamment de troupes, ce qui nous manque, c’est le renseignement, l’aspect logistique et la formation. »

Bamako. Début septembre. Douentza, principal verrou entre le Nord et le Sud, est tombée aux mains des islamistes du Mouvement pour l’unité et le djihad en Afrique de l’Ouest (Mujao). Le 10 du mois, à Gao, cinq hommes accusés d’avoir attaqué un bus sont amputés de la main droite et du pied gauche. « Depuis que les occupants sont dans le nord, ils n’ont que deux activités : la police et le tribunal islamique », nous dit Sandy Haïdara, député de Tombouctou. La charia est appliquée en tout. Les femmes sans voile reçoivent dix coups de fouet. C’est quarante coups pour l’alcool et cent pour les relations hors mariage. À Ménaka (près de la frontière nigérienne), « les femmes n’ont plus le droit d’aller au fleuve laver la vaisselle et le linge », selon Mohamed Ag Ibatane, déplacé et réfugié à Bamako avec sa famille (quinze personnes). Il a assisté, à Ansango, au supplice d’un garçon amputé d’une main. « C’était un mercredi. Ils nous ont amenés au bord du fleuve après avoir installé des sièges. Ils ont assis l’homme sur une chaise, lui ont ligoté les mains et les pieds avant d’aiguiser le couteau. On était forcés de regarder. Ils ont mis cinq minutes à lui scier la main au cri d’“Allah akbar”. La main est tombée à terre. »

La terreur est au Nord conquis aux deux tiers depuis près de six mois par des milices islamistes. Les personnes déplacées grossissent les rangs de parents pauvres dans la capitale où les logis sont des camps de réfugiés. Certains retournent « là-haut ». Ils ne supportent plus ces conditions infernales. « La pluie, le paludisme, le manque d’espace, l’extrême misère, ils n’en peuvent plus », nous confie Sandy Haïdara.

À Bamako, pourtant, la vie semble suivre un cours presque habituel. Les petites vendeuses de maïs font des affaires. La récolte est bonne et permet, me dit l’une d’entre elles, « de faire la soudure », en attendant celle des céréales, dont le mil. Dans le Nord, la production de riz devrait baisser de 30 %. Le cheptel pourrait être perdu.

Les conséquences des événements se font sentir dans tous les secteurs. Quant au tourisme, fini les séjours dans le pays Dogon ou la manifestation de littérature Étonnants Voyageurs prévue en novembre à Bamako. Les grands hôtels ont fermé. Le personnel est au chômage. Les usines tournent au ralenti. Trois cents ouvriers d’une boîte de transformation du textile sont sur le carreau. Les taxis jaunes déplorent « le manque de toubabs ». Confiance en berne entre banques et commerçants, grevant l’économie informelle dans un pays où toute personne qui perçoit un salaire en fait vivre dix autres.

À la télé, le soir, après la météo, un artiste tente de remonter le moral des Maliens. Cette fois-là, c’était le cinéaste Souleymane Cissé qui a vanté « l’unité indéfectible du pays ». Le match de foot éliminatoire Mali-Botswana pour la Coupe d’Afrique des nations 2013 qui a eu lieu le 8 septembre (par bonheur le Mali a gagné par trois buts à zéro) a au moins galvanisé les Maliens. La victoire a été dédiée à ceux du Nord. Qu’en sera-t-il de la rentrée scolaire ? Partielle au sud, elle scellera, aux yeux de tous, la partition du pays.

Tout un peuple, atrocement meurtri, serre les dents dans l’attente d’un règlement hypothétique du conflit. Les hommes du Mujao, d’Ansar Dine et son leader, Iyad Ag Aghaly (Malien d’origine), affiliés à Aqmi, grignotent sans fin des morceaux de territoire. « Ansar Dine, nous dit Sandy Haïdara, est aidé dans son expansion par des groupes islamiques venus d’un peu partout : Afghans, Nigérians de Boko Haram, nom qui signifie “l’éducation occidentale est un péché”, Pakistanais, Somaliens, Yéménites, Tchadiens et Libyens ».

L’État, largement corrompu, n’a aucune politique ferme vis-à-vis du Nord. Les Touareg « laïques », naguère enrôlés par Kadhafi, disposaient d’un véritable arsenal, ce qui n’a pas empêché leur rébellion d’être mise à l’écart. Maints djihadistes ont récupéré les armes prises à l’armée malienne lors des combats. Aqmi est riche, grâce à divers trafics (de drogue de Colombie, d’armes lourdes et d’otages aux rançons colossales). Ils disposent d’un immense territoire où des avions peuvent impunément atterrir, à Kidal, à Gao, à Tessalit, seul aéroport bitumé du Nord. « Des gens du Qatar sont même venus », ajoute Sandy Haïdara.

Quant à l’armée malienne, elle manque de matériel et d’hommes suffisamment aguerris pour s’opposer à des fanatiques résolus. « Elle est caduque, complètement caduque ! » nous affirme Hamadoun Amion Guindo, secrétaire général de la Confédération syndicale des travailleurs du Mali (CSTM). (Voir entretien ci-contre.) Le problème du matériel se double de celui du défaut de formation des hommes au sein d’un corps devenu « une nouvelle fonction publique ». Pour le directeur du centre culturel américain de Bamako, Boubacar Belco Diallo, « l’armée n’est qu’une chasse gardée pour des fils de militaires à peine formés. Certains ne passaient même pas la visite médicale pour 
savoir s’ils étaient aptes ». Ces carences rédhibitoires sont peut-être à l’origine du coup d’État du 22 mars, dû au ras-le-bol des militaires, dont certains, il y a des mois, furent égorgés comme des poulets à Aguelhok, dans la région de Kidal.

Ibrahim Boubacar Keïta, surnommé IBK, ex-premier ministre du président Alpha Oumar Konaré et président de l’Assemblée nationale durant cinq ans sous Amadou Toumani Touré (le président récemment déposé par la junte militaire), nous dit à ce propos : « Nous n’avons eu de cesse de dire qu’il fallait revoir notre armée nationale, la reformer, l’équiper, la mettre à la hauteur de ses missions. Nous avons proposé une loi de programmation militaire contraignante sur le plan budgétaire. Cette politique s’est noyée dans les sables. »

On parle d’une intervention en commun avec la Cedeao. C’est compliqué. Les armes achetées par le Mali sont bloquées dans les ports de Dakar et de Conakry. « J’avoue que j’ai du mal à suivre la logique de la Cedeao », nous dit IBK. « Comme les Maliens le souhaitent, précise-t-il, le recouvrement de notre intégrité territoriale doit être assumé principalement par
nos propres forces, cela a été admis en août et ce fut une bonne chose. Maintenant, on nous a dit de former un gouvernement d’union nationale. Notre pays s’est plié à cette demande et il ne se passe rien quant au déblocage de ces armes. Je trouve paradoxal qu’on veuille contribuer à hâter la libération d’un territoire malien sous contrôle d’Aqmi et de trafiquants et qu’en même temps, on lie les mains à l’armée malienne en lui refusant les moyens militaires dont elle a besoin ».

La confusion a longtemps régné au sommet d’un État à trois têtes, avec, d’un côté, un président de transition, Dioncounda Traoré, ancien ministre de la Défense, ancien président de l’Assemblée nationale – surnommé « celui qui ne cherche rien et qui a tout » par Kassim Traoré, journaliste à l’Indépendant – et de l’autre, le premier ministre, Cheick Modibo Diarra, astrophysicien de formation, qui, toujours selon Kassim Traoré, « pense qu’on lui a donné le Mali en dot de mariage ». Enfin, il y a celui qui imprime son rythme aux deux autres, le capitaine Amadou Haya Sanogo, élu à la tête des putschistes après le 22 mars.

La situation profite au pouvoir 
religieux. En août, Mahmoud Dicko, président du Haut Conseil islamique malien (HCIM), a rempli le stade du 26-Mars avec 60 000 personnes, lors d’un rassemblement sur le thème de « La paix et la réconciliation ». Au centre culturel français, le bibliothécaire, Ousmane Diarra (sous contrat chez Gallimard « Continents noirs »), a modifié le titre de son prochain roman, l’Année des longs couteaux et des noms interminables. Animiste de l’ethnie Bambara, il est aujourd’hui insulté par sa femme et ses enfants parce qu’il ne fait pas les cinq prières par jour. Il émet de sérieuses réserves quant au tout nouveau ministère des Religions et du Culte : « Ce ministère ne fait que renforcer l’emprise du religieux sur le politique. Le HCIM est déjà au centre de toutes les négociations avec les islamistes. »

À Bamako, des embryons d’une islamisation rampante se font jour. Dans les mosquées – huit sur dix sont financées par les salafistes –, c’est la montée en flèche de prêches exaltés et la présence accrue d’imams venus du Pakistan, d’Indonésie, d’Irak, des Émirats et des pays du Golfe, tandis que les lieux de culte wahhabite poussent comme des champignons dans les villages autour de Bamako.

Bref historique d’une crise

22 mars. Amadou Toumani Touré est renversé par des militaires au motif d’incompétence dans la lutte contre la rébellion touareg au nord.

30 mars et 1er avril. Prise de Kidal et de Gao par Ansar Dine, appuyé 
par le MNLA et Aqmi.

2 avril. Prise de Tombouctou par Ansar Dine et Aqmi.

6 avril. Accord-cadre junte militaire-Cedeao, Dioncounda Traoré, président 
intérimaire, Cheick Modibo Diarra, premier ministre de transition.

27 juin. Le Mujao règne à Gao. Le MNLA au second plan.

30 juin. Saccage de mausolées à Tombouctou.

29 juillet. Lapidation à mort, à Aguelhok, d’un couple non marié qui a eu un enfant.

20 août. Nouveau gouvernement de 32 membres.

4 septembre. Traoré demande l’intervention des forces militaires d’Afrique de l’Ouest.
Muriel Steinmetz

Vu de Bamako Un pays oublié de tous ? | Humanite

Vu de Bamako Un pays oublié de tous ? | Humanite
Du nord, aux mains des islamistes 
qui appliquent 
la charia, au sud, où les personnes déplacées viennent grossir les rangs 
de la misère, tout un peuple attend la suite des événements dans un climat d’anxiété 
et de précarité accrues. Dix jours dans la capitale nous 
ont permis de prendre le pouls d’une situation qui paraît encore inextricable.
Bamako (Mali), envoyée spéciale. Aux dernières nouvelles, al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi), sur un site mauritanien, menaçait de mort les six otages français au Mali si la France intervenait militairement au nord du pays. Le premier ministre de transition, Cheick Modibo Diarra, à Paris le mercredi 19 septembre, a déclaré : « Le temps presse (…), le temps est du côté des terroristes. » Le Mali a enfin fait appel à la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) et saisi l’ONU d’une demande d’appui et d’accompagnement : « Nous avons suffisamment de troupes, ce qui nous manque, c’est le renseignement, l’aspect logistique et la formation. »

Bamako. Début septembre. Douentza, principal verrou entre le Nord et le Sud, est tombée aux mains des islamistes du Mouvement pour l’unité et le djihad en Afrique de l’Ouest (Mujao). Le 10 du mois, à Gao, cinq hommes accusés d’avoir attaqué un bus sont amputés de la main droite et du pied gauche. « Depuis que les occupants sont dans le nord, ils n’ont que deux activités : la police et le tribunal islamique », nous dit Sandy Haïdara, député de Tombouctou. La charia est appliquée en tout. Les femmes sans voile reçoivent dix coups de fouet. C’est quarante coups pour l’alcool et cent pour les relations hors mariage. À Ménaka (près de la frontière nigérienne), « les femmes n’ont plus le droit d’aller au fleuve laver la vaisselle et le linge », selon Mohamed Ag Ibatane, déplacé et réfugié à Bamako avec sa famille (quinze personnes). Il a assisté, à Ansango, au supplice d’un garçon amputé d’une main. « C’était un mercredi. Ils nous ont amenés au bord du fleuve après avoir installé des sièges. Ils ont assis l’homme sur une chaise, lui ont ligoté les mains et les pieds avant d’aiguiser le couteau. On était forcés de regarder. Ils ont mis cinq minutes à lui scier la main au cri d’“Allah akbar”. La main est tombée à terre. »

La terreur est au Nord conquis aux deux tiers depuis près de six mois par des milices islamistes. Les personnes déplacées grossissent les rangs de parents pauvres dans la capitale où les logis sont des camps de réfugiés. Certains retournent « là-haut ». Ils ne supportent plus ces conditions infernales. « La pluie, le paludisme, le manque d’espace, l’extrême misère, ils n’en peuvent plus », nous confie Sandy Haïdara.

