jeudi 7 février 2013

Rébellion et crise politique : «Petites» leçons et « gros » mensonges - maliweb.net

Rébellion et crise politique : «Petites» leçons et « gros » mensonges - maliweb.net
Plongé au fond du gouffre depuis un certain 22 mars, le Mali a frôlé la catastrophe le 11 janvier dernier. Ce jour, n’eut été la promptitude de l’intervention française, le pays allait sombrer dans l’anarchie. Que de leçons à tirer de cette épreuve !
Aujourd’hui, tout le monde s’accorde sur un fait : le Mali est une terre bénite. Mais, on ne peut compter indéfiniment sur la baraka divine. Alors, le moment venu, les Maliens doivent avoir le courage et l’intelligence de tirer toutes les leçons de ces évènements qui ont mis le pays en péril ces douze mois écoulés.
En effet, de l’agression perpétrée au nord par des bandes de terroristes (associés à des narcotrafiquants) en janvier 2012, aux manœuvres de déstabilisation des organes de la transition, les 10 et 11 janvier derniers, en passant par le renversement du régime démocratiquement élu de Amadou Toumani Touré, en mars 2012, sans oublier la tentative d’assassinat du président de la République par intérim, de nombreux actes ont été posés contre la République. Et le plus souvent, ils l’ont été à Bamako et au nord dans le seul but de défendre et/ou de sauvegarder les intérêts d’un groupe d’individus. Au même moment, la République était menacée et l’intérêt collectif foulé au pied. En somme, la crise politique et sécuritaire a démontré à l’opinion jusqu’où, certains, notamment à Bamako, peuvent aller, lorsqu’il s’agit de s’accrocher à des intérêts personnels.
Autre leçon : de janvier 2012 à maintenant, les Maliens auront compris que le mensonge, la falsification des faits et le dénigrement ont atteint un seuil inquiétant dans notre pays. Avec des conséquences terribles. A certains niveaux, l’on s’est joué des populations, afin d’assouvir des desseins inavoués. L’on a entendu à Bamako, pêle-mêle : «ATT a vendu le nord… . A Aguelhoc, c’est lui qui communiquait avec les rebelles afin de leur indiquer la position de l’armée… ». Et récemment, les mensonges et autres intoxications avaient presque la même tonalité. Mais la cible, elle, était différente. Morceaux choisis : «Les forces étrangères viendront pour tuer un tel… », « La Cedeao bloque «nos » armes pour nous empêcher d’aller au nord…».
Le malheur pour le Mali, c’est que cette intoxication était tellement bien huilée qu’elle passait facilement au sein d’une opinion bamakoise, friande de ragots. Et qui prend pour de l’argent comptant, tout ce qui est diffusé par les radios. De la diffusion de fausses informations, à l’incitation à la haine, en passant par des atteintes à l’intégrité territoriale, tout y passait. A travers des messages haineux, l’on était en train de mettre le feu au pays.
L’Etat brillait par son manque d’autorité. Aucun procureur pour enclencher «l’action publique ». Le bateau Mali chavirait…dans une indifférence collective et coupable.
Autre leçon ? La stabilité du pays a sérieusement été ébranlée, à partir de Bamako. Lorsque les terroristes attaquaient, le 17 janvier 2012, à Bamako, des politiciens (visiblement hostiles à la tenue des élections), avaient leurs propres agendas. Après le coup d’Etat, des opportunistes, n’ont pas attendu longtemps pour se dévoiler. Dans le lot, il y a justement ces politiques pour qui la rébellion était une aubaine. Dans leurs calculs sordides, cette rébellion au nord pouvait leur permettre d’assouvir (à Bamako) des ambitions politiques : Quel sinisme !
De Ménaka à Konna
Les Maliens auront finalement compris beaucoup de choses, surtout après les dernières manifestations politiques organisées à Bamako, alors que Konna était attaquée et que les terroristes projetaient de marcher ver le sud, le 11 janvier 2013. Et si d’aventure les Djihadistes avaient réussi leur coup ? Peut être qu’ils auraient eu beaucoup d’alliés au sein d’une certaine classe politique bamakoise qui n’hésite guère à changer au gré de la direction du vent et surtout en fonction des intérêts de ses principaux leaders. Certains d’entre eux n’étaient-ils pas avec Amadou Toumani Touré, jusqu’au dernier moment ? N’ont-ils pas successivement profité des régimes de Alpha et de ATT ? Et ces cadres militaires qui occupaient des postes de commandement sous ATT? Avaient-ils suffisamment le courage de « dénoncer » la gestion faite de l’armée ? Pourquoi avoir attendu dix longues années pour se rendre compte que l’armée et le Mali étaient mal gérés ? Après le coup de force de mars 2012, il était alors facile d’être aux cotés des héros du moment. Il était surtout de bon aloi de trouver un bouc émissaire idéal. Et qui a suffisamment le dos large pour endosser (seul) la responsabilité de tout ce qui s’est passé ces dix dernières années.
La société malienne va mal
C’est là également une leçon pour chaque Malien et surtout pour ceux là qui auront la chance de se retrouver au pouvoir. Et les Maliens auront également compris que des responsables politiques sont prêts à tout pour accéder au pouvoir. Sinon, comment comprendre toutes ces luttes et autres combines pour faire partir ATT ou avoir la peau de Dioncounda. Qu’on explique aux Maliens, tout ce qui se tramait contre les institutions de la transition au moment où les terroristes faisaient mouvement vers Konna. Faute d’explication, il est alors aisé de croire à cette thèse qui établit une complicité entre certains acteurs de la crise à Bamako et les terroristes.
La plus grande leçon pour le Mali à la sortie de cette crise est celle-ci : il s’avère impérieux de reconstruire « une nouvelle société malienne ». Elle doit être bâtie sur certaines valeurs qui ont fait la grandeur de notre pays. En effet, la crise politique et sécuritaire a apporté la preuve que l’ensemble de notre société se porte mal. La dignité, l’honneur, la bravoure, le patriotisme étaient des valeurs reconnues chez nous. A ce sujet, dans son ouvrage « A travers l’Afrique » et dans le chapitre intitulé « l’honneur des noirs « , le lieutenant colonel Baratier, futur général de l’armée française, écrit : «On sourit fréquemment en France de l’emphase avec laquelle les journaux parlent des combats coloniaux, bien souvent j’ai moi-même haussé les épaules en voyant qualifier de batailles des rencontres où nous avons subi des pertes insignifiantes, où parfois nous n’avions eu que des blessés. Pareille critique ne peut s’adresser au Soudan. On s’y battait et on y mourrait en silence pour éviter d’émouvoir l’opinion et de provoquer un mouvement qui eût entravé l’œuvre dont on ne devait comprendre l’importance que plus tard. Jamais conquête ne fit moins de bruit ; jamais peut-être nous ne nous sommes trouvés en présence d’une résistance plus opiniâtre ; nulle part nous n’avons sacrifié tant de vies….Nous avons eu en face de nous des adversaires héroïques, et j’écris ce mot sans craindre les sourires sceptiques : des hommes qui se défendent jusqu’à la mort sont des héros ; des hommes savent mourir comme les chefs de ces trois villages ont un honneur à la hauteur du nôtre…Le contingent soudanais au sein des tirailleurs sénégalais se sont illustrés vaillamment, plus tard, dans les deux guerres mondiales et dans les expéditions coloniales ». Sans commentaire !
C.H Sylla

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