Sort de Kidal : Ce que la France mijote vraiment - maliweb.net
Les Maliens ne comprennent pas pourquoi la France, après avoir reconquis à la vitesse de l’éclair, les autres régions, freine des quatre fers à Kidal. Ni pourquoi des tractations sont en cours avec des bandits du MNLA et du MIA. Eclairages.
Après avoir libéré ensemble Konna, Douentza, Diabali, Gao et Tombouctou, les forces franco-maliennes se sont soudain séparées. C’est, en effet, l’armée française seule qui a pris nuitamment l’aéroport de Kidal, accompagnée (ou rejointe) par des éléments tchadiens et nigériens. L’étonnement des Maliens allait crescendo au fur et à mesure que des bribes informations filtraient. On apprend ainsi qu’à Kidal campent des éléments du mouvement indépendantiste MNLA et des responsables du Mouvement islamique de l’Azawad (MIA), groupe dissident d’Ansar Dine, l’organisation islamiste d’Iyad Ag Ghali. Dans la foulée, François Hollande « appelle le gouvernement malien à engager des discussions politiques avec la communauté touarègue »; Dioncounda Traoré, lui faisant écho, annonce que le Mali est prêt à discuter avec les Touaregs qui ne remettent pas en cause la laïcité et l’intégrité territoriale du Mali…
Tout cela sent un peu l’entente au sommet même si à Koulouba, on jure, la main sur le coeur, n’avoir pas été informé de l’attitude adoptée par les Français à Kidal. Il faut savoir, en fait, que la France, après la phase de reconquête militaire du nord du Mali, entame son second objectif: la lutte contre le terrorisme. Pour la mener à bien, elle développe une stratégie axée sur trois points majeurs:
- convaincue que les combattants du MNLA et du MIA savent où se cachent les terroristes d’AQMI, du MUJAO, d’Ansar Dine et de Boko Haram, la France entend les mettre à contribution pour débusquer les bandits et les éliminer;
- en contrepartie, le MIA et le MNLA entreront dans le cadre d’un règlement global de la question touarègue qui bénéficiera à tous ceux qui ne seraient pas recherchés par la Cour pénale internationale;
- Kidal et les autres régions du nord pourraient bénéficier, à terme, d’un statut d’autonomie avancé, de moyens de développement fournis par l’occident et, surtout, d’une force d’interposition permanente de l’ONU chargée de protéger la minorité touarègue et d’empêcher toute nouvelle infiltration jihadiste au nord.
Ces plans tomberaient à l’eau si l’armée malienne était autorisée, dès à présent, à marcher sur Kidal. En effet, aujourd’hui, seule une petite centaine de combattants du MNLA et du MIA s’y trouvent avec, pour tous moyens, une dizaine de 4X4 et des armes individuelles. L’armée malienne n’en ferait qu’une bouchée et cela, la France s’y refuse. De plus, le pays de Hollande veut récupérer ses 7 otages dont tout laisse croire qu’ils ont été emmenés dans les grottes du Tighergar, massif montagneux qui s’enfonce en territoire algérien et dont les touaregs connaissent les coins et recoins. Un officier malien nous confie qu’après la prise de Kidal par Ansar Dine, début 2012, ce mouvement et ses acolytes ont utilisé les engins de terrassement abandonnés par la société Satom pour creusert dans la montagne, aménager des abris, des caches d’armes et des dépôts de carburant. On estime que 3000 jihadistes rescapés de Konna ont trouvé refuge dans le massif montagneux survolé nuit et jour par des avions de reconnaissance et des drones tueurs. Pour mettre la main sur les fuyards et éradiquer leur nid au sahel, la France a obtenu la collaboration de l’Algérie. Celle-ci, déçue qu’Iyad Ag Ghali ait rompu sa promesse de ne pas attaquer le sud du Mali, et ulcérée que sa centrale gazière d’In-Amenas soit attaquée par des hommes d’AQMI fidèles à Belmokhtar, a fermé hermétiquement ses frontières et surveille les issues du Tighergar qui donnent sur le territoire algérien. Les terroristes se trouvent donc coincés comme des rats. La France se donne 6 mois pour les aggripper. Elle pourrait même, selon une source, utiliser à cet effet des bombes asphyxiantes.
François Hollande pourra-t-il forcer le Mali et ses ennemis rebelles à trouver un accord politique ? Voilà la question à mille sous. L’opinion malienne demeure rudement remontée contre le MNLA sans lequel les jihadistes n’auraient pas pu pénétrer au Mali. Pour avoir combattu l’armée malienne ensemble, le MNLA et les jihadistes ne font d’ailleurs qu’un aux yeux des Maliens. Si compromis il y a, il exclura, en tout cas, toute intégration des éléments du MNLA et du MIA dans l’armée et les corps paramilitaires. Mais il y aura compromis, n’en doutez pas. De fait, la France a une dette envers le MNLA, qu’elle a contribué à créer pour lutter contre AQMI, et des devoirs envers la communauté internationale qui n’accepterait ni un génocide touareg ni une atteinte à l’intégrité territoriale du Mali. En explorant les différentes pistes, la France ne manquera pas de fenêtre de tir. Elle a l’avantage de pouvoir elle-même, et à ses frais, se charger de la sécurité et du développement au nord du Mali. Elle a aussi l’avantage que les Maliens ne peuvent lui refuser grand-chose pour l’avoir vue combattre pour leur survie.Enfin, comptant sur elle pour garantir de bonnes élections et restaurer le pouvoir civil, la classe politique malienne lui mangera toujours dans la main.
En somme, les seuls qui ne trouveront pas leur compte dans ces tractations ni dans un compromis, c’est Oumar Mariko et les fameuses forces dites du changempent: sachant que de bonnes élections et le retour de la démocratie signifient leur retour à à la diète, ils vont prendre tambour et trompette pour dénoncer « la trahison du Mali par l’Occident avec la complicité de Dioncounda et autres ». Les écoutera-t-on ?
Tiékorobani
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