lundi 9 juin 2014

A la loupe : Sympathie pour le diable - maliweb.net

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Sympathie pour le diable

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MNLA-nord-MaliLe dialogue et la négociation tant prônés par les communautés internationales et voulues par les autorités nationales semblent avoir montré toutes leurs limites, malgré la signature à Ouagadougou d’un accord préliminaire, en juin 2013, la nomination d’un haut représentant chargé du dialogue inclusif inter malien en vue d’une paix définitive dans le Nord de notre pays, et de nombreuses initiatives qui, jusque-là, se révèlent infructueuses.



Il apparait de plus en plus clair que les groupes armés terroristes, dont le Mnla, le Hcua et le MAA, ne sont pas encore dans une dynamique de paix et de réconciliation, sûrs d’avoir l’aide et l’appui nécessaires de l’Occident et de certains parrains du Golfe pour parvenir à leurs fins : la partition du pays. Pendant que les autorités continuent de s’engouffrer dans des chemins qui ne pourraient aboutir qu’à l’impasse, au cul-de-sac voire l’enlisement, les groupes armés terroristes, non contents de violer l’Accord du 18 juin qu’ils ont signé à Ouagadougou devant les communautés internationales en renforçant leurs positions et en s’attaquant aux forces armées régulières, ces groupes terroristes ont adopté une nouvelle stratégie.



Des terroristes plus forts que l’Etat

En effet, les manifestations contre le gouvernement, l’administration et l’armée sont de plus en plus fréquentes dans les localités du nord. Aux dires d’officiels maliens, ces manifestations ne sont pas spontanées mais suscitées, manipulées ou téléguidées par les séparatistes, souvent sous la menace, l’intimidation ou la contrainte. Il y a certes une part de vérité dans ces explications mais les autorités auraient tort de se contenter de cela et de s’inquiéter de certains faits.





En effet, les rangs des manifestants grossissent de manifestation en manifestation. Manifestement, des populations sont en train d’être gagnées à la cause de leurs tortionnaires occupants. Deux raisons pourraient expliquer cela.





En premier lieu, les populations ont compris que les groupes armés terroristes ont beaucoup plus d’amis, de bailleurs de fonds et de partenaires que le gouvernement malien. Pour preuve, la réémergence fulgurante du Mnla sur la scène. Ses combattants avaient été défaits à Gao, il y a peu, et chassés de tout le nord du pays par les moudjahidines du Mujao et d’Aqmi. Au cours de ces affrontements, ils avaient tout perdu et voilà que brusquement ils réapparaissent encore plus armés et équipés qu’auparavant, au point de mettre en déroute des forces armées maliennes (Fama) que l’Occident prétend avoir formé et équipé. Ce retour du Mnla et Cie n’est pas possible sans de solides appuis au sein des communautés internationales qui les financent et les arment. La France, la Suisse et le Qatar sont montrés du doigt, de même que les ressortissants des communautés touarègues et arabes vivant à l’extérieur du pays. Mais en plus de ceux-ci, il y a également ceux qui vivent ici même à Bamako et dans les autres villes du sud du pays : ces Touareg et Arabes tapis dans l’administration, dans de grandes agences de développement, dans des projets et programmes d’envergure, où ils touchent des salaires et traitements faramineux dont l’usage n’est pas forcément pacifique. Le Mali, toujours pacifiste et conciliant, depuis le début de la crise a fait sienne cette nécessité : pas d’amalgame, tous les Touareg ou Arabes ne sont pas des rebelles ou des terroristes. Mais, tout de même il apparait également nécessaire de connaitre la destination des salaires et traitements de certains cadres quand on sait que les nomades sont le seul peuple qui cherche fortune non pas pour construire ou réaliser mais pour détruire et faire la guerre. Mais là aussi, pas d’amalgame, il ne s’agit pas de tous les peuples nomades.



Le syndrome de Stockholm ?

En second lieu, les populations semblent douter maintenant de la capacité de l’administration et de l’armée maliennes à se réinstaller dans le nord pour assurer leur sécurité et travailler à leur développement. Déjà en fin mars-début avril 2012, quand les groupes armés terroristes avaient pris le contrôle des deux tiers du territoire national, ces populations avaient compris que le Mali légal et officiel ne sera pas à hauteur de souhait. Puis, quand les forces françaises et les troupes onusiennes ont débarqué, elles avaient recommencé à espérer. Mais elles sont de nouveau déboussolées à cause de ce qui s’est passé à Kidal du 17 au 21 mai dernier. A elles s’imposent donc la nécessité d’épouser la cause des vainqueurs, d’autant plus que même si le Mnla reste toujours pestiféré, il s’est de nouveau allié avec des groupes jihadistes pour lesquels beaucoup avaient eu des sentiments de sympathies même lorsqu’ils étaient sous occupation et vivaient les affres de la loi islamique. En effet, dans un nord abandonné par l’administration et l’armée régulières, des populations désœuvrées et sans perspective avaient cédé aux avances de l’occupant malgré les faits d’avoir auparavant été pillées, expropriées, lapidées, mutilées et tuées.

Aujourd’hui, après avoir attendu en vain la réinstallation de l’Etat et la reprise des activités économiques, elles attendent toujours de pouvoir compter sur leur armée et, surtout, elles attendent de pouvoir avoir confiance en les pays « alliés ».



Et comme l’attente risque d’être longue, quoi de plus normal que de raviver les sentiments de sympathie pour cet occupant qui a les faveurs des communautés internationales sans lesquelles le Mali ne pourrait rien? Cette sympathie pour le diable ne serait plus le « syndrome de Stockholm » mais une question de survie.



Cheick TANDINA

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