Dans le Nord du Mali, notre reporter a suivi les soldats du MNLA qui viennent de proclamer l’indépendance de l’azawad. Profitant du chaos provoqué par le coup d’état militaire.
Précipité par un coup d’État militaire dans une confusion qui présage le pire, le Mali se retrouve coupé en deux. Les rebelles touareg du MNLA viennent en effet de proclamer l’indépendance du
Nord. Et le pays, coupé du monde depuis le putsch du 22 mars, doit faire face à la pénurie et à la famine d’une part – les stocks de nourriture n’excèdent pas quelques jours. D’autre part, il doit compter sur le danger des milices islamistes, affiliées à al-Qaida, qui veulent imposer la charia sur tout le territoire.
Le 22 mars, à Bamako, la capitale, un obscur Comité national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l’État (CNRDRE), dirigé par le capitaine Sanogo, dépose, presque sans aucune violence, le président Amadou Toumani Touré (ATT). Des élections présidentielles sont pourtant prévues pour le 29 avril 2012, et le chef de l’État avait déjà indiqué qu’il ne se représenterait pas. Outre sa volonté de « redresser la démocratie » (sic), le CNRDRE justifie aussi son coup de force par la « nécessité d’un sursaut national face à la rébellion du Nord ».
L’ancien Soudan français, indépendant depuis 1960, est coupé en deux depuis son origine : populations arabo-berbères au nord, subsahariennes au sud. Dès 1963, une révolte des Touareg du Nord ébranle le jeune Mali. Entre 1990 et 1995, les « hommes bleus » du Mali et du Niger unissent leurs forces pour défier les pouvoirs centraux. Organisés en armées de libération nationale, les Touareg (10 % des 15 millions de Maliens) revendiquent l’indépendance des immensités arides qu’ils parcourent, de point d’eau en point d’eau, depuis des millénaires. Souvent méprisés, maltraités par l’administration centrale, ces hommes du désert réclament depuis longtemps la reconnaissance de leur culture, l’enseignement de leur langue (le tamacheq) et une représentativité politique, souvent promise mais jamais effective.
À la fin des années quatre-vingt-dix, lorsque l’Algérie entrevoit la fin de la « sale guerre », les islamistes du Groupe salafiste pour la prédication et le combat – l’ancêtre d’Aqmi, al-Qaida au Maghreb islamique – se dispersent dans une vaste zone à cheval sur l’Algérie, le Niger et le Mali. Ils y rencontrent ces populations touareg, abandonnées. Très vite, Aqmi devient le premier employeur de la région. Sans trop regarder ce qu’ils transportent, les hommes bleus acheminent clandestinement, à travers un désert dont ils connaissent chaque dune, des marchandises et du matériel. Alliance de circonstance : Aqmi est riche et paie bien, la rébellion touareg a besoin d’argent pour s’équiper. Aqmi poursuit un dessein idéologique (la « guerre sainte ») ; le MNLA, le Mouvement national de libération de l’Azawad – tout le Nord du Mali – , un objectif politique (l’indépendance). Aqmi enlève des ressortissants étrangers, le MNLA organise les caravanes de contrebande. Chacun son boulot, chacun sa spécialité.
Lire l'article intégral dans VSD n°1807 (du 12 au 18 avril 2012)
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