jeudi 5 juillet 2012

Les fanatiques islamistes s’acharnent sur Tombouctou | Humanite

Les fanatiques islamistes s’acharnent sur Tombouctou | Humanite
Les djihadistes qui contrôlent le nord du Mali poursuivent leur œuvre de destruction de mausolées musulmans inscrits au patrimoine mondial de l’humanité. Une intervention militaire internationale se profile à l’horizon.
Après avoir démoli pendant le week-end sept des seize mausolées de saints musulmans de Tombouctou, les islamistes du groupe armé Ansar Dine (littéralement défenseurs de l’islam) ont franchi une étape supplémentaire en brisant la porte d’entrée d’une des trois plus grandes mosquées de la ville. La porte en bois de la mosquée de Sidi Yahia de Tombouctou a été détruite à coups de pioche. Elle était fermée depuis des
 décennies car, selon des croyances locales, son ouverture éventuelle porterait malheur, et elle fait partie des trois grandes mosquées de Tombouctou, avec celles de Djingareyber et Sankoré, où seraient enterrés des saints. Toutes trois figurent sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco.
La destruction du patrimoine condamné
Ces destructions ont suscité des condamnations en série, notamment de la France, des États-Unis et de la Russie. Au Mali, l’Association des leaders religieux a parlé du « crime de Tombouctou ». L’Organisation de coopération islamique, qui compte 57 membres, a « déploré » la destruction, « par des éléments fanatiques », de mausolées qui « font partie de (notre) riche patrimoine islamique au Mali ». Même condamnation par l’Algérie, pour qui les saints et savants inhumés dans les mausolées ont « contribué à l’épanouissement de l’islam dans la région et à la diffusion des valeurs de tolérance et de spiritualité ». Le secrétaire général de la Francophonie (OIF), Abdou Diouf, a appelé à l’arrêt immédiat des destructions par « des éléments extrémistes qui occupent la ville ». De leur côté, moins d’une semaine après de violents combats (au moins 35 morts), le 27 juin, à Gao (nord-est), avec la rébellion touareg du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), forcée d’abandonner la ville, les islamistes du Mouvement pour l’unicité et le djihad en Afrique de l’Ouest (Mujao) ont disposé des mines aux alentours de Gao pour, selon le MNLA, empêcher une contre-offensive de sa part. Ansar Dine et le Mujao, qui contrôlent désormais les trois grandes villes et régions administratives du nord du Mali – Tombouctou, Gao et Kidal (extrême nord-est) – sont alliés à al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi).
« Nous ferons tout pour récupérer notre territoire », a fait savoir le ministre malien des Affaires étrangères, Sadio Lamine Sow, à l’issue d’une visite de deux jours à Alger. Il semble effectivement que la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) soit en passe d’obtenir un mandat de l’ONU pour une intervention au Mali. Hier, Paris se disait optimiste. Mais bien des interrogations demeurent. Quel sera le rôle d’Alger ? Et celui des pays occidentaux ?
L’Algérie est pour l’instant impliquée dans la recherche d’une « solution politique » que les deux parties croient toujours possible, a notamment rappelé le ministre délégué algérien aux Affaires africaines et maghrébines, Abdelkader Messahel. Cette démarche est « en bonne voie », a-t-il dit. Par ailleurs, le président guinéen, Alpha Condé, a affirmé que « le MNLA a une revendication identitaire, il n’est pas question de faire la guerre avec eux. Toutes les autres forces terroristes, (nous) devons les combattre », ajoutant que les combattants touareg seraient bien accueillis s’ils voulaient appuyer une force régionale contre Aqmi.
L'état des des forces armées maliennes
Autre difficulté pour la Cedeao (qui a déjà décidé d’envoyer un contingent à Bamako), l’état des forces armées maliennes. Interrogé sur une reconstruction de l’armée, divisée après le coup d’État du 22 mars et avant qu’un accord ne mette en place un gouvernement civil intérimaire, Sadio Sow a affirmé que son pays « a une armée en voie de recomposition. Bien sûr, le commandement a été perturbé et la prise de certaines villes du nord par la rébellion a évidemment créé des frustrations que nous comprenons parfaitement, mais c’est une armée qui se remet debout et qui fera son devoir. L’armée se prépare », a-t-il martelé.
La cité des 333 saints 
Fondée entre les XIe et XIIe siècles par des tribus touareg, et surnommée notamment « la Cité des 333 saints », Tombouctou a été un grand centre intellectuel de l’islam et une ancienne cité marchande des caravanes. Tombouctou compte seize cimetières et mausolées qui étaient des composantes essentielles du système religieux dans la mesure où, selon la croyance populaire, ils protégeaient la ville de tous les dangers. La ville est célèbre aussi pour ses milliers de manuscrits, dont certains remontent au XIIe siècle et d’autres de l’ère préislamique. L’Unesco demande la protection de Tombouctou et du tombeau des Askia à Gao, spectaculaire structure pyramidale datant du XVe siècle.
Pierre Barbancey

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