À Bamako, pourtant, la vie semble suivre un cours presque habituel. Les petites vendeuses de maïs font des affaires. La récolte est bonne et permet, me dit l’une d’entre elles, « de faire la soudure », en attendant celle des céréales, dont le mil. Dans le Nord, la production de riz devrait baisser de 30 %. Le cheptel pourrait être perdu.

Les conséquences des événements se font sentir dans tous les secteurs. Quant au tourisme, fini les séjours dans le pays Dogon ou la manifestation de littérature Étonnants Voyageurs prévue en novembre à Bamako. Les grands hôtels ont fermé. Le personnel est au chômage. Les usines tournent au ralenti. Trois cents ouvriers d’une boîte de transformation du textile sont sur le carreau. Les taxis jaunes déplorent « le manque de toubabs ». Confiance en berne entre banques et commerçants, grevant l’économie informelle dans un pays où toute personne qui perçoit un salaire en fait vivre dix autres.

À la télé, le soir, après la météo, un artiste tente de remonter le moral des Maliens. Cette fois-là, c’était le cinéaste Souleymane Cissé qui a vanté « l’unité indéfectible du pays ». Le match de foot éliminatoire Mali-Botswana pour la Coupe d’Afrique des nations 2013 qui a eu lieu le 8 septembre (par bonheur le Mali a gagné par trois buts à zéro) a au moins galvanisé les Maliens. La victoire a été dédiée à ceux du Nord. Qu’en sera-t-il de la rentrée scolaire ? Partielle au sud, elle scellera, aux yeux de tous, la partition du pays.

Tout un peuple, atrocement meurtri, serre les dents dans l’attente d’un règlement hypothétique du conflit. Les hommes du Mujao, d’Ansar Dine et son leader, Iyad Ag Aghaly (Malien d’origine), affiliés à Aqmi, grignotent sans fin des morceaux de territoire. « Ansar Dine, nous dit Sandy Haïdara, est aidé dans son expansion par des groupes islamiques venus d’un peu partout : Afghans, Nigérians de Boko Haram, nom qui signifie “l’éducation occidentale est un péché”, Pakistanais, Somaliens, Yéménites, Tchadiens et Libyens ».

L’État, largement corrompu, n’a aucune politique ferme vis-à-vis du Nord. Les Touareg « laïques », naguère enrôlés par Kadhafi, disposaient d’un véritable arsenal, ce qui n’a pas empêché leur rébellion d’être mise à l’écart. Maints djihadistes ont récupéré les armes prises à l’armée malienne lors des combats. Aqmi est riche, grâce à divers trafics (de drogue de Colombie, d’armes lourdes et d’otages aux rançons colossales). Ils disposent d’un immense territoire où des avions peuvent impunément atterrir, à Kidal, à Gao, à Tessalit, seul aéroport bitumé du Nord. « Des gens du Qatar sont même venus », ajoute Sandy Haïdara.

Quant à l’armée malienne, elle manque de matériel et d’hommes suffisamment aguerris pour s’opposer à des fanatiques résolus. « Elle est caduque, complètement caduque ! » nous affirme Hamadoun Amion Guindo, secrétaire général de la Confédération syndicale des travailleurs du Mali (CSTM). (Voir entretien ci-contre.) Le problème du matériel se double de celui du défaut de formation des hommes au sein d’un corps devenu « une nouvelle fonction publique ». Pour le directeur du centre culturel américain de Bamako, Boubacar Belco Diallo, « l’armée n’est qu’une chasse gardée pour des fils de militaires à peine formés. Certains ne passaient même pas la visite médicale pour 
savoir s’ils étaient aptes ». Ces carences rédhibitoires sont peut-être à l’origine du coup d’État du 22 mars, dû au ras-le-bol des militaires, dont certains, il y a des mois, furent égorgés comme des poulets à Aguelhok, dans la région de Kidal.

Ibrahim Boubacar Keïta, surnommé IBK, ex-premier ministre du président Alpha Oumar Konaré et président de l’Assemblée nationale durant cinq ans sous Amadou Toumani Touré (le président récemment déposé par la junte militaire), nous dit à ce propos : « Nous n’avons eu de cesse de dire qu’il fallait revoir notre armée nationale, la reformer, l’équiper, la mettre à la hauteur de ses missions. Nous avons proposé une loi de programmation militaire contraignante sur le plan budgétaire. Cette politique s’est noyée dans les sables. »

On parle d’une intervention en commun avec la Cedeao. C’est compliqué. Les armes achetées par le Mali sont bloquées dans les ports de Dakar et de Conakry. « J’avoue que j’ai du mal à suivre la logique de la Cedeao », nous dit IBK. « Comme les Maliens le souhaitent, précise-t-il, le recouvrement de notre intégrité territoriale doit être assumé principalement par
nos propres forces, cela a été admis en août et ce fut une bonne chose. Maintenant, on nous a dit de former un gouvernement d’union nationale. Notre pays s’est plié à cette demande et il ne se passe rien quant au déblocage de ces armes. Je trouve paradoxal qu’on veuille contribuer à hâter la libération d’un territoire malien sous contrôle d’Aqmi et de trafiquants et qu’en même temps, on lie les mains à l’armée malienne en lui refusant les moyens militaires dont elle a besoin ».

La confusion a longtemps régné au sommet d’un État à trois têtes, avec, d’un côté, un président de transition, Dioncounda Traoré, ancien ministre de la Défense, ancien président de l’Assemblée nationale – surnommé « celui qui ne cherche rien et qui a tout » par Kassim Traoré, journaliste à l’Indépendant – et de l’autre, le premier ministre, Cheick Modibo Diarra, astrophysicien de formation, qui, toujours selon Kassim Traoré, « pense qu’on lui a donné le Mali en dot de mariage ». Enfin, il y a celui qui imprime son rythme aux deux autres, le capitaine Amadou Haya Sanogo, élu à la tête des putschistes après le 22 mars.

La situation profite au pouvoir 
religieux. En août, Mahmoud Dicko, président du Haut Conseil islamique malien (HCIM), a rempli le stade du 26-Mars avec 60 000 personnes, lors d’un rassemblement sur le thème de « La paix et la réconciliation ». Au centre culturel français, le bibliothécaire, Ousmane Diarra (sous contrat chez Gallimard « Continents noirs »), a modifié le titre de son prochain roman, l’Année des longs couteaux et des noms interminables. Animiste de l’ethnie Bambara, il est aujourd’hui insulté par sa femme et ses enfants parce qu’il ne fait pas les cinq prières par jour. Il émet de sérieuses réserves quant au tout nouveau ministère des Religions et du Culte : « Ce ministère ne fait que renforcer l’emprise du religieux sur le politique. Le HCIM est déjà au centre de toutes les négociations avec les islamistes. »

À Bamako, des embryons d’une islamisation rampante se font jour. Dans les mosquées – huit sur dix sont financées par les salafistes –, c’est la montée en flèche de prêches exaltés et la présence accrue d’imams venus du Pakistan, d’Indonésie, d’Irak, des Émirats et des pays du Golfe, tandis que les lieux de culte wahhabite poussent comme des champignons dans les villages autour de Bamako.

Bref historique d’une crise

22 mars. Amadou Toumani Touré est renversé par des militaires au motif d’incompétence dans la lutte contre la rébellion touareg au nord.

30 mars et 1er avril. Prise de Kidal et de Gao par Ansar Dine, appuyé 
par le MNLA et Aqmi.

2 avril. Prise de Tombouctou par Ansar Dine et Aqmi.

6 avril. Accord-cadre junte militaire-Cedeao, Dioncounda Traoré, président 
intérimaire, Cheick Modibo Diarra, premier ministre de transition.

27 juin. Le Mujao règne à Gao. Le MNLA au second plan.

30 juin. Saccage de mausolées à Tombouctou.

29 juillet. Lapidation à mort, à Aguelhok, d’un couple non marié qui a eu un enfant.

20 août. Nouveau gouvernement de 32 membres.

4 septembre. Traoré demande l’intervention des forces militaires d’Afrique de l’Ouest.
Muriel Steinmetz

Les Médiateurs de l’UEMOA face à la presse: «Il faut un leadership unifié à Bamako», selon le Pr Tévoédjré - maliweb.net

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Repère : la poudrière malienne - International - El Watan

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Bernard Lugan: « Il y a deux guerres au Mali » | JOL Journalism Online Press

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Au Mali, la guerre de l'ombre a déjà commencé - Le Nouvel Observateur

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Les Américains, les Français, les Algériens et les Mauritaniens n'ont pas attendu le feu vert de l'Onu pour traquer les terroristes.

Mots-clés : Terrorisme, Ansar Dine, Gspc




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Des islamistes du groupe armé Ansar Dine au Nord du Mali (Romaric Hien / AFP)

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 » MALI. Les enjeux du soutien militaire français


"Toute perte de temps, tout processus qui s'éterniserait ne pourrait faire que le jeu des terroristes", a averti François Hollande à la tribune de l'ONU, en pressant le Conseil de sécurité de donner son feu vert à une intervention militaire au nord du Mali, tombé aux mains de groupes armés islamistes. Car le président français a enfin obtenu ce qu'il attendait depuis des mois : le Mali s'est résigné à demander à l'ONU d'autoriser le déploiement de plus de 3.000 soldats - composés, à sa demande, uniquement de militaires d’Afrique de l’Ouest fournis par des pays de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) -, pour l'aider à retrouver son intégrité territoriale.

Déjà empêtré dans la guérilla touareg, affaibli par le coup d’Etat du 22 mars, la famine qui menace le pays, et pris en tenailles par les djihadistes algériens, maliens et libyens qui sévissent au nord, Bamako a donc fini par céder aux pressions internationales. Le pays était de toute façon impuissant face aux groupes armés islamiques qui ont pris le contrôle de cette région. Un responsable des forces de sécurité maliennes avoue : "La superficie de notre Sahara est trois fois celle de la France. Nous sommes peut-être le pays le plus pauvre du monde. Comment voulez-vous que nous contrôlions le désert ?"

Imbroglio

Mais dans cet imbroglio sans frontières, comment discerner l’ombre d’Al-Qaïda ? Pas simple. Car, contrairement aux idées reçues, la mouvance de feu Ben Laden serait loin de fédérer tous les mouvements salafistes djihadistes qui s'en réclament. Son idéologie d’une guerre planétaire contrarie en réalité les stratégies locales des moudjahidines algériens du Groupe pour la prédication et le combat (GSPC), autoproclamé Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), dont 95% des combattants sont algériens et qui oeuvre pour l’instauration d’un Etat islamique dans un Maghreb réunifié. "Ce n’est pas seulement l’Afghanistan ou la Syrie qui déterminent les islamistes", affirme une source des services français. "Le GSPC, par exemple, explique-t-il, a pour mission unique de renverser le pouvoir en place, à Alger."

Infiltrée par les services secrets maliens, algériens et mauritaniens, la mouvance islamique s’est atomisée. Elle compte aujourd’hui deux nouveaux groupes : Ansar Dine (les partisans de la religion), un groupe mené par un touareg islamiste, et un mouvement strictement composé de salafistes africains, le Mouvement pour l’unicité et le djihad en Afrique de l‘Ouest (Mujao), qui serait l’œuvre des services maliens, là aussi dans l’intention d’atomiser Aqmi.

Un cadre légal

Si la situation est jugée aujourd'hui incontrôlable, la reconquête du nord et la localisation des otages retenus au Mali a en fait commencé depuis plus de deux ans. En effet, les forces spéciales françaises (environ 200 hommes), mauritaniennes (une centaine), algériennes (300 soldats) et américaines (400 militaires) sont à l’œuvre au Sahara. Par ailleurs, la CIA a installé son QG en Algérie pour la région Maghreb-Sahel. Quant aux forces spéciales, elles se sont établies au Mali et au Burkina Faso.

La décision de l’ONU d’apporter son soutien à la Cédéao pour lutter contre ces groupes armés légalisera ainsi une guerre de l’ombre, menée par la France, les Etats-Unis, la Mauritanie, l’Algérie, le Niger et le Mali.

La guerre en coulisses

Ainsi le 28 avril dernier, les forces spéciales algériennes ont anéanti, avec le soutien d’hélicoptères, plusieurs convois de 4x4 du Mujao, qui tentaient de s’emparer, dans la région frontalière algéro-malienne, à Tinzouatine, de deux camions citernes transportant de l’essence. Résultat du tir : 20 salafistes au tapis et quatre prisonniers. Le même jour, dans la région de Tessalit, des rebelles touaregs indépendantistes du Mouvement de libération de l’Azawad (MNLA) accrochent une katiba (phalange) du Mujao. Les touaregs déplorent 3 morts et 8 blessés évacués en Algérie. L’armée algérienne a déployé plus de 25.000 hommes le long des frontières maliennes et libyennes. De plus, des commandos algériens ont anéanti, en mai, une colonne de djihadistes venant de Lybie, qui transportait quatre missiles milan, vendus à Kadhafi par la France.

Plus inquiétant, un drone français Harfang a été abattu, le 30 juillet dernier, dans le nord du Mali, alors qu’il essayait de localiser les otages, par un missile sol air tiré par les salafistes, qui étaient allé faire leurs courses en Libye, après la chute de Kadhafi. Deux mois auparavant, c’est un drone prédator de l’armée américaine, qui a été détruit par un missile sol-air russe, tiré par des djihadistes, dans la région d’Oukiran, toujours au Nord du Mali. Ce missile a été aussi récupéré dans les arsenaux libyens, laissés à l’abandon. Le Pentagone, échaudé par l’Irak et l’Afghanistan, refuse pour l’instant de déployer l’état-major de l’"Africom", son commandement pour l'Afrique, dans un Etat africain. Celui-ci demeure donc dans une base militaire en Allemagne. François Hollande, lui, a décidé de rapatrier les drones français d’Afghanistan, pour les installer en Mauritanie et au Niger.

Mali: «Les islamistes, unis face à une intervention armée» | JOL Journalism Online Press

Mali: «Les islamistes, unis face à une intervention armée» | JOL Journalism Online Press

Depuis bientôt six mois, le Mali est la cible de mouvements islamistes qui se sont emparé de toute la partie Nord du territoire. La question d’une intervention militaire, après avoir longtemps été envisagée, serait sur le point de se confirmer. Le sujet est à l’ordre du jour de la 67ème conférence de l’Assemblée générale de l’ONU réunie à New York et François Hollande l'a défendu lors de son intervention. Pour André Bourgeot, chercheur au CNRS, les forces armées devront faire face à trois mouvements islamistes désormais bien installés dans leur région.



Photo : capture d'écran vidéo

La crise au Mali est au cœur des discussions, à l’occasion de la 67ème conférence de l’Assemblée générale de l’ONU qui a débuté à New York, mardi 25 septembre. Dans son discours devant l'Assemblée, François Hollande a appelé à la mobilisation autour de la question malienne et à une intervention pour que les Maliens retrouvent l'intégrité de leur territoire. Depuis le 22 mars dernier, et le coup d’État qui a renversé le régime en place, le pays subit une grave crise politique associée à une invasion de divers mouvements islamistes au Nord du pays.

Alors que le président par intérim du Mali, Dioncounda Traoré a appelé à une intervention militaire de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) - intervention que la France a accepté de soutenir matériellement -, la question est désormais entre les mains de l’ONU, qui a la charge de décider des moyens et des forces qui interviendront dans le pays.

Pour André Bourgeot, chercheur au CNRS et spécialiste du Sahel, les forces militaires qui interviendront se heurteront à une force islamiste qui a eu plusieurs mois pour s’installer et se faire accepter par la population locale. Pourtant, l’enjeu est de taille et la sécurité de toute la région subsaharienne est concernée.

Ansar Dine, Aqmi et le Mujao se partagent le Nord du Mali

Les islamistes ont envahi le Nord du Mali depuis le coup d’État du 22 mars. Depuis, les groupes islamistes ont eu le temps de s’installer et de commencer à descendre vers le Sud. Qu’en est-il aujourd’hui ? N’aurait-il pas été plus facile d’intervenir dès le début ?

Il est évident qu’une intervention directement après le 22 mars aurait été beaucoup plus simple. Désormais, les islamistes ont bien installé leur régime. Il y a eu un effet bascule, il y a cinq ou six semaines. Désormais, Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) ainsi qu’Ansar Dine et le Mouvement pour l’unicité et le djihad islamique (Mujao) contrôlent tout le Nord du pays. Ils sont même descendus jusqu’à Douentza, une ville située au sud de Tombouctou, censée être en dehors de la zone de contrôle des islamistes.

Au-delà du plan géographique, la nébuleuse islamiste a également eu le temps d’appliquer la charia et de mettre en place un début d’administration.

Il faut savoir que la présence islamiste au Nord du pays est également considérée par certaines populations locales comme un retour à l’ordre après une grande période de désordre. Lorsque les Touaregs du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) se sont approprié la région, après le coup d’État, de sérieux abus ont été soulevés. L’arrivée des islamistes et l’imposition de la charia ont été paradoxalement perçues comme un retour à l'ordre.

La charia a donc imposé un cadre à une région en désordre ?

La charia n’a pas forcément imposé un cadre, mais au moins un ordre. Les populations du Nord ne veulent pas de la partition que proposait le MNLA. Ce n’est donc pas une adhésion idéologique mais une adhésion territoriale au Mali. Les Songoye, qui représentent la majorité de la population au Nord du Mali face aux Touaregs qui sont minoritaires, ont accueilli le projet des islamistes comme celui d’un retour à l’ordre, ce qui ne veut pas dire pour autant que les populations adhèrent aux pratiques de la charia.

La charia comme alternative à l'indépendance

Les Touaregs ont dû se replier face à l’avancée des islamistes. Où sont-ils aujourd’hui ?

Après avoir été défaits par les djihadistes, les touaregs du MNLA se sont repliés dans la brousse. Ils seraient actuellement en train de préparer une tentative de rebondissement. Un des leaders du MNLA, Ibrahim Ag Mohamed Saleh, a fait une proposition de soutien à Bamako. Les autorités n’ont pas répondu à l’appel des Touaregs et ces derniers ont donc affirmé qu’ils se rallieraient aux djihadistes.

Il semblerait également qu’il y ait des tensions internes au sein même du MNLA. Un autre mouvement s’est créé, le Front populaire de l’Azawad (FPA), qui dénonce la dérive du MNLA sur ses positions indépendantistes. Ces derniers préparent sans doute les négociations qui pourraient porter sur une autonomie élargie. À bout de souffle, et sans le soutien du gouvernement malien, les Touaregs pourraient repenser une alliance avec les islamistes.

Les Touaregs laïcs pourraient-ils réellement s’allier aux islamistes ? Ne serait-ce pas une forme d’alliance contre-nature ?

Ce ne serait pas forcément contre-nature. Il y a déjà eu ce type d'alliance dans le passé et certains d'entre eux pourraient rejoindre Ansar Dine pour des raisons pécuniaires. Aujourd’hui, le MNLA n’a plus vraiment de poids politique et militaire, ils pourraient donc faire le choix de l’alliance. Mais ce choix les discréditerait.

Dans le cas d’une intervention militaire, les islamistes d’Aqmi, d’Ansar Dine et du Mujao feront-ils front uni ou doit-on s’attendre à des dissensions et des luttes de pouvoir entre les trois groupes ?

Dans la région, même si les mouvements sont réunis au sein d’une même alliance, ils ont chacun leur autonomie. Ils poursuivent les mêmes objectifs mais ne visent pas les mêmes populations.

Ansar Dine est un mouvement islamiste constitué d’autochtones. Le Mujao regroupe de nombreuses nationalités subsahariennes mais reste dirigé par des autochtones et toutes leurs cibles sont algériennes. Aqmi, pour sa part, a une dimension plus internationale, ses dirigeants sont issus du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) algérien.

Les différents mouvements sont également organisés de manière géographique. Ansar Dine contrôle Tombouctou,et Kidal  alors que le Mujao s’est installé à Gao.

Tout laisse à supposer que dans le cas d’une intervention internationale, ils feront front uni.

Dans tous les cas, l’enjeu de l’intervention est aujourd’hui entre les mains de l’ONU. Il faudra, par la suite, savoir quel type d’intervention sera mis en place. On parle d’intervention internationale. Mais qu’est-ce qu’une intervention « internationale » ? S’agira-t-il d’une intervention des forces africaines de la Cédéao ou de forces étrangères ? Il faudra attendre la décision du Conseil de sécurité qui se réunira à l’issue de la séance de l’Assemblée générale de l’ONU.

Les intérêts de la France sont grands au Mali

L’intervention au Mali semble décidée, en tout cas entre les autorités maliennes et la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao). La France a affirmé vouloir soutenir cette intervention, quels sont les intérêts français sur place ?

Les intérêts de la France sont multiples. Elle cherche tout d’abord à protéger son influence sur la sous-région, en tant qu’ancienne puissance coloniale. Il y a ensuite l’enjeu des ressources minières du triangle d’or qui comprend l’extrême Nord du Mali, le nord de la Mauritanie et le sud de l’Algérie qui est riche en pétrole et en gaz. Puis il y a également le massif montagneux de l’Adrar, au nord de Kidal, riche en uranium.

Cette ressource est très importante et de nombreux acteurs internationaux pourraient s’investir dans ce conflit pour la préserver.

Il y a quelques jours, les islamistes qui retiennent quatre Français en otage au Nord du Mali ont fait savoir qu’ils pourraient les assassiner si la France s'entêtait dans sa volonté d’encourager et de soutenir matériellement un conflit au Mali. Pensez-vous qu’Aqmi pourrait véritablement mettre ses paroles en pratique ?

Il y a effectivement un risque majeur car Abou Zeid, chef d’Aqmi dans la régionn est un des plus virulents membres de l’organisation. Il ne faut pas oublier que c’est lui qui est à l’origine de la mort de Michel Germaneau, enlevé le 20 avril 2010 et assassiné le 25 juillet suivant et du Britannique Edwin Dyer.

Il y a des risques, mais ces otages représentent également un enjeu de taille pour Aqmi qui est tiraillé par des relations conflictuelles entre ses différents membres. Un des enjeux est notamment de savoir qui, parmi les chefs, contrôlera l’argent de la rançon qui est demandée.

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Mali: «Les islamistes, unis face à une intervention armée» | JOL Journalism Online Press

Mali: «Les islamistes, unis face à une intervention armée» | JOL Journalism Online Press

Depuis bientôt six mois, le Mali est la cible de mouvements islamistes qui se sont emparé de toute la partie Nord du territoire. La question d’une intervention militaire, après avoir longtemps été envisagée, serait sur le point de se confirmer. Le sujet est à l’ordre du jour de la 67ème conférence de l’Assemblée générale de l’ONU réunie à New York et François Hollande l'a défendu lors de son intervention. Pour André Bourgeot, chercheur au CNRS, les forces armées devront faire face à trois mouvements islamistes désormais bien installés dans leur région.



