Crise sécuritaire et politique : Comment Soumeylou Boubèye est tombé - maliweb.net
Comment Soumeylou Boubèye est tombé
Depuis le forum des femmes de l’ASMA, avec l’insinuation de l’ancien ministre de la Défense et des Anciens Combattants, sur la mise en place d’une commission parlementaire qui permettrait de faire la lumière sur les évènements de Kidal du 21 mai (répondre aux questions, qui était en contact avec l’armée, qui a donné l’ordre), la crise a sans doute connu un rebondissement ce week-end. Soumeylou Boubèye Maïga a donc décidé de rompre le silence. A cette occasion, le Républicain revient sur certains actes permettant de mieux appréhender ce tournant.
Acte1 :
Le 16 mai, avec la décision du Premier ministre de se rendre à Kidal, les ministres se rendent à Tombouctou. Puis, ils font cap sur Kidal. Malgré la réserve de certains ministres, de Serval, de la MINUSMA, et même des services de sécurité (SE), sur l’opportunité du voyage, le Premier ministre, Moussa Mara insiste et maintient sa décision. Les ministres font le tour sur Kidal, l’avion ne pouvant atterrir, ils vont se poser à Gao. Et Soumeylou Boubèye est malade, sa tension baisse. Il est évacué sanitaire à Bamako.
Le 17 à Kidal, le 18 à Gao, on connait la suite. Le 18 mai, au soir, Mara est triomphalement accueilli à l’aéroport de Bamako Senou. A l’accueil, Soumeylou Boubèye Maiga, Karim Kéita et une foule nombreuse, dont le déplacement à l’aéroport aurait été financé par Mara. De l’aéroport, le Premier ministre se rend chez IBK à Sébénikoro, escorté par six motards, au lieu de deux habituels.
Acte2 :
Le 19 mai, Mara et Soumeylou sont à l’Assemblée nationale (Commission défense), pour un débat à huis clos avec les députés. Les élus RPM, qui ne croient pas qu’il était malade, reprochent à Soumeylou Boubèye Maiga, son absence à Kidal. Ils le mettent au pilori en insinuant que cette absence avait d’autres raisons. Mara le défend en disant que c’est lui-même qui l’en avait autorisé.
Acte3 : Kidal le 21 mai :
L’assaut est donné pour reprendre le gouvernorat. Vers midi, les nouvelles sont bonnes, le gouvernorat est repris. Le Président de la République, le Premier ministre et les ministres se congratulent au Conseil des ministres. Le ministre de la Défense rédige un communiqué à son nom : l’opération vise à sécuriser les personnes et les biens. Le site de la Présidence et le ministre de la Communication sur Twitter, annoncent triomphalement la reprise du gouvernorat.
A partir de 14 heures, les mauvaises nouvelles du front arrivent, c’est la consternation, la honte et l’humiliation. Les morts, les blessés, les prisonniers se comptent par dizaines. La déroute de l’armée est connue. Selon plusieurs sources diplomatiques près de 900 soldats maliens se sont réfugiés dans les différentes garnisons de la MINUSMA à Kidal, Ménaka, Andéraboukane, Tessalit, Aguel’hoc. Donc c’est l’humiliation de l’armée, de la nation toute entière. IBK s’enferme à Koulouba, personne n’a accès à lui, la honte est sur tous les visages. Péniblement à 22 heures, le porte-parole du gouvernement lit un communiqué pour dire que le Président de la République « instruit un cessez-le-feu immédiat ».
Acte 4 : L’heure des comptes a sonné
La recherche du bouc émissaire a commencé. Le régime cherche à se décharger sur l’armée. Le Président n’a pas donné l’ordre… l’ordre ne vient du Premier ministre. Le ministre de la Communication est celui qui excelle dans cet exercice. Paris, Bruxelles, New York, France24, RFI, TV5, les colonies maliennes à l’extérieur, pour répandre la vérité officielle à travers les continents. La hiérarchie militaire est indexée, mais dans les allées du pouvoir, le ministre de la Défense aussi.
Acte 5 :
Samedi 25 et dimanche, Soumeylou Boubèye essaie de se défendre. Il « sait » que le RPM veut sa place, mais il se battra. Il est choqué que Mara et Camara indexent la hiérarchie militaire. Il « ne se laissera pas faire », dit-il fermement.
Acte 6 : Mardi 27 à l’Assemblée nationale.
Le président de la Commission de Défense, Karim Kéita invite l’ORTM à envoyer une équipe à la Commission défense, qui doit entendre le ministre de la Défense, sur sa responsabilité dans la débâcle de l’armée à Kidal. Soumeylou Boubèye Maiga arrive confiant à l’Assemblée nationale, après tout, Karim Kéita est son ami. Surprise : c’est le lynchage. Remontés, les députés RPM rendent Soumeylou Boubèye responsable de la défaite militaire, lui rappelle son absence à Kidal le 21 mai lors de la visite de Mara.
Acte 7 : Soumeylou se rend à Koulouba
Le Président l’accueille froidement. Les explications sont rudes. Le ministre de la Défense est invité à rendre sa démission. A 22 heures, l’ORTM annonce le remplacement de Soumeylou Boubèye par Bah N’Daou.
Acte 8 : CICB le samedi 30 mai, forum des femmes de l’ASMA
Soumeylou Boubèye annonce que les trois députés de sa formation vont demander la création d’une commission d’enquêtes parlementaires, pour déterminer qui a donné l’ordre d’attaquer le 21 mai. Il informe les membres de son parti qu’il dispose de preuves téléphoniques et des SMS. Ses services et d’autres services disposent de relevés de communication (téléphones et SMS) prouvant que d’autres étaient en contact avec les militaires au front.
Nous étions déjà dans une grave crise politique. Elle prend d’autres proportions avec ces propos de l’ancien ministre de la Défense.
Conclusion : Soumeylou Boubèye Maiga dit qu’il est prêt à témoigner devant une commission parlementaire. Les représentants du peuple se doivent de mettre en place, de créer cette commission pour déterminer qui, de Mara ou d’IBK était en contact avec les responsables militaires. Qui est responsable de la tragédie, de la débâcle, de l’humiliation ? Car ne l’oublions jamais, au-delà de la responsabilité de Mara, de IBK ou de Soumeylou Boubèye Maiga, il y a eu des centaines de morts, de blessés, de veuves et d’orphelins. La balle est dans le camp d’IBK. Va-t-il se débiner ou s’assumer ?
B. Daou
Kéita Youssouf Z
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