L’histoire nous enseigne que opportunité du lancement d’un offensive militaire par l’un des belligérants détermine en général l’issue d’une guerre.
Le conflit malien n’échappera pas à cette sage leçon. Ce conflit se caractérise spécifiquement par la volonté de groupes islamistes radicaux tels Ansar Eddhine et MUJAO en liaison avec AQMI, Boko Haram d’imposer la Charia sur l’ensemble de la population vivant sous leur occupation, et les restes du mouvement rebelle sécessionniste MNLA cherchant à se replacer dans le jeu.
A la question de savoir : A qui du pouvoir politique ou du haut commandement militaire reviendra l’opportunité du lancement d’une offensive pour la reconquête des régions occupées ?
D’abord il est prudent rappeler car la conduite des opérations militaires obéit à des principes.
Aussi, sans avoir la prétention de dominer le sujet, je pense utile, en raison de mon profil, d’apporter mon humble vision sur un sujet aussi épineux.
Il s’agira de savoir : Dans quelles conditions et dans quelles mesures les forces armées seraient en mesure de déclencher une offensive avec toutes les garanties de succès ? Paraphrasant Georges Clemenceau cet homme politique français qui disait que « la guerre est une chose trop grave pour être confiée à des militaires « . Cette citation souligne à souhait la nécessité que chacun se cantonnant dans son rôle : les politiciens devraient se cantonner leur rôle de fixation des grandes orientations stratégiques en évitant d’interférer dans l’opérationnel, qui revient aux militaires rien qu’aux militaires. Toute volonté d’ignorer cette séparation stricte pourrait mener inexorablement au pire désastre pouvant remettre en cause l’existence même de l’Etat. Je pense que le haut Commandement militaire saura sagement évaluer de l’opportunité du lancement l’offensive en ayant tenu compte du rapport de force. Cette dernière devrait intervenir à leur calendrier comme l’avait si bien dit en son temps le Général Colin Powell à Saddam Hussein qui voudrait attirer les forces de la coalition dans la mêlée très couteuses en pertes militaire.
Au préalable tenir compte des dommages collatéraux. C’est dire qu’il ne pourrait être fait usage de certains types d’armes : les blindés, l’artillerie lourde, l’artillerie légère, même de grenades et d’explosifs à cause de l’architecture des habitations. Il faudra s’attendre que ces radicaux ne tiendront compte aucun compte du respect du droit international humanitaire. Ainsi il faudra prévoir le recours de boucliers humains et l’emploi d’engins explosifs improvisés. La guerre de la guerre requiert l’observance à des principes, s’en écarter conduit indubitablement à une défaite.
Dans le scénario d’une offensive contre une ville comme Tombouctou, avec des sites inscrits au patrimoine mondial, il serait nécessaire d’aligner un rapport de force supérieur de 5 hommes contre 1 ennemi au minimum. Par exemple il faudra aligner 5000 hommes en estimant qu’Ansar Eddine compterait 1000 combattants à Tombouctou. Il faudra s’attendre à de violents combats de rue débouchant au corps à corps, scenario dont sont hostiles tous les états-majors car très couteux en vies humaines. On donnera raison au Premier Ministre qui a avertit que cette guerre fera des orphelins, et des veufs. C’est pour éviter une plausible défaite que les systèmes chinois ou russe élèvent leur ratio jusqu’à atteindre 6 ou 7 hommes contre 1 ennemi afin d’assurer une victoire totale.
Il est impératif que l’ensemble des maliens accorde une confiance totale à l’armée, à son commandement qui doit jauger sa logistique définie comme tout ce qui permet à une armée de combattre et survivre. Or à entendre le point de vue de cet éminent expert, député de l’Assemblée nationale qui suggéra que: » l’armée malienne doit être en première ligne pour la libération des territoires occupés. Elle doit attaquer sans délai avec les moyens de bord. Les renforts en hommes et en équipements suivront « . Un tel appel donne froid dans le dos, et l’on ne saurait mieux rétorquer que de dire prudence et lui rappeler deux exemples historiques pour démontrer jusqu’ à quel point la logistique constitue le nerf de toute guerre.
- Le premier, il y’a de cela 200 ans l’empereur Napoléon entama sa campagne contre la Russie avec une armée plus de 690 000 hommes. Invaincue jusqu’alors mais avec une logistique 24 jours, en quelques il réussit grâce à son génie de tacticien à ramener à peine 10 000 hommes à Paris.