Photo : capture d'écran vidéo

La crise au Mali est au cœur des discussions, à l’occasion de la 67ème conférence de l’Assemblée générale de l’ONU qui a débuté à New York, mardi 25 septembre. Dans son discours devant l'Assemblée, François Hollande a appelé à la mobilisation autour de la question malienne et à une intervention pour que les Maliens retrouvent l'intégrité de leur territoire. Depuis le 22 mars dernier, et le coup d’État qui a renversé le régime en place, le pays subit une grave crise politique associée à une invasion de divers mouvements islamistes au Nord du pays.

Alors que le président par intérim du Mali, Dioncounda Traoré a appelé à une intervention militaire de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) - intervention que la France a accepté de soutenir matériellement -, la question est désormais entre les mains de l’ONU, qui a la charge de décider des moyens et des forces qui interviendront dans le pays.

Pour André Bourgeot, chercheur au CNRS et spécialiste du Sahel, les forces militaires qui interviendront se heurteront à une force islamiste qui a eu plusieurs mois pour s’installer et se faire accepter par la population locale. Pourtant, l’enjeu est de taille et la sécurité de toute la région subsaharienne est concernée.

Ansar Dine, Aqmi et le Mujao se partagent le Nord du Mali

Les islamistes ont envahi le Nord du Mali depuis le coup d’État du 22 mars. Depuis, les groupes islamistes ont eu le temps de s’installer et de commencer à descendre vers le Sud. Qu’en est-il aujourd’hui ? N’aurait-il pas été plus facile d’intervenir dès le début ?

Il est évident qu’une intervention directement après le 22 mars aurait été beaucoup plus simple. Désormais, les islamistes ont bien installé leur régime. Il y a eu un effet bascule, il y a cinq ou six semaines. Désormais, Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) ainsi qu’Ansar Dine et le Mouvement pour l’unicité et le djihad islamique (Mujao) contrôlent tout le Nord du pays. Ils sont même descendus jusqu’à Douentza, une ville située au sud de Tombouctou, censée être en dehors de la zone de contrôle des islamistes.

Au-delà du plan géographique, la nébuleuse islamiste a également eu le temps d’appliquer la charia et de mettre en place un début d’administration.

Il faut savoir que la présence islamiste au Nord du pays est également considérée par certaines populations locales comme un retour à l’ordre après une grande période de désordre. Lorsque les Touaregs du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) se sont approprié la région, après le coup d’État, de sérieux abus ont été soulevés. L’arrivée des islamistes et l’imposition de la charia ont été paradoxalement perçues comme un retour à l'ordre.

La charia a donc imposé un cadre à une région en désordre ?

La charia n’a pas forcément imposé un cadre, mais au moins un ordre. Les populations du Nord ne veulent pas de la partition que proposait le MNLA. Ce n’est donc pas une adhésion idéologique mais une adhésion territoriale au Mali. Les Songoye, qui représentent la majorité de la population au Nord du Mali face aux Touaregs qui sont minoritaires, ont accueilli le projet des islamistes comme celui d’un retour à l’ordre, ce qui ne veut pas dire pour autant que les populations adhèrent aux pratiques de la charia.

La charia comme alternative à l'indépendance

Les Touaregs ont dû se replier face à l’avancée des islamistes. Où sont-ils aujourd’hui ?

Après avoir été défaits par les djihadistes, les touaregs du MNLA se sont repliés dans la brousse. Ils seraient actuellement en train de préparer une tentative de rebondissement. Un des leaders du MNLA, Ibrahim Ag Mohamed Saleh, a fait une proposition de soutien à Bamako. Les autorités n’ont pas répondu à l’appel des Touaregs et ces derniers ont donc affirmé qu’ils se rallieraient aux djihadistes.

Il semblerait également qu’il y ait des tensions internes au sein même du MNLA. Un autre mouvement s’est créé, le Front populaire de l’Azawad (FPA), qui dénonce la dérive du MNLA sur ses positions indépendantistes. Ces derniers préparent sans doute les négociations qui pourraient porter sur une autonomie élargie. À bout de souffle, et sans le soutien du gouvernement malien, les Touaregs pourraient repenser une alliance avec les islamistes.

Les Touaregs laïcs pourraient-ils réellement s’allier aux islamistes ? Ne serait-ce pas une forme d’alliance contre-nature ?

Ce ne serait pas forcément contre-nature. Il y a déjà eu ce type d'alliance dans le passé et certains d'entre eux pourraient rejoindre Ansar Dine pour des raisons pécuniaires. Aujourd’hui, le MNLA n’a plus vraiment de poids politique et militaire, ils pourraient donc faire le choix de l’alliance. Mais ce choix les discréditerait.

Dans le cas d’une intervention militaire, les islamistes d’Aqmi, d’Ansar Dine et du Mujao feront-ils front uni ou doit-on s’attendre à des dissensions et des luttes de pouvoir entre les trois groupes ?

Dans la région, même si les mouvements sont réunis au sein d’une même alliance, ils ont chacun leur autonomie. Ils poursuivent les mêmes objectifs mais ne visent pas les mêmes populations.

Ansar Dine est un mouvement islamiste constitué d’autochtones. Le Mujao regroupe de nombreuses nationalités subsahariennes mais reste dirigé par des autochtones et toutes leurs cibles sont algériennes. Aqmi, pour sa part, a une dimension plus internationale, ses dirigeants sont issus du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) algérien.

Les différents mouvements sont également organisés de manière géographique. Ansar Dine contrôle Tombouctou,et Kidal  alors que le Mujao s’est installé à Gao.

Tout laisse à supposer que dans le cas d’une intervention internationale, ils feront front uni.

Dans tous les cas, l’enjeu de l’intervention est aujourd’hui entre les mains de l’ONU. Il faudra, par la suite, savoir quel type d’intervention sera mis en place. On parle d’intervention internationale. Mais qu’est-ce qu’une intervention « internationale » ? S’agira-t-il d’une intervention des forces africaines de la Cédéao ou de forces étrangères ? Il faudra attendre la décision du Conseil de sécurité qui se réunira à l’issue de la séance de l’Assemblée générale de l’ONU.

Les intérêts de la France sont grands au Mali

L’intervention au Mali semble décidée, en tout cas entre les autorités maliennes et la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao). La France a affirmé vouloir soutenir cette intervention, quels sont les intérêts français sur place ?

Les intérêts de la France sont multiples. Elle cherche tout d’abord à protéger son influence sur la sous-région, en tant qu’ancienne puissance coloniale. Il y a ensuite l’enjeu des ressources minières du triangle d’or qui comprend l’extrême Nord du Mali, le nord de la Mauritanie et le sud de l’Algérie qui est riche en pétrole et en gaz. Puis il y a également le massif montagneux de l’Adrar, au nord de Kidal, riche en uranium.

Cette ressource est très importante et de nombreux acteurs internationaux pourraient s’investir dans ce conflit pour la préserver.

Il y a quelques jours, les islamistes qui retiennent quatre Français en otage au Nord du Mali ont fait savoir qu’ils pourraient les assassiner si la France s'entêtait dans sa volonté d’encourager et de soutenir matériellement un conflit au Mali. Pensez-vous qu’Aqmi pourrait véritablement mettre ses paroles en pratique ?

Il y a effectivement un risque majeur car Abou Zeid, chef d’Aqmi dans la régionn est un des plus virulents membres de l’organisation. Il ne faut pas oublier que c’est lui qui est à l’origine de la mort de Michel Germaneau, enlevé le 20 avril 2010 et assassiné le 25 juillet suivant et du Britannique Edwin Dyer.

Il y a des risques, mais ces otages représentent également un enjeu de taille pour Aqmi qui est tiraillé par des relations conflictuelles entre ses différents membres. Un des enjeux est notamment de savoir qui, parmi les chefs, contrôlera l’argent de la rançon qui est demandée.

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ien Offner | Journaliste


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Après un court conflit contre le Burkina Faso en 1985 et un cycle d’affrontements entre rebelles touaregs et armée malienne depuis l’indépendance en 1960, l’Etat malien se prépare à la guerre la plus importante de sa jeune histoire.

Suite à l’offensive des rebelles indépendantistes touaregs en janvier, au coup d’Etat du 22 mars et à la conquête du Nord par les jihadistes en avril, le Mali joue aujourd’hui une partie de sa culture et quelques centaines de milliers de kilomètres carrés de son territoire.

Entre 300 000 et 400 000 personnes ont dû fuir à l’étranger ou dans d’autres régions du Mali. Depuis l’application de la charia, sept personnes ont été amputées et un couple lapidé à mort.

Après des mois de conflits internes au Mali (agression du Président par intérim, affrontements entre militaires, lutte pour le pouvoir entre putschistes et autorités de la transition), une solution militaire se dessine. Les hommes du commandant Amadou Aya Sanogo, meneur de l’ex-junte du Comité national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l’Etat (CNRDRE), ont finalement accepté le déploiement d’une force ouest-africaine dont le quartier général sera à Bamako.

Par effet domino, l’accord entre le Mali et ses voisins pourrait inciter l’ONU à cautionner une intervention militaire. Dans une prudente résolution, le Conseil de sécurité s’était déclaré en juillet « prêt à examiner plus avant la demande de la Cédéao dès qu’il aura obtenu davantage de précisions sur les objectifs, les moyens et les modalités du déploiement envisagé et sur d’autres mesures possibles ».

Une conférence internationale sur le Sahel se réunit ce mercredi à New York en marge de l’Assemblée générale des Nations unies afin de franchir une nouvelle étape.

1

Quels sont les obstacles à une intervention militaire ?

Une intervention militaire concertée et validée par la communauté internationale ne serait pas pour autant synonyme de succès immédiat.
En dehors du Burkina Faso et du Niger, les voisins du Mali ne se bousculent pas pour voler à son secours. Principales puissances militaires de la Cédéao, le Sénégal, la Côte d’Ivoire et le Nigeria ont tous fort à faire avec leur propres problèmes.

Très critique à l’égard de l’inconséquence du Mali face à la menace terroriste ces dernières années, la Mauritanie – non membre – n’envisage pas d’intervenir sans un feu-vert de l’ONU.

Mobiliser, déployer et assurer la logistique des quelque 3 000 combattants nécessaires réclame par ailleurs du temps et de l’argent. « C’est à la portée de nos amis africains », a estimé le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius le 24 septembre à New York.

Le faux bond de l’Algérie

Mais le grand faux bond est pour le moment à mettre au compte de l’Algérie. Alger ne souhaite pas un déploiement de troupes dans le Nord-Mali frontalier (encore moins d’une présence française) mais n’a jusqu’à présent pas fait grand-chose pour aider son voisin à se débarrasser d’Aqmi, dont les leaders sont souvent des Algériens issus du Groupe islamique armé (GIA) et du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC).

L’ONG International Crisis Group écrit dans un récent rapport [PDF] :

« Chacun sait que [l’Algérie] est, de loin, le pays capable d’exercer une pression forte sur les groupes. [...] La rupture de l’alliance stratégique informelle entre le Mali et son puissant voisin nord-africain au cours des dernières années de présidence ATT est un élément important d’explication de la facilité avec laquelle les islamistes d’Ansar Dine et d’Aqmi ont pris le contrôle du Nord-Mali.

L’Algérie n’est pas intervenue lorsque les rebelles se sont emparés de la ville stratégique de Tessalit, qui est très proche de la frontière, et n’ont pas non plus aidé les forces maliennes à tenir Kidal, malgré l’existence d’un comité d’état-major opérationnel conjoint (Cemoc) des pays du champ (Mali, Mauritanie, Niger et Algérie) basé à Tamanrasset, dans le Sud algérien. »

Autre épine dans le pied d’une intervention militaire : le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA). Les rebelles touaregs indépendantistes cherchent désespérément à sauver la face après avoir fait la girouette pendant des mois. Ses combattants avaient lancé les hostilités contre l’armée malienne en janvier, avant de proclamer en avril l’indépendance de « l’Azawad » une fois conquises les grandes villes du Nord avec l’aide des islamistes, qu’ils avaient pourtant juré de combattre.

