jeudi 19 avril 2012

Crise au Mali : une histoire touarègue « LeCourant.info, en prise directe avec l'info

Crise au Mali : une histoire touarègue « LeCourant.info, en prise directe avec l'info
Daphné Cagnard 19 avril 2012 à 12:52

Histoire- La crise multiforme qui frappe aujourd’hui le Mali est en partie causée par des années de rébellions touarègues. Retour sur l’histoire d’un peuple en révolte.
Les rébellions touarègues ne datent pas d’aujourd’hui : la première, en 1962, suit de peu la décolonisation du Mali. Ses principales causes découlent du découpage des États, qui ne correspond pas à leur territoire : la population touarègue s’est retrouvée disséminée entre cinq États.
Les « hommes bleus », déçus et rejetés par le nouveau gouvernement post-colonial, demandaient l’établissement d’un État indépendant dans le nord du Mali. La dure répression et les années de sécheresse qui suivirent eurent pour un temps raison de leur visée indépendantiste.

Les « chevaliers du désert » face aux autorités maliennes

La seconde rébellion touarègue débuta en 1990, et faisait écho à un
long passé de dénigrement des peuples nomades et pratiquant l’élevage par rapport aux sédentaires tournés vers l’agriculture, et à une représentation politique des touaregs extrêmement faible. La méfiance des autorités nigériennes et maliennes vis à vis des touaregs s’accentua en raison de l’embrigadement d’une part d’entre eux dans la légion islamique libyenne, et donna lieu à une série d’arrestations.
Le coup d’envoi de la rébellion de 1990 fut provoqué par la prise d’assaut par des jeunes touaregs d’une gendarmerie au Niger, suivie d’une sévère répression. Les touaregs du Mali embrayèrent de suite sur un soulèvement dans leur pays. Les accords de Tamanrasset de janvier 1991, censés entraîner la démilitarisation de la région Nord-Mali, ne mirent pas fin aux hostilités. C’est seulement cinq ans plus tard que la paix revint au Mali, symbolisée par la cérémonie de la « flamme de la Paix de Tombouctou », durant laquelle 3000 armes furent brûlées pour symboliser l’union des maliens.
Le soulèvement touareg de 2006, se manifestant par l’attaque de garnisons du Nord-Mali par « l’Alliance démocratique pour le changement du 23 mai » (ADC), se solda par les accords bilatéraux d’Alger, signés en juillet 2006. Ceux-ci rappelaient l’intégrité territoriale du Mali, et prévoyaient l’insertion des touaregs dans la société, et des mesures spécifiques aux peuples nomades. Peu respectés, ces accords ne firent que provoquer l’indignation des « chevaliers du désert », qui reprirent les armes jusqu’au cessez-le-feu de 2009.

La crise de 2012


Face à l’échec des accords d’Alger, deux mouvement touaregs se regroupèrent fin octobre 2011 : le Mouvement national de l’Azawad (MNA) et le Mouvement touareg du Nord-Mali ( MTNM). Cette alliance est à l’origine du Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA), revendiquant l’autodétermination des régions de Gao, Kidal et Tombouctou. La situation en Libye eut par ailleurs de nombreuses incidences : plusieurs groupes de touaregs ayant fui le Mali dans les années 1990 pour s’enrôler dans l’armée de Mouammar Kadhafi se joignirent au mouvement, avec une cargaison d’armes, à la suite de la chute du régime libyen. Début 2012, les combattants du MNLA attaquèrent plusieurs bases militaires dans le Nord-Mali, prirent en otage des soldats et commirent de multiples exactions.
L’armée malienne, dans la nuit du 21 au 22 mars 2012, procéda à un coup d’état militaire, critiquant, selon les mots du lieutenant Amadou Konaré, « l’incapacité du gouvernement à donner aux forces armées les moyens nécessaires de défendre l’intégrité [du] territoire national ». Mais les militaires putschistes ne parvinrent pas à imposer leurs positions, et les rebelles touaregs prirent peu à peu les villes du Nord.
Le MNLA s’est allié pour un temps aux combattant d’Ançar Dine (« défenseur de la foi »), mouvement islamique demandant l’instauration de la charia, la loi islamique. À ces deux groupes s’ajoutent le Mouvement pour l’unicité et le Jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao), et Al Qaida au Maghreb islamique (AQMI), deux armées terroristes présentes dans les trois grandes villes du Nord.
Le 6 avril, le MNLA a déclaré unilatéralement l’indépendance de l’Azawad. Mais les divergences de revendications entre les différentes forces présentes au Nord-Mali, et le rejet catégorique des autorités maliennes et des instances de la communauté internationale ne laissent pas envisager une sortie de crise pacifique.
Daphné Cagnard
Photos : Wiki Commons / Licence CC

Aucun commentaire: