Dans sa longue carrière de diplomate, Tiébilé Dramé aura certainement vu des vertes et des pas mûres, mais sa position actuelle de négociateur en chef des pourparlers intermaliens reste inédite en ce qu’elle comporte bien d’impondérables. En effet, l’ancien ministre maliens des Affaires étrangères devenu depuis deux mois conseiller politique du président Dioncounda Traoré est plus que jamais balloté entre Ouagadougou, centre des pourparlers, et Bamako, où se trouvent ses mandants. Une situation à vous donner le tournis, voire des insomnies.
Blaise Compaoré, le médiateur dans la crise malienne, l’avait dit presque à
mots couverts, et on s’attendait tous à un moment ou à un autre à la conclusion d’un accord pour le lundi 10 juin. Puis plus rien. Silence radio du côté de Bamako. Et pourtant dans ce contexte préélectoral, le temps n’est pas le meilleur allié, car la signature de cet accord conditionne grandement la tenue d’une campagne électorale apaisée, voire le scrutin du 28 juillet à Kidal, le fief du MNLA. Et pourtant à Bamako, on ne finit pas de discutailler, de politiser, de se concerter encore et toujours et de fignoler sur les termes de ce projet d’accord au point que Djibril Bassolé, le représentant du médiateur, a jugé utile de se rendre sur place le 12 juillet dernier pour tenter de sauter les verrous. Il apparaît clairement aux yeux des observateurs de cette crise que le pouvoir malien souhaiterait que la dernière version du protocole d’accord soumis à son appréciation soit modifiée. Et c’est loin d’être le seul point de discorde.
En effet, Bamako voudrait avoir tous les détails de l’arrivée de l’armée malienne à Kidal et, mieux, souhaiterait voir réalisé le cantonnement et le désarmement des groupes armés. C e que refusent en chœur les rebelles. L’autre pomme de discorde, c’est la levée de poursuites judiciaires engagées contre certains responsables de la rébellion. Chose que Bamako estime inopportune. Visiblement Bamako se presse lentement pour aller à cet accord. Et pourtant, selon certains observateurs bien au fait du dossier malien, rarement un accord aura été aussi bien ficelé.
Et compte tenu de l’urgence du retour à une vie constitutionnelle normale par le biais du scrutin du 28 juillet, il aurait été judicieux de le signer, quitte à poursuivre des pourparlers postélectoraux.
A dire vrai, dans ce round de négociations, il apparaît clairement que les rebelles du MNLA sont déterminés maintenant à aller à la paix, car ils estiment qu’il serait impossible d’obtenir mieux que ce qui leur a été proposé dans ce projet d’accord.
Mais on ne peut signer un accord qu’avec un interlocuteur qui le veut aussi. Et c’est là que la bonne foi de Bamako, qui ne cesse de fignoler depuis quelques jours, est mise en doute. Ce qui agace grandement et le médiateur et la communauté internationale, laquelle a du mal à comprendre ces tergiversations, surtout qu’il y a de cela un mois seulement, précisément le 15 mai 2013 à Bruxelles, Dioncounda Traoré s’était engagé à «privilégier le dialogue avec ses frères du Nord pour permettre la tenue du scrutin à Kidal».
Alors pourquoi traîne-il les pieds au moment où le repas est prêt et qu’il faut passer à table ?
Bamako aurait tort de trop tirer sur la corde.
Boureima Diallo
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