Rapidement chassés par leurs alliés de circonstance, ils ne contrôlent plus que quelques localités et menacent maintenant de s’allier à nouveau avec « les islamistes et les terroristes » si un accord n’est pas conclu avec l’Etat malien avant une intervention.

Le rêve d’un « Azawad » indépendant, condamné par la communauté internationale et, jusqu’à preuve du contraire, non souhaité par la majorité des populations du Nord, est d’ores et déjà évanoui.

La crainte d’une intervention extérieure

A Bamako, une partie de la société civile menée par des organisations favorables au coup d’Etat et considérant la Cédéao comme une marionnette de la Françafrique est toujours opposée à une intervention étrangère. L’heure est cependant à la démobilisation parmi ces groupes, suite au traumatisme de l’agression de Dioncounda Traoré en mai, pour laquelle certains de leurs responsables ont été condamnés. La Coordination des organisations patriotiques du Mali (Copam) a appelé à manifester vendredi. La semaine dernière, une manifestation similaire n’avait réuni que quelques dizaines de personnes.

Enfin, une intervention armée menacerait de réveiller toutes les rancœurs et les désirs de vengeance enfouis depuis des décennies et ravivés en 2012. Les répressions des précédentes rébellions ont été marquées par des massacres de civils touaregs et l’engagement de milices dans le conflit, officiellement condamné par le gouvernement mais en pratique encadré par lui, risque de libérer les violences intercommunautaires entre Noirs et « Blancs » (Maliens touaregs et arabes).

De fait, la situation qui prévaut aujourd’hui dans ces régions est celle de chefs algériens ou Maliens arabes ou touaregs qui dominent et imposent une charia à des populations majoritairement noires.

2

Pourquoi l’option de la négociation est-elle au point mort ?

Officiellement, le Mali est ouvert à la négociation. Dioncounda Traoré, à l’occasion du 52e anniversaire de l’indépendance du Mali, a déclaré le 22 septembre :

« Puisque nous la préparons, nous ferons la guerre s’il ne nous reste plus d’autre choix. Mais nous réaffirmons ici que notre premier choix reste le dialogue et la négociation. Notre deuxième choix reste le dialogue et la négociation. Notre troisième choix demeure le dialogue et la négociation. »

La guerre fait pourtant l’objet de plus d’empressement. Le 29 juillet, après son retour au Mali suite à son agression, le Président de la transition avait souhaité la création d’une Commission nationale aux négociations. Il a annoncé le 22 septembre « qu’à l’issue des assises nationales qui se tiendront dans les jours prochains [...], des contacts seront établis en vue d’engager des négociations sincères dans le respect strict de l’intégrité territoriale et de la laïcité de la République ».

Ces « assises » ou cette « concertation nationale » maintes fois annoncées n’étant pas pour tout de suite et les jihadistes se disant ouverts à la négociation... Tant qu’on accepte la charia, autant dire que les négociations ont peu de chance d’aboutir.

En l’absence de négociateurs officiels, le dialogue avec les occupants n’est donc pour l’instant que le fait d’initiatives personnelles peu transparentes, voire suspicieuses. Le député pro-putsch Oumar Mariko a rencontré une délégation d’Ansar Dine dans un but inconnu. Quant à la Coalition pour le Mali, composée notamment du Collectif des élus du Nord boutés hors de leurs circonscriptions, certains de ses membres sont revenus du Nord porteurs d’un discours très conciliant à l’égard de la charia et des groupes armés.


3

Après l’Afghanistan, une nouvelle guerre française ?

Ancienne colonisatrice du Mali et cible désignée par Al Qaeda du temps d’Oussama Ben Laden, la France est en première ligne dans la poudrière sahélienne, même si le ministre français des Affaires étrangères préfère la présenter comme « un facilitateur ».

Une retenue essentielle puisque trois otages français ont été tués aux mains d’Aqmi depuis 2010 et six sont toujours captifs. AQMI a récemment menacé de tuer certains d’entre eux. Une façon de dissuader la France d’intervenir, alors que Paris a promis d’apporter un « soutien logistique » à la future force africaine.

Mardi à New York, Laurent Fabius a redit :

« Il ne s’agit pas d’envoyer des troupes françaises au sol, il n’en est pas question. C’est aux Africains, sous mandat des Nations unies, de mener les actions nécessaires. Nous qui sommes opposés au terrorisme, si nous pouvons aider d’une manière ou d’une autre, nous le ferons. »

Difficile pourtant d’imaginer que l’armée française n’engagerait pas ses hommes du Commandement des opérations spéciales (COS) présents au Burkina Faso – et intervenus en vain en janvier 2011 pour tenter de libérer deux otages français enlevés à Niamey – en soutien aux forces africaines.

Bien que notables, les intérêts économiques de la France au Mali ne sont pas aussi importants que le laissent penser les pourfendeurs d’une France jugée néocolonialiste. Parmi les pays de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), le Mali se situe au cinquième rang (chiffres 2010) au niveau des échanges (imports et exports). Derrière le Sénégal, le Niger, le Bénin et la Côte d’Ivoire, où la France était intervenue en 2011 sous mandat de l’ONU pour renverser Laurent Gbagbo.

« Nous avons le devoir d’agir, d’agir ensemble et d’agir vite, car il y a urgence », a déclaré mardi François Hollande à la tribune des Nations unies, écouté par les quelque 4 500 Français du Mali et les dizaines de milliers de Maliens de France.

MERCI RIVERAINS !John Merrick

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Carter F. Ham

Le général Carter F. Ham, commandant en chef de l’AFRICOM (commandement des forces armées américaines en Afrique), a affirmé lors d’une conférence de presse à Alger que son pays n’envisageait pas une présence militaire dans le nord du Mali.

« La seule alternative qui ne pourrait pas exister, c’est la présence militaire américaine dans le nord du Mali », a-t-il dit.

Pour lui, « l’un des aspects clés dans le règlement de ce conflit, c’est de faire la distinction entre les groupes armés dans cette région et définir ceux qui sont terroristes et ceux qui ne le sont pas ».

La vision américaine pour un règlement politique et diplomatique de la crise malienne rejoint, ainsi, l’approche algérienne présentée, mercredi dernier à New York, par le ministre délégué chargé des Affaires maghrébines et africaines, Abdelkader Messahel, lors de la réunion de haut niveau sur le Sahel et le Mali, organisée en marge de l’Assemblée générale de l’ONU.

Cette approche préconise de cerner les aspects à prendre en considération dans la définition d’une stratégie pour le Sahel en cours d’élaboration par les Nations unies.

L’Algérie estime, à ce propos, que pour s’entourer de meilleures chances de succès, la recherche d’une sortie de crise au Mali gagnerait à être conduite dans le respect de certaines exigences.

Il s’agit d’abord d’aider et soutenir les Maliens en tant que premiers acteurs dans la recherche de solutions à leurs problèmes.

Le deuxième aspect sur lequel l’accent doit être mis, est que les acteurs de la communauté internationale doivent être guidés par un même agenda et leurs efforts conduits selon un même ordonnancement, en tenant compte non seulement de la volonté des Maliens et des prérogatives de la Cedeao, mais aussi des intérêts de sécurité nationale des pays du champ voisins du Mali (Algérie, Niger et Mauritanie).

Il doit également être tenu compte des responsabilités de supervision et de coordination dévolues à l’Union africaine en matière de maintien de la paix et de la sécurité et de l’appui attendu de l’ONU.

Quant à la troisième exigence défendue par l’Algérie, est qu’une solution politique négociée doit être dégagée dans les meilleurs délais possibles pour éviter toute situation d’enlisement, qui impliquerait les acteurs qui se démarquent sans équivoque du terrorisme et du crime international organisé et qui renoncent à toute atteinte à l’intégrité territoriale du Mali.

Le général américain a expliqué, dans ce contexte, que les Etats unis « n’ont pas la même compréhension » que l’Algérie au sujet de ce qui ce qui se passe au Mali et c’est pour cette raison, a-t-il dit, que « nous essayons de comprendre quel est le rôle du groupe Ansar Eddine ou encore celui du Mujao (Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest) et du MNLA (Mouvement national de libération de l’Azawad).

Il a indiqué que d’autres défis doivent être relevés, « à commencer par la mise en place d’un gouvernement légitime à Bamako (capitale du Mali) et la nécessité de faire face aux préoccupations des populations dans le nord (du Mali) ».

Le responsable militaire américain s’est dit convaincu que « finalement, la crise au nord du Mali ne peut être résolue que de manière diplomatique ou politique ». « La composante militaire fera partie d’un tout et jouera un rôle bien précis dans le règlement de ce conflit », a-t-il noté.

D’autre part, le général Carter Ham a rendu hommage à l’Algérie pour son action « très efficace » dans le traitement de la crise humanitaire générée par le conflit dans le nord du Mali.

« Au nord du Mali, il y a une crise humanitaire grave engendrée par le conflit dans la région. Il y a des gens qui ont besoin d’eau et de nourriture et l’Algérie a été très présente et très efficace dans ce sens », a-t-il déclaré.

L’Algérie a fourni une aide humanitaire de 5.800 tonnes au profit des réfugiés maliens dans les pays voisins, ainsi qu’aux populations déplacées dans le sud du Mali.

Source: algeriesoir.com – 30/09/2012

Crise au nord du Mali : la télévision algérienne parle, pour la première fois, du MNLA et de l’Azawad - maliweb.net

Crise au nord du Mali : la télévision algérienne parle, pour la première fois, du MNLA et de l’Azawad - maliweb.net
ALGER (SIWEL) — Après une censure et une manipulation grotesque de l’information concernant le noble combat du Mouvement national pour la libération de l’Azawad, MNLA, la télévision algérienne parle pour la première fois du MNLa et de l’Azawad.

L’Algérie semble être dépassée par les évènements au Sahel. PH/DR

En effet, L’ENTV a prononcé, pour la première fois, le nom de l’Azawad et du MNLA après censure totale qui a duré depuis le conflit au nord du Mali. L’Algérie, élément important dans le conflit a injecté des groupes terroristes au nord du Mali pour casser la dynamique du nouvel Etat touareg.

Lors du Journal télévisé de 13 H d’hier samedi, le présentateur a parlé de rebelles touaregs et le courrier envoyé par Moussa Ag Attaher, porte-parole du MNLA en Europe, à l’ONU concernant le droit des touaregs de l’Azawad à l’auto-détermination.

Des observateurs évoquent un début de reconnaissance de l’Algérie officielle de la cause de l’Azawad, après avoir soutenu les groupes terroristes et les trafiquants de drogues qui écument la région.

A une journée du forcing français à l’ONU pour une intervention militaire et quelques heures après la venue du commandant de l’Africom à Alger, l’Algérie officielle a-t-elle changé de position sous la pression américaine? Tout porte à le croire.

Source: siwel.info - 30/09/2012

Mali: « la seule façon de régler le problème est militaire », selon Abdou Diouf - maliweb.net

Mali: « la seule façon de régler le problème est militaire », selon Abdou Diouf - maliweb.net
Mali: « la seule façon de régler le problème est militaire », selon Abdou Diouf

30 septembre 2012 Rubrique: Contributions
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Le secrétaire général de la Francophonie et ancien président sénégalais, Abdou Diouf

PARIS — La « seule façon de régler le problème » du nord du Mali, occupé depuis six mois par des islamistes armés, est « militaire », a affirmé dimanche le secrétaire général de la Francophonie, l’ancien président sénégalais Abdou Diouf.

« J’ai nourri l’espoir que ce problème se réglerait par la négociation mais j’ai perdu mes illusions. La seule façon de régler ce problème est militaire », a déclaré M. Diouf, dans un entretien à la chaîne TV5 Monde.

« Il n’y a pas d’alternative » face à des « islamistes alliés à des narcotrafiquants, à des preneurs d’otages et à des criminels frontaliers », a-t-il estimé. « Il faut que tout le monde s’y mette. Il ne faut pas être tiède dans cette affaire ».

« La situation est extrêmement grave. Personne ne sera à l’abri si ce cancer se développe », a-t-il insisté.

Pour le secrétaire général de l’Organisation internationale de la Francophonie, « c’est un problème qu’on ne peut pas laisser entre les mains du Mali et de la Cédéao », la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest qui s’est dit prête à déployer une force de 3.300 hommes sur place.

« Le gouvernement malien, la Cédéao seront en première ligne », a-t-il dit. « Mais toute la communauté internationale est concernée. Il faut les aider à vaincre le terrorisme qui se développe dans le nord du pays », a-t-il estimé.

« On n’a pas le choix. J’entends parler de gens qui ne veulent pas de troupes étrangères mais on n’a pas le choix. Il faut être sérieux! » s’est-il exclamé.

Interrogé sur le XIVe sommet de la Francophonie, dont la tenue du 12 au 14 octobre à Kinshasa a été critiquée, notamment par l’opposition congolaise et des organisations de défense des droits de l’homme, M. Diouf a affirmé que « personne n’a demandé sa délocalisation ».

Rappelant que la République démocratique du Congo est « le premier pays francophone au monde », M. Diouf a jugé que « si on veut tirer la RDCongo vers le haut, il est bon d’aller à Kinshasa dire ce que nous avons à dire, en termes de bonne gouvernance, d’Etat de droit, de respect des droits de l’homme ».

Interrogé sur une supposée hésitation du président François Hollande à se rendre à Kinshasa, M. Diouf a répondu: « Je ne conçois pas un sommet de la Francophonie sans la présence du chef de l’Etat français, tout comme mon homologue du Commonwealth n’envisagerait pas un sommet du Commonwealth sans la Reine d’Angleterre ».

AFP / 20:31 – 30/09/12

Dilemme de la diplomatie française L’intervention militaire au Mali ne fait pas l’unanimité - Liberté Algérie , Quotidien national d'information

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Mali : Cacophonie au sommet de la transition

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"Au Mali, chaque jour, les terroristes se renforcent"

"Au Mali, chaque jour, les terroristes se renforcent"

Cheick Modibo Diarra, 60 ans, est depuis le 17 avril, le premier ministre du gouvernement malien de transition instauré après le retrait de la junte militaire. Il revient de New York où, en marge de l'Assemblée générale des Nations Unies, il a formellement demandé à l'ONU une intervention militaire internationale afin de reconquérir le Nord du Mali contrôlé depuis six mois par des groupes islamistes armés.

Comment comptez-vous rétablir la souveraineté du Mali ?

Cheick Modibo Diarra : Nous avons défini une stratégie en cinq points. Il faut, dès maintenant, commencer à sécuriser les grandes villes du Mali. Si vous regardez le modus operandi des terroristes qui occupent le Nord du Mali, ce sont des gens qui dès que vous les contrariez, commettent des actes de violences dans des zones peuplées. Il faut donc faire en sorte qu'il n'y ait pas d'infiltration, ni multiplication de cellules dormantes.

La deuxième étape, accomplie à New York, est de solliciter formellement l'aide de notre organisation sous régionale, la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest [Cédéao], de l'Union africaine [UA], de l'Union européenne [UE] et de nos amis comme la France et les Etats- Unis et de transmettre au Conseil de sécurité notre requête d'intervention militaire internationale sous le chapitre 7 de la charte des Nations unies. Une fois votée, la résolution donnera une légitimité à tous ceux qui veulent et qui peuvent nous accompagner dans la libération du nord.

La phase deux se poursuivra avec des rencontres du gouvernement pour mobiliser toute la communauté internationale afin de voir qui veut participer, et comment, à la libération du nord. La troisième phase consiste, avec nos partenaires, à structurer et à solidifier l'armée malienne qui doit être le fer de lance de cette affaire.

Ces phases n'ont pas besoin d'être séquentielles. Elles peuvent se dérouler en même temps. La quatrième phase est de reconquérir le nord. Puis, enfin, il faudra sécuriser les régions libérées de façon durable.

Quel est votre calendrier ?

J'espère que les débats [sur la résolution] vont commencer au Conseil de sécurité dès la semaine prochaine afin qu'elle soit adoptée avant la mi-octobre. Chaque jour qui passe, nous avons davantage de mutilations, d'amputations, de viols, d'actes de barbarie dans le nord de notre pays. Le plus rapidement la résolution sera adoptée, le mieux ce sera. Et je suis convaincu que dès que nous aurons une résolution la plupart de ces malfrats et bandits essaierons de s'échapper avant même que les choses sérieuses commencent. Seuls les plus endurcis resteront.

Quand espérez-vous que la Cédéao enverra le contingent de 3 300 hommes qu'elle a promis de déployer au Mali ?

Une fois la résolution votée, on pourra immédiatement demander à la Cédao de déployer des troupes qui nous aideraient à sécuriser la ligne de séparation entre le nord et le sud. Parce qu'à ce moment là, juste après le vote, les belligérants du nord et les narcotrafiquants vont se dire " le Mali ne sera jamais plus aussi faibles, bientôt des soldats vont venir renforcer notre armée donc si nous voulons vraiment lui nuire, c'est le moment où jamais ". Il faut donc que la force de la Cédéao soit prête pour un déploiement presque immédiat dès l'adoption de la résolution.

Hillary Clinton a estimé que "seul un gouvernement démocratiquement élu aura la légitimité pour parvenir à une résolution négociée au Nord Mali et mettre un terme à la rébellion". N'est-ce pas le signe que les Etats-Unis sont opposés à une intervention internationale ?

Des élections... Quelle serait la légitimité d'un président élu dans un pays qui ne peut pas faire voter tous ses citoyens ? Je ne pense pas que les Etats-Unis bloqueront la résolution au conseil de sécurité de l'ONU

Ils veulent participer au règlement de la situation dans le Sahel. Mais leur législation leur interdit de collaborer avec des gens arrivés au pouvoir après un coup d'Etat, jusqu'à de nouvelles élections. Je ne pense pas que le désir des USA soit de faire perdurer la souffrance et le risque de globalisation des problèmes dans le Sahel. C'est juste une façon de nous dire ne pas prolonger inutilement la transition. Les Etats-Unis nous ont toujours demandé d'organiser, le plus rapidement possible, des élections crédibles. Ce message nous l'avons compris.

Si la résolution est votée en octobre, quand les forces de la Cédéao pourront-elles se déployer ?

On pourrait immédiatement demander à la Cédao de se déployer pour nous aider à sécuriser la ligne de séparation entre le nord et le sud. Parce qu'une fois que la résolution sera adoptée les belligérants du nord et les narcotrafiquants vont se dire "le Mali ne sera plus jamais aussi faible, des soldats vont venir le renforcer donc si nous voulons vraiment lui nuire c'est le moment où jamais". La force en attente de la Cédéao peut donc être invitée à renforcer les Maliens qui patrouillent dans cette zone et ainsi nous accorder un peu de tranquillité d'esprit pour préparer les autres phases. Donc j'inviterai la Cédéao à se déployer presque immédiatement après l'adoption de la résolution. Même si ce n'est pas toute la force.

Une fois la résolution adoptée, une stratégie consensuelle pourra être dégagée entre tous les participants. Mais sans attendre, il faudra renforcer la ligne de séparation pour que le problème ne gagne pas en complexité à cause des infiltrations ou des tentatives pour casser cette ligne.

Sur quels pays comptez-vous ?

La question du Mali ne concerne pas seulement la Cédéao, mais toute la communauté internationale. Le Mali et la Cédéao joueront un rôle-clé mais il faut aussi inviter des pays du champ, tels que l'Algérie et la Mauritanie dont la participation est incontournable, des amis, comme le Maroc ou le Tchad. Bref, tous ceux qui pourraient venir nous aider à contenir le problème à une zone très restreinte en attendant que la communauté internationale – France, Etats-Unis, Grande-Bretagne notamment – apprête sa force d'intervention pour faire un travail propre et rapide.

La Cédéao est-elle prête ?
Vue l'insistance avec laquelle cette organisation nous a demandé de faire une requête d'intervention internationale, j'imagine que cela veut dire qu'il existe une telle force, quelque part. On a même parlé d'une force de 3 300 hommes. Dans un premier temps, il ne s'agit pas de tous les déployer, mais peut être un tiers pour renforcer nos lignes. A propos de l'Algérie et de la Mauritanie, ce sont des pays avec lesquels nous partageons près de 4 000 km de frontières. Il est évident que leur participation est incontournable. La question n'est pas de savoir qui est pour ou contre une intervention. Chacun dans cette affaire a son opinion. Certains pensent même qu'il faut négocier. Mais avec qui négocier ? Et pourquoi, on ne l'a pas fait jusqu'à présent ?

D'où l'intérêt d'internationaliser la crise avec la résolution de l'ONU. Ce consensus prévaudra. C'est une initiative malienne, ça se passe au Mali, le gouvernement malien a une stratégie en 5 points pour demander l'aide internationale. Ca fait plus de huit mois que dure la crise et je n'ai pas vu de solution non militaire émerger. En revanche, la situation empire de jour en jour avec les amputations, les flagellations, les viols, les destructions de nos sites au nord. Tout cela s'est passé sans que ceux qui croient à la négociation ne nous montrent le chemin pour ramener ces gens à la raison.

Parler de négociation en ce temps-là en réalité ferait perdre un temps précieux. Chaque jour qui passe, ces terroristes se renforcent, mettent en place des infrastructures de plus en plus sophistiquées qui nous demanderont davantage d'avantage d'efforts pour sortir de la crise. Le temps pour ces négociations est passé. Nous avons utilisés tous les canaux possibles. Nous avons un médiateur désigné par la Cédéao [Blaise Compaoré, le président du Burkina Faso] mais à ce jour nous n'avons pas reçu, de la part des terroristes et des occupants, un seul signal disant " nous voulons négocier ".

Il ne faut pas faire d'amalgame. Ce n'est pas un problème entre Maliens mais un problème avec des terroristes, des narcotrafiquants, des preneurs d'otages, des bandits de toutes sortes...Il faut que la communauté internationale se soulève contre tout cela et qu'elle les repousse.

Nous sommes prêts à négocier, à tout moment, avec le MNLA [Mouvement national de libération de l'Azawad]. Mais le MNLA ne représente, peut être, que 10% de la population au Nord et militairement il n'est plus sur le terrain. Les terroristes du MUJAO ont complètement décimé la branche militaire du MNLA. Il ne reste que la branche politique qui se promène à travers le monde et qui demande des négociations.

Mais cela n'a rien à voir avec le plus gros problème du Sahel : la présence de trafiquants de tous ordres et de plusieurs groupes terroristes connus au niveau international. Les pays qui parlent de négociations nous ont fait perdre du temps. Six mois après, un millier de terroristes dotés d'armes sophistiquées se sont installés. Cela n'a rien à voir avec les revendications de petits groupes dissidents du Mali.

Cette offre de dialogue provient pourtant du président malien, Dioncounda Traoré et de Blaise Compaoré...

Moi non plus je ne veux pas faire la guerre avec mes compatriotes. Les seuls avec lesquels on peut négocier ce sont ceux du MNLA. Ansar Dine ? Une de ses branches vient d'amputer des gens à Tombouctou. J'appelle ça des extrémistes pas des séparatistes. Ce n'est pas la même chose. Il ne s'agit pas de mobiliser la communauté internationale pour aller combattre des Maliens qui ont des revendications que certains peuvent trouver justes. Il s'agit d'aller déloger des narcotrafiquants et des terroristes qui petit à petit se sont installés et qui menacent non seulement le Mali et la sous région mais aussi, à terme, le reste du monde.

