Sanogo à la tête d'un comité de réforme de l'armée malienne ou la bonne fortune du pompier-pyromane | L’Afrique en face
le 10 octobre 2012 12H26 | par
Vincent Hugeux
Putschiste, un métier d’avenir… Chef d’orchestre du coup d’Etat du 22 mars, politiquement fatal au locataire du palais de Koulouba Amadou Toumani Touré, alias ATT, le capitaine Amadou Sanogo présidera le « Comité militaire de suivi de la réforme des forces de défense et de sécurité ». En clair, l’aventurier en treillis dont le pronunciamiento eut pour effet mécanique de hâter la chute des deux-tiers nord du pays aux mains d’une nébuleuse djihadiste, alliée un temps aux séparatistes touaregs, se voit investi de la mission de ranimer la Grande Muette malienne. On imagine déjà l’insolite tango que danseront le pompier pyromane et les partenaires occidentaux de Bamako, censés financer et encadrer la « restructuration » d’une armée en lambeaux. Et ce dans la perspective -ô combien hypothétique- d’une intervention militaire sous l’étendard de la Cédéao.
Le président par intérim Dioncounda Traoré aurait-il l’audace honteuse ? On ne trouve nulle trace, dans le Journal officiel de la République du Mali, du décret pourtant signé dès le 6 août, et tenu secret jusque samedi dernier. Certes, il faut concéder un os à ronger de belle taille à Sanogo, qui a formellement remis le pouvoir aux civils en avril, mais dont les caprices, reflets d’une influence intacte, tétanisent l’exécutif provisoire. Fallait-il pour autant, après l’avoir gratifié de gâteries protocolaires, lui conférer une telle dignité ?
Quoique moins consternante, une autre nomination, annoncée hier, laisse perplexe. Celle de l’ancien président du Conseil italien Romano Prodi, 73 printemps, au fauteuil d’envoyé spécial des Nations unies pour le Sahel. Bien sûr, « Il Professore », négociateur aguerri, a dirigé en 2008 un comité conjoint de l’Onu et de l’Union africaine sur le maintien de la paix. Mais Prodi fut aussi, notamment à l’époque où il présidait la Commission européenne, l’un des avocats les plus ardents du retour en grâce de Muammar Kadhafi sur l’échiquier mondial. Un Guide libyen qui, de son vivant comme post mortem, a amplement contribué à fragiliser l’aire sahélienne. En cherchant bien, Ban Ki-moon aurait sans doute pu trouver un émissaire moins contestable. Et, de préférence, plus africain.
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