SEM| • Mis à jour lePar Amandine Gnanguênon, docteur en sciences politiques, chargée d'études à l'IRSEM
Le Mali est entrée dans une spirale infernale en 2012 : défaite de l'armée malienne en janvier, renversement du président Amani Toumani Touré (ATT) en mars, proclamation de l'indépendance de l'Azawad par le mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA) en avril. Alors que le choix des solutions diplomatiques tend à être relégué au second plan pour envisager une option armée, comment une intervention militaire peut-elle s'inscrire dans le cadre du règlement politique et global de la crise malienne ?
UN CONFLIT SUR PLUSIEURS ÉCHELLES DE TEMPS
La question de l'intervention militaire doit nécessairement prendre en compte le fait qu'il est urgent d'intervenir au Nord Mali pour créer les conditions nécessaires d'un retour au dialogue politique national. L'intervention militaire semble donc être une solution sur le court terme qui aurait pour principal objectif de déloger AQMI et les différents groupes criminels du Nord Mali. Derrière le terme "intervention", il s'agit bien d'éliminer les groupes armés terroristes qui menacent les populations. La sanctuarisation du Nord Mali par ces groupes est une menace non seulement pour les pays frontaliers (risques de rapprochement avec d'autres acteurs comme Boko Haram au Nigeria), mais aussi pour les pays sur l'autre versant de la Méditerranée et pour l'ensemble de la Communauté internationale.
Quelle forme d'intervention ? Comme au Libéria dans les années 1990, le Mali est une urgence pour la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO). Rappelons que la CEDEAO est chargée de la mise en œuvre de l'une des composantes régionales de la Force africaine en attente (FAA). Un engagement de la CEDEAO au Mali serait l'occasion d'effectuer un test grandeur nature - la FAA n'est censé être opérationnelle qu'en 2015. L'option de la Mission de la CEDEAO au Mali (MICEMA) tout en s'inscrivant dans un cadre légal (résolution 2071 des Nations unies) pourrait bénéficier du soutien des acteurs déjà impliqués dans le renforcement des capacités des Etats de la région, notamment la France, les Etats-Unis et l'Union européenne (UE). Une telle opération suppose bien entendu au préalable que les pays de la sous-région définissent clairement leurs objectifs et coordonnent leur action avec leurs partenaires.
Au regard des obstacles logistiques, humains et financiers auxquels est déjà confrontée la CEDEAO, un échec de la MICEMA pourrait conduire au choix d'un autre acteur extérieur qui soit à la fois légitime pour les autorités maliennes, capables d'intervenir et ayant intérêt à le faire. Certes, le manque de visibilité toujours inhérent à une telle situation oblige à une certaine retenue. Pour autant, l'intervention militaire ne vise pas à résoudre à elle seule la crise politique malienne au Sud. Elle permet sur un temps court de donner toutes les chances aux autorités maliennes de régler une crise institutionnelle et politique qui, elle, s'inscrit dans le temps long.
AU-DELÀ DE L'INTERVENTION, LA FABRIQUE D'UNE SOCIÉTÉ SUR LE TEMPS LONG
Le conflit malien apparait aujourd'hui comme une juxtaposition du temps militaire (lutter contre les groupes terroristes) et du temps politique (reconstruire un projet et un pacte de société malien). L'enchevêtrement des facteurs d'insécurité politique, économique, social et environnemental concentré sur un même espace a conduit à la tentation de décomposer le temps de l'action et de la solution. Or, l'option militaire est un outil au service du politique. L'avenir du Mali ne dépend pas uniquement de la réussite de l'intervention armée mais des Maliens eux-mêmes. L'enjeu est bel et bien la reconstruction d'un vivre ensemble qui ne pourra pas être imposé de l'extérieur, mais reste pour l'heure à rendre possible, dans un premier temps, par une intervention militaire.
UN CONFLIT SUR PLUSIEURS ÉCHELLES DE TEMPS
Les problèmes que rencontre le Mali et qui se cristallisent depuis 2012 au Nord du territoire s'inscrivent dans des registres temporels différents. La complexité du conflit malien résulte de l'enchevêtrement de problèmes internes structurels et d'éléments conjoncturels. La question de l'intégration politique du Nord et du Sud du vaste territoire malien s'inscrit dans le temps long de l'histoire du pays. La récurrence des revendications touareg dans les années 1960, 1990 et 2000 démontre comment chaque conflit bien qu'ayant sa propre dynamique s'articule au précédent. Sur la problématique touareg se sont greffés des facteurs de conflit plus récents. La chute du régime de Kadhafi fut suivie d'une série d'événements qui ont conduit à l'effondrement de l'édifice politique et sécuritaire malien déjà fragile et à une mobilité des combattants entre la Libye, le Niger et le Mali, avec une intense activité de convoyage d'armes. Al-Qaïda au Maghreb Islamique (AQMI) s'est progressivement implanté dans un environnement caractérisé par de nombreux trafics et la conclusion d'alliances mouvantes entre des groupes armés irréguliers.
L'INTERVENTION MILITAIRE, UNE SOLUTION SUR LE COURT TERMELa question de l'intervention militaire doit nécessairement prendre en compte le fait qu'il est urgent d'intervenir au Nord Mali pour créer les conditions nécessaires d'un retour au dialogue politique national. L'intervention militaire semble donc être une solution sur le court terme qui aurait pour principal objectif de déloger AQMI et les différents groupes criminels du Nord Mali. Derrière le terme "intervention", il s'agit bien d'éliminer les groupes armés terroristes qui menacent les populations. La sanctuarisation du Nord Mali par ces groupes est une menace non seulement pour les pays frontaliers (risques de rapprochement avec d'autres acteurs comme Boko Haram au Nigeria), mais aussi pour les pays sur l'autre versant de la Méditerranée et pour l'ensemble de la Communauté internationale.
Quelle forme d'intervention ? Comme au Libéria dans les années 1990, le Mali est une urgence pour la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO). Rappelons que la CEDEAO est chargée de la mise en œuvre de l'une des composantes régionales de la Force africaine en attente (FAA). Un engagement de la CEDEAO au Mali serait l'occasion d'effectuer un test grandeur nature - la FAA n'est censé être opérationnelle qu'en 2015. L'option de la Mission de la CEDEAO au Mali (MICEMA) tout en s'inscrivant dans un cadre légal (résolution 2071 des Nations unies) pourrait bénéficier du soutien des acteurs déjà impliqués dans le renforcement des capacités des Etats de la région, notamment la France, les Etats-Unis et l'Union européenne (UE). Une telle opération suppose bien entendu au préalable que les pays de la sous-région définissent clairement leurs objectifs et coordonnent leur action avec leurs partenaires.
Au regard des obstacles logistiques, humains et financiers auxquels est déjà confrontée la CEDEAO, un échec de la MICEMA pourrait conduire au choix d'un autre acteur extérieur qui soit à la fois légitime pour les autorités maliennes, capables d'intervenir et ayant intérêt à le faire. Certes, le manque de visibilité toujours inhérent à une telle situation oblige à une certaine retenue. Pour autant, l'intervention militaire ne vise pas à résoudre à elle seule la crise politique malienne au Sud. Elle permet sur un temps court de donner toutes les chances aux autorités maliennes de régler une crise institutionnelle et politique qui, elle, s'inscrit dans le temps long.
AU-DELÀ DE L'INTERVENTION, LA FABRIQUE D'UNE SOCIÉTÉ SUR LE TEMPS LONG
Le conflit malien apparait aujourd'hui comme une juxtaposition du temps militaire (lutter contre les groupes terroristes) et du temps politique (reconstruire un projet et un pacte de société malien). L'enchevêtrement des facteurs d'insécurité politique, économique, social et environnemental concentré sur un même espace a conduit à la tentation de décomposer le temps de l'action et de la solution. Or, l'option militaire est un outil au service du politique. L'avenir du Mali ne dépend pas uniquement de la réussite de l'intervention armée mais des Maliens eux-mêmes. L'enjeu est bel et bien la reconstruction d'un vivre ensemble qui ne pourra pas être imposé de l'extérieur, mais reste pour l'heure à rendre possible, dans un premier temps, par une intervention militaire.
Amandine Gnanguênon, docteur en sciences politiques, chargée d'études à l'IRSEM
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