L'offensive du MNLA au début de l'année a ouvert la porte au chaos par laquelle sont entrés toutes sortes de terroristes : Boko Haram, le Mujao, Aqmi, des salafistes de tous bords et Ansar Dine qui se rapproche de plus en plus de la définition du terrorisme. Ils se sont infiltrés et ont fini par chasser ceux qui ont commencé ce problème. Il n'y a personne, actuellement sur le terrain, avec lesquels on peut nous suggérer de négocier. Ceux avec lequel nous sommes prêts à négocier [le MNLA] sont éparpillés entre Nouakchott, Niamey et Ouagadougou. Mais cela ne doit pas retarder la résolution que nous avons prise au niveau du Mali et sur la base de laquelle on a invité d'autres à venir nous aider pour débarrasser le monde entier de ce fléau.

Est-ce que tous les Maliens, au sud, sont d'accord avec le déploiement de forces étrangères sur leur sol ?
Premièrement, le capitaine Sanogo [ex-chef de la junte]... Notre décision de demander une intervention internationale est une décision politique dans laquelle il ne s'est pas impliqué. La position du président et du gouvernement représente celle de tout le Mali.

Le capitaine Sanogo... C'est une décision politique dans laquelle il ne s'implique pas. La position du président et du gouvernement représente celle de tout le Mali. Comment demander à des gens de venir nous aider sans qu'ils soient présents sur le territoire. Venir aider le Mali à libérer le nord c'est une chose, stationner à Bamako qui est à 600 km de la ligne de séparation en est une autre. Peut-être que les troupes qui vont aller au front vont transiter par Bamako. Des avions d'une certaine dimension devront nécessairement atterrir à Bamako. On verra.

Mais ce sont juste des forces qui doivent transiter vers la ligne de front. Mais une fois qu'on aura mutualisé les forces, les généraux diront où il faut stationner les forces... Mais on n'en est pas encore là. Aujourd'hui je ne vois pas la nécessité de stationner des troupes à Bamako. Nous avons les effectifs nécessaires pour sécuriser les institutions de la République.

J'ai créé une force de plus de 1 200 hommes pour sécuriser la présidence, la primature, l'Assemblée nationale, les cours suprême et constitutionnelle, les ambassades et faire des patrouilles en ville. Ils peuvent effectivement bénéficier d'un rafraichissement de leurs capacités antiterroristes dans les grandes villes, mais nous n'avons pas besoin d'aide extérieure pour sécuriser les organes de la République. Seulement les équiper et les former.

Peut-être qu'à Bamako les gens ne comprennent pas que la longueur de la piste d'atterrissage est supérieure à celle de Mopti et qu'elle peut donc accueillir certains aéronefs et certaines personnes en transit.

On a pourtant parlé d'établir le quartier général (QG) de la force à Bamako.

Un QG peut être n'importe où maintenant, compte tenu de la modularité des équipements de transmission. Bamako est une ville de 3 millions de personnes. Moi, si j'étais suis un tacticien militaire, et que je me battais contre un ennemi sophistiqué, je ne mettrais pas mon QG dans un endroit très peuplé. Aujourd'hui, on peut installer des QG n'importe où. Pourquoi pas à N'Djamena ? Il faut attendre que les experts, que tout ceux qui veulent nous aider se mettent ensemble, ce sont eux qui viendront avec une stratégie. Alors on verra. On met en avant la question de la stratégie avant même de connaître les moyens dont nous disposerons, quels pays nous aideront pour la reconquête.

L'aéroport de Bamako pourrait-il être militarisé ?

On est d'accord avec tout ce qu'exigera la stratégie commune. Mais les villes concernées telles que Tombouctou et Gao sont plus proches de Ouagadougou ou de Niamey que de Bamako. On prendra notre part mais vous verrez aussi que beaucoup de possibilités s'ouvriront à nous quand les pays intervenants se seront déclarés.

Tout cela va prendre un temps fou ?

Pas nécessairement. Une fois votée la résolution, en une semaine, tous ceux qui voudront intervenir pourront être connus. Leurs moyens, leurs ressources, leurs experts, le terrain sont connus. Je suis sûr que la surveillance satellitaire des bandits est en cours. Ca peut aller très, très vite. Le plus important, c'est la capacité des forces en attente de la Cédéao à envoyer quelques hommes pour renforcer nos lignes et ne pas ajouter une complexité à la résolution du problème. Si on tient cette ligne de séparation, les choses pourront aller vite.

Vous voulez que l'armée malienne soit en première ligne, est-elle capable d'assumer ce rôle ?

Depuis le début de la transition, l'armée se ressoude et renforce sa chaine de commandement. Elle a besoin d'être équipée et formée mais il existe déjà un noyau très compétent.

Qu'attendez vous de la part de la France ?

J'ai été vraiment très, très frappé et ému par le leadership que le ministre français des affaires étrangères, Laurent Fabius, et le président François Hollande ont mis en œuvre à New York. Cela ne me surprend pas au regard des relations anciennes entre nos deux pays. Mais ça a été un moment fort quand j'ai vu la France, membre permanent du conseil de sécurité, intervenir avec autant de détermination et de clarté. Je suis sorti en me disant " c'est le début de la fin pour la crise au Mali ".

Qu'entendez-vous par leadership ?

C'est-à-dire faire voir aux autres la nécessité de s'attaquer au problème à un moment où d'autres n'en sont pas encore conscients. Parce que problème est trop éloigné. La piste de Tessalit est une de plus longues du Mali. De là on est à 2 h 30 de l'Europe ! Le Niger, le Burkina Faso, la Côte d'Ivoire sont menacé de façons immédiates. La Chine, la Russie, l'Amérique sont plus éloignés. Mais ceux qui sont capables de voir les ramifications et d'attirer l'attention des autres, ça c'est une forme de leadership.

Un autre aspect est de s'impliquer pour qu'aux Nations unies le problème soit visible. Puis une fois que toute la communauté se sera décidée d'agir, il faut que la France fasse le premier pas. Aujourd'hui nous sommes dans la première phase de sécurisation des villes. C'est une phase pendant laquelle la France peut nous aider. Nous avons besoin de tous les équipements modernes pour détecter les bombes, les armes à feu, besoin d'équipements de communication. On peut attendre ça de la France. Et puis, une fois que la communauté internationale sera convaincue de la nécessité d'agir, il faudra que la France fasse le premier pas. Le jour où la force internationale s'engagera, quand on aura besoin d'utiliser la troisième dimension, les Mirage français pourraient s'engager. Si la France le veut, ses forces spéciales pourront aussi se joindre à nos forces armées. Tout est ouvert.

Mais déjà, le fait d'avoir pris l'initiative d'expliquer au monde la nature globale du danger que nous courrons, c'est la preuve d'un leadership très fort. Parce que j'ai l'impression que beaucoup ne sont pas conscients de ce qui nous guette. Les gens pensent que le danger arrivera dans deux ou trois ans et que d'ici là, le danger pourra être contenu dans une zone du Sahel, sans déborder... C'est une erreur. Le danger est beaucoup plus imminent et immédiat.

Ne craignez-vous pas que la question des otages français ne paralyse l'action de Paris ?

C'est un problème très important, pour nous également. Nous sommes en train de chercher des informations. Mais justement, le leadership d'une nation se mesure aussi à sa capacité de ne pas se faire prendre tout en entier en otage. Sans oublier ses otages, la République française est en train d'assumer son rôle de leader mondial. D'autres Etats se seraient recroquevillés, AQMI [Al-Qaida au Maghreb islamique] aurait dicté sa politique étrangère. Le fait que le président Hollande ait rejeté cela est remarquable et applaudi partout dans le monde. La communauté internationale devrait faire tout ce qu'elle peut pour aider la France à libérer ses otages.
Christophe Châtelot (propos recueillis par)

Malijet - ATT victime d’un complot international ?

Malijet - ATT victime d’un complot international ?
«ATT a en quelque sorte payé son entêtement à vouloir maintenir la date de l’élection présidentielle à laquelle il n’était d’ailleurs pas candidat. » C’est du moins ce que témoigne à travers les colonnes d’un hebdomadaire français Dimitri Brelière , un ancien conseiller au palais de Koulouba de 2002 à 2011. Car derrière le coup d’Etat du 22mars qui l’a évincé il y’a dit-il un homme, Oumar Mariko.

Cet opposant à ATT s’était lui prononcé pour un report de l’élection, parce qu’il estimait qu’elle ne pouvait avoir lieu tant que le conflit perdurait au Nord mais certainement aussi parce qu’il savait qu’il n’avait aucune chance de remporter ce scrutin .Par l’intermédiaire d’un réseau de radios privées qu’il contrôle et que beaucoup au mali ont surnommées ironiquement « radios mille collines » en référence au Rwanda et en passant son temps auprès des militaires du rang de la caserne de Kati, il a su instrumentaliser les revers subis par l’armée malienne au Nord pour distiller un sentiment de haine contre le régime d’ATT auprès d’une partie de la population et des soldats .Sa propagande a si bien fonction our que cela conduise à une mutinerie qui elle-même s’est transformée en véritable coup d’Etat. Mariko a été le premier à air le putsch.

ATT est soupçonné d’avoir noué un pacte tacite avec Aqmi. Cela faisait –il partie de  ses erreurs ?

Sur ce sujet comme sur d’autres, des erreurs ont certainement été  commises .mais c’est une accusation injuste.ATT a fait ce qu’il a pu avec les moyens dont il disposait .combattre frontalement les terroristes. Mais pouvait-il le faire ? Les offensives qu’il a lancées contre Aqmi ont fait de nombreux morts parmi les soldats .Pour  combattre dans cette immensité désertique, il aurait eu besoin de moyens aériens, ou au moins d’un accès aux bases aériennes proches des frontières du Nord Mali pour ravitailler ses hélicoptères, ce qu’il n’a pas obtenu.

Pourquoi n’êtes- vous pas favorable à une solution négociée

Parce que je ne crois pas en ces chances de succès .Combien de fois ont-ils négocié ?les deux grandes vagues de rébellion touaregs ont débouché sur des accords en 91 -92 et en 2006 d’ailleurs sous  l’égide de l’Algérie .On en voit aujourd’hui le résultat .Maintenant  que les rebelles touaregs se sont considérablnt on irait discuter avec les terroristes ? L’Algérie n’a jamais voulu entendre parler de négociations avec les islamistes  radicaux .Pourquoi cette volte-face ?C’est incompréhensible moins qu’elle ne soit dictée par sa crainte de voir des troupes étrangères s’installer dans sa zone d’influence et des groupes armés au Nord du Mali se replier chez elle.

Même s’il reconnait que la gestion de la crise au Nord par ATT n’est cependant pas exempte de reproches, le conseiller français  pense plutôt à travers ces explications que son ancien employeur a surtout  été victime d’un incompréhensible  complot international.

Les rebellions touarègues à répétition, narcotrafic à grande échelle, prises d’otages et conséquences de l’intervention en Libye, entrée en masse d’armes dans le Sahel et retour des touaregs enrôlés dans l’armée de kadhafi. Comment voulez-vous que l’un des pays les plus pauvres du monde puisse faire face à une telle succession d’événements ? . Ce n’est que la veille du coup d’Etat à l’occasion d’un sommet de crise que se tenait justement à Bamako, que la communauté internationale a vraiment pris conscience du danger et parlé d’un soutien notamment sur la plan logistique. Jusque-là qui a vraiment aidé le Mali ? Il y’a eu une coopération militaire avec la France et les Etats-Unis notamment mais limitée .ATT  a aussi appelé sans relâche à une véritable coordination avec la Mauritanie , le Niger et l’Algérie .Celle-ci n’a vu le jour qu’en 2010 avec la création d’un comité d’état-major opérationnel conjoint qui n’a encore donné lieu à aucune opération commune.les seules interventions dans le Nord Mali ont été conduites dans le cadre de droits de poursuite par le Niger et la Mauritanie. En fait, la coopération s’est heurtée à des divergences sur le dossier .Le Niger La Mauritanie elle s’appuyait plutôt  sur le MNLA pour combattre Aqmi, tandis que l’Algérie toujours ambigüe n’a en fait jamais montré une volonté r les choses. Elle a ainsi tout fait pour que le sommet que nous réclamions sur la crise au Nord n’ait pas lieu.

