samedi 25 août 2012

Malijet - Depuis Bamako : Pensées d’un frère du Nord

Malijet - Depuis Bamako : Pensées d’un frère du Nord
Je ne rêve plus… Je n’espère plus…mon pays va si mal ! J’aurais voulu dire, après l’annonce du nouveau gouvernement : « enfin le règne de la paix et de la raison se profile à l’horizon » ! J’aurais voulu voir des hommes et des femmes valables, honnêtes et déterminés occuper les nouveaux postes. J’aurais voulu avoir laissé, derrière moi, le temps des doutes et des magouilles, pour avoir la vision d’un Mali dépouillé, net, patriote et capable. Au lieu de cela, je ne peux faire que le triste constat d’un accouchement difficile, donnant naissance à un être rachitique, symbole étriqué de notre société civile et de nos sensibilités politiques qui se retrouvent, bien minoritaires et mal représentées, au sein d’une équipe de « nous pas bouger » qui sort par la porte et revient par la fenêtre.


Comment peut-on nous mener en bateau de la sorte? Nous, les citoyens lambda du Nord et du Sud, toute la classe politique et toute la société civile. Ce gouvernement est totalement phagocyté par la bande de copains de CMD qui, dans un semblant de nettoyage des grands ministres CEDEAOINS, Touré et Sow, les fait revenir, déguisés en Conseillers très spéciaux, avec rang de ministres. Sommes-nous devenus si stupides qu’on peut nous faire avaler n’importe quelle couleuvre ? Notre Président par intérim, n’a-t-il pas le pouvoir nécessaire pour mettre un frein à la gourmandise de l’homme de la Nasa? Et côté Kati - pourtant on dit que c’est eux qui tirent les ficelles de ce théâtre de marionnettes qu’est devenue la scène politique - c’est l’approbation silencieuse et l’abandon des promesses faites au peuple malien lors du coup d’Etat… 4 ministères pour nos vaillants soldats ! Mais sont-ils encore vaillants ? Faudra-il encore attendre de longs mois avant notre libération?

Au Sud, les salafistes s’activent…s’infiltrent dans les mosquées…demandent même la démission du directeur de l’ORTM. Religion et politique s’entremêlent dangereusement.

Mon pays que vas-tu devenir ?
Nos frères du Nord se sentent abandonnés entre les mains de ces Fous de Dieu qui veulent changer nos us et coutumes et dévier notre pratique religieuse vers l’extrémisme, la barbarie et l’intolérance.
Que la fête a été triste, dans certaines villes où ces vautours planent sur nos populations ! A Bamba, les ordres étaient clairs ! Pas de va-et-vient pour saluer les amis, les voisins, les parents. Peut-on imaginer une des grandes fêtes maliennes comme Aïd el Fitr ou Aïd el Khebir sans ces groupes joyeux d’enfants qui viennent vous chantonner san bè sanbè au sud ou kay yeessi au nord, vêtus de leurs meilleures parures, insouciants et heureux comme des mange-mil avant la moisson. Plus de jeux dans les rues, plus de rires et de cris d’enfants… quelle tristesse !

Mon pays va si mal !… Pourra-t-on un jour retrouver notre joie de vivre ? Pourrai-je revenir, sans la peur au ventre, dans mon village du Gourma? Y amener ma femme et mes enfants? Pourrai-je m’asseoir, à nouveau, le soir au pied de la dune et entendre le son aigu du violon chanter les louanges de mes ancêtres? Pourrai-je revoir mes cousines, aux sourires éclatants et aux yeux ombrés de khôl, onduler gracieusement au son de la musique de Takamba? Et quand pourrai-je prier, dans la sérénité de l’aube, sur le sable blanc du bord du fleuve?

Je n’ose pas penser un seul instant que je devrais un jour faire mes bagages et partir en exil, dans un pays lointain d’où, les blessures des miens et le malheur de mon pays feraient saigner mon cœur à chaque instant.
Mon souhait, le souhait de tous les maliens du Nord et du Sud, qui portent notre patrie dans leur âme est de pouvoir regarder vers l’avenir et voir cette lueur d’espoir qui pour le moment tarde á s’allumer.

Que ces hommes qui tiennent les rênes du pays ne s’égarent pas dans les chemins sinueux de la cupidité et de la gourmandise politique et qu’ils nous conduisent enfin vers le salut de notre patrie, vers sa libération entière et totale et la dignité retrouvée.
Alors, je reviendrai chez moi…dans mon Gourma natal.
Mahamane Sidibé

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