- Le deuxième fait référence à la guerre du Golfe en aout 1990, les premières forces américaines déployées en Arabie Saoudite les élites la 82e et la 101e divisions, qui furent rejointes par les forces de 34 Etats constituant la coalition ( qui obtint autorisation du Conseil de sécurité à faire usage de la force si le Koweït n’était évacué avant 15 janvier 1991)
Malgré un rapport de force au détriment des irakiens cependant le force coalisée va durant 6 mois se livrer à des exercices et manœuvres. L’offensive aérienne fut lancée 16 janvier 1991, suivie d’une offensive terrestre de 100 heures entrainant une débâche de l’armée irakienne. Pour ce qui concerne les pertes militaires parmi les belligérants majeurs (100 000 irakiens morts selon l’estimation de la coalition 20 000 selon les irakiens, les Etats-Unis 148 morts, Royaume Uni (6 morts), Arabie Saoudite (18 morts) la France (3 morts).
Ne conviendrait- il pas que les Députés de l’Assemblée Nationale en premier lieu chaque membre de la Commission de Défense et de la Sécurité Intérieure soient assisté d’un officier supérieur comme conseiller militaire, expert des questions militaires ou d’avoir un staff devant les briefer sur le notions essentielles en matière de défense. En ce qui concerne l’apport de la force d’intervention de la CEDEAO, il faudra savoir raison garder comme aime à le dire un homme politique car estimée à 3 500 hommes ce qui correspond en fait à une force de combat de 850 militaires combattants en calculant sur la base du ratio de 3 ou 4 hommes pour 1 combattant i.e. (antenne médicale, transport, transmission, staff d’état-major, pour un militaire combattant). On sait que seule l’armée américaine élève ce ratio jusqu’ à 6 hommes pour 1 combattant ce qui reviendrait à une force de combat de 583 hommes. Voila ce qui pourrait donc expliquer les réserves soulevées par les américains sur la force d’intervention de la CEDEAO.
Il est fort regrettable de n’avoir pas pu conserver l’armée de l’air à son niveau des années 1980, car il est inconcevable d’imaginer un conflit moderne sans aviation d’appui au sol, dans le désert actuel elle est l’arme décisive pour assurer une victoire.On rappellera que l’issue des conflits armés récents été décidée par des campagnes aériennes (Golfe 1991,2003, Kosovo 1999, en 2011, 26 000 sorties de l’OTAN ont anéanti l’armée libyenne).
Il s’impose d’adopter la terminologie officielle et d’abandonner l’emploi pléthorique et hétéroclite de termes : bandits armés, terroristes, narco trafiquants, rebelles, assaillants, envahisseurs, occupants, extrémistes islamiques, djihadistes, salafistes. Quid ?
En effet on notera que l’emploi du terme bandits armés reviendrait à dire que les opérations contre de un tel phénomène sont du ressort des forces de 2e degré c’est-à-dire la Police et la Gendarmerie nationales mais pas l’armée. Pour ce est du terme envahisseurs et occupants étrangers il s’apparenterait aux éléments du groupe terroriste AQMI (Al Qaeda dans le Maghreb islamique), Le Boko Haram, (groupe terroriste au Nigeria), MUJAO ( Le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest ) mais écarterait le MNLA (Mouvement nationale de libération l’Azawad) , sécessionniste qui avait proclamé l’indépendance des régions occupées pour se faire ensuite déloger par Ansar Eddine et le MUJAO. Quant aux termes d’extrémiste islamique, islamistes radicaux, djihadistes, salafistes , ils colleraient aux groupes d’Ansar Eddine, Boko Haram, MUJAO dont l’objectif recherché est l’imposition de la Sharia sur le territoire occupé.
Pour ce qui est du terme de terroriste il désignerait principalement AQMI et les narco trafiquants font allusion aussi à AQMI, Boko Haram, Ansar Eddine et MUJAO même si ces deux derniers mènent principalement des actes terroristes. Au gouvernant d’adopter le terme officiel consacré. Il importerait de mettre sur pied une stratégie de communications concertée de coordonnée des ministères clés afin d’afficher une même déclaration officielle, évitant ainsi les déclarations officielles contradictoires. Plus que jamais Il est temps de décréter l’état de mobilisation générale si non au moins l’état de mise en garde pour être dans une posture légale qui est le prélude à un engagement dans des opérations militaires de grande envergure. Mieux la mise en branle de L’état de mobilisation permettra d’enrôler les volontaires impatients d’en découdre avec les islamistes.Aussi il reviendra aux leaders religieux, chefs traditionnels, des chasseurs, griots et communicateurs traditionnels, associations de jeunes, associations féminines de jouer un rôle de premier plan pour une mobilisation générale et le réarmement moral l’armée.
Car un conflit de ce genre ne pourra être gagné sans le soutien du peuple tout entier.
Professeur
Modibo GOITA*
*Ecole de maintien de la Paix Alioune Blondin Beye
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