Je ne dis cependant pas que nous n’avons pas commis des erreurs .Il a pu y avoir des insuffisances L’armée a notamment manqué de moyens. Malgré les dotations d’armement que l’on a fait ces dix dernières années qui permete de rester l’une des mieux dotées d’Afrique de l’Ouest—et des livraisons aéroportées étaient d’ailleurs en cours au moment du coup d’Etat—cela n’a pas suffi pour combattre cette agression exceptionnelle due , je le répète à  l’arrivée massive ces derniers mois d’armes lourdes de Libye et je peux comprendre le mécontentement  des militaires .

Fakoly Doumbia

Source: Le Phenix

Malijet - ATT victime d’un complot international ?

Malijet - ATT victime d’un complot international ?
«ATT a en quelque sorte payé son entêtement à vouloir maintenir la date de l’élection présidentielle à laquelle il n’était d’ailleurs pas candidat. » C’est du moins ce que témoigne à travers les colonnes d’un hebdomadaire français Dimitri Brelière , un ancien conseiller au palais de Koulouba de 2002 à 2011. Car derrière le coup d’Etat du 22mars qui l’a évincé il y’a dit-il un homme, Oumar Mariko.

Cet opposant à ATT s’était lui prononcé pour un report de l’élection, parce qu’il estimait qu’elle ne pouvait avoir lieu tant que le conflit perdurait au Nord mais certainement aussi parce qu’il savait qu’il n’avait aucune chance de remporter ce scrutin .Par l’intermédiaire d’un réseau de radios privées qu’il contrôle et que beaucoup au mali ont surnommées ironiquement « radios mille collines » en référence au Rwanda et en passant son temps auprès des militaires du rang de la caserne de Kati, il a su instrumentaliser les revers subis par l’armée malienne au Nord pour distiller un sentiment de haine contre le régime d’ATT auprès d’une partie de la population et des soldats .Sa propagande a si bien fonction our que cela conduise à une mutinerie qui elle-même s’est transformée en véritable coup d’Etat. Mariko a été le premier à air le putsch.

ATT est soupçonné d’avoir noué un pacte tacite avec Aqmi. Cela faisait –il partie de  ses erreurs ?

Sur ce sujet comme sur d’autres, des erreurs ont certainement été  commises .mais c’est une accusation injuste.ATT a fait ce qu’il a pu avec les moyens dont il disposait .combattre frontalement les terroristes. Mais pouvait-il le faire ? Les offensives qu’il a lancées contre Aqmi ont fait de nombreux morts parmi les soldats .Pour  combattre dans cette immensité désertique, il aurait eu besoin de moyens aériens, ou au moins d’un accès aux bases aériennes proches des frontières du Nord Mali pour ravitailler ses hélicoptères, ce qu’il n’a pas obtenu.

Pourquoi n’êtes- vous pas favorable à une solution négociée

Parce que je ne crois pas en ces chances de succès .Combien de fois ont-ils négocié ?les deux grandes vagues de rébellion touaregs ont débouché sur des accords en 91 -92 et en 2006 d’ailleurs sous  l’égide de l’Algérie .On en voit aujourd’hui le résultat .Maintenant  que les rebelles touaregs se sont considérablnt on irait discuter avec les terroristes ? L’Algérie n’a jamais voulu entendre parler de négociations avec les islamistes  radicaux .Pourquoi cette volte-face ?C’est incompréhensible moins qu’elle ne soit dictée par sa crainte de voir des troupes étrangères s’installer dans sa zone d’influence et des groupes armés au Nord du Mali se replier chez elle.

Même s’il reconnait que la gestion de la crise au Nord par ATT n’est cependant pas exempte de reproches, le conseiller français  pense plutôt à travers ces explications que son ancien employeur a surtout  été victime d’un incompréhensible  complot international.

Les rebellions touarègues à répétition, narcotrafic à grande échelle, prises d’otages et conséquences de l’intervention en Libye, entrée en masse d’armes dans le Sahel et retour des touaregs enrôlés dans l’armée de kadhafi. Comment voulez-vous que l’un des pays les plus pauvres du monde puisse faire face à une telle succession d’événements ? . Ce n’est que la veille du coup d’Etat à l’occasion d’un sommet de crise que se tenait justement à Bamako, que la communauté internationale a vraiment pris conscience du danger et parlé d’un soutien notamment sur la plan logistique. Jusque-là qui a vraiment aidé le Mali ? Il y’a eu une coopération militaire avec la France et les Etats-Unis notamment mais limitée .ATT  a aussi appelé sans relâche à une véritable coordination avec la Mauritanie , le Niger et l’Algérie .Celle-ci n’a vu le jour qu’en 2010 avec la création d’un comité d’état-major opérationnel conjoint qui n’a encore donné lieu à aucune opération commune.les seules interventions dans le Nord Mali ont été conduites dans le cadre de droits de poursuite par le Niger et la Mauritanie. En fait, la coopération s’est heurtée à des divergences sur le dossier .Le Niger La Mauritanie elle s’appuyait plutôt  sur le MNLA pour combattre Aqmi, tandis que l’Algérie toujours ambigüe n’a en fait jamais montré une volonté r les choses. Elle a ainsi tout fait pour que le sommet que nous réclamions sur la crise au Nord n’ait pas lieu.

Je ne dis cependant pas que nous n’avons pas commis des erreurs .Il a pu y avoir des insuffisances L’armée a notamment manqué de moyens. Malgré les dotations d’armement que l’on a fait ces dix dernières années qui permete de rester l’une des mieux dotées d’Afrique de l’Ouest—et des livraisons aéroportées étaient d’ailleurs en cours au moment du coup d’Etat—cela n’a pas suffi pour combattre cette agression exceptionnelle due , je le répète à  l’arrivée massive ces derniers mois d’armes lourdes de Libye et je peux comprendre le mécontentement  des militaires .

Fakoly Doumbia

Source: Le Phenix

Mali. Quelle est la nouvelle donne régionale et internationale ? - Information - France Culture

Mali. Quelle est la nouvelle donne régionale et internationale ? - Information - France Culture
La situation au Mali est une conséquence  directe du coup d’Etat avorté du capitaine Sanogo en mars dernier, lequel voulait rétablir l’unité du pays en aboutissant à l’exact contraire (l’arroseur arrosé). Mais, c’est aussi un effet induit de l’éventrement par son sud de la Libye, au terme de l’intervention militaire occidentale qui avait amené les Etats intervenant à violer le mandat de l’ONU.

Quoi qu’il en soit, les rebelles sont divisés, leurs programmes sont radicalement différents (imposition de la charia dans tout le pays pour les islamistes, indépendance du Nord pour les touaregs), tandis que la violence des djihadistes contre la population civile (dénoncée par Human Rights Watch) les fait ressembler à des talibans. 

Aujourd’hui, la situation est-elle différente de celle prévalant cet été ? Le Mali vient de demander à l’ONU la mise en œuvre d’une force internationale pour récupérer son Nord. Mais : 1) quels en seraient les buts précis ?, et 2) la CEDEAO (organisation régionale ouest-africaine) n’en a pas les moyens, même si Paris a prévu une aide logistique (six otages français sont dans la sous-région). 
Michel Raimbaud, ambassadeur

EXCLUSIF AFP - A l'hôpital de Gao, cinq jeunes Maliens amputés sous la garde de djihadistes - Le Nouvel Observateur

EXCLUSIF AFP - A l'hôpital de Gao, cinq jeunes Maliens amputés sous la garde de djihadistes - Le Nouvel Observateur
Devant une chambre de l'hôpital de la ville de Gao, dans le nord-est du Mali, deux djihadistes armés montent la garde. A l'intérieur, cinq hommes amputés d'une main et d'un pied au nom de la charia vivent prostrés, sans savoir quand les islamistes leur permettront de sortir.
(c) Afp
Devant une chambre de l'hôpital de la ville de Gao, dans le nord-est du Mali, deux djihadistes armés montent la garde. A l'intérieur, cinq hommes amputés d'une main et d'un pied au nom de la charia vivent prostrés, sans savoir quand les islamistes leur permettront de sortir. (c) Afp

Devant une chambre de l'hôpital de la ville de Gao, dans le nord-est du Mali, deux djihadistes armés montent la garde. A l'intérieur, cinq hommes amputés d'une main et d'un pied au nom de la charia vivent prostrés, sans savoir quand les islamistes leur permettront de sortir.

Des bandages protègent leurs membres amputés. Une lumière blafarde éclaire la pièce.

"Moi je reconnais avoir attaqué un car de voyageurs", dit Ardo (les prénoms ont été modifiés, ndlr) à un journaliste de l'AFP qui a pu, discrètement, s'introduire dans la chambre. "Mais ce n'est pas pour ça qu'on devait me couper une main et un pied".

Une bande de coupeurs de route, composée de quatre Peuls et d'un Touareg, avait attaqué le mois dernier un autobus sur l'axe qui relie Gao à la frontière nigérienne. Les passagers avaient été dépouillés d'une forte somme d'argent.

Quelques jours plus tard, l'équipe de sécurité des djihadistes de Gao arrêtaient des jeunes accusés du braquage. Puis, imposant leur interprétation de la charia (loi islamique), ils programmaient les cinq amputations publiques.

Le jour de l'application de la sentence, le 10 septembre, "j'ai eu tellement mal que je voulais me tuer moi-même", explique Yoro, dont les propos en langue peule sont traduits par un habitant de Gao. "Comment on peut couper une main comme ça? Ma nouvelle vie, c'est aujourd'hui à l'hôpital. C'est triste pour moi", dit-il, âgé comme les autres d'environ 18 ans.

Un de ses voisins de chambre assure, lui, n'avoir "rien senti" quand on lui a coupé main et pied avec un couteau. "On m'a donné des comprimés à prendre avant. Je n'ai rien senti. C'est sûr que j'ai été drogué", dit-il, emmitouflé dans un boubou, sans pantalon, montrant son moignon.

Les djihadistes leur assurent deux repas par jour mais ne les autorisent pas, "pour le moment", à quitter l'hôpital.

Un des amputés confie: "Je m'appelle Cheikh. J'ai accompagné les autres qui ont volé. Mais je n'avais pas d'arme. Et je ne savais pas qu'on allait me couper une main et un pied". Sur une petite table à son chevet, des comprimés d'aspirine pour calmer des céphalées.

"ma vie est terminée"

Les lits sont vétustes, les matelas sans drap, les soins rudimentaires. Et les cinq garçons semblent plus en résidence surveillée que dans une chambre d'hopitalisation.

"C'est fini, je n'aurai plus jamais du travail", dit l'un. Un autre: "je serai obligé de me cacher pour vivre", "ma vie est terminée comme ça".

"Ils récupèrent quand même plutôt bien", commente le docteur Moulaye Djité, médecin à l'hôpital de Gao. "Pour le moment on ne peut pas dire qu'ils souffrent. Il n'y a pas d'infection, il n'y a rien. Je pense que ça va", ajoute-t-il.

Plutôt intimidé par la présence de djihadistes armés dans l'enceinte même de l'hôpital, le médecin n'en dit pas beaucoup plus: "Il y a une situation de fait, ici, que vous connaissez bien... Nous, notre rôle est de soigner les malades. C'est ce que nous faisons. Avec les moyens du bord".

L'orthopédiste est absent et il n'y a pas de matériel pour envisager la rééducation des cinq jeunes. Pour leur permettre de se déplacer, des béquilles en bois ont été confectionnées, mais aucun d'entre eux ne peut encore s'en servir.

Dans la foulée du coup d'Etat militaire du 22 mars à Bamako, les trois régions administratives du nord du Mali sont tombées aux mains des groupes islamistes radicaux Ansar Dine et Mujao, alliés de la branche maghrébine d'Al-Qaïda. Ils y appliquent leur interprétation de la charia qu'ils entendent imposer à tout le Mali.

Leur première amputation publique avait eu lieu en août à Ansongo (90 km au sud-est de Gao). L'homme mutilé avait été accusé d'avoir volé du bétail