Attention à un compromis boiteux !Publié le vendredi 31 mai 2013Page visitée 0 fois
Seulement, il y a des moments où il faut savoir mettre un terme à une médiation, appuyer sur le « stop ». A moins qu’on décide d’entretenir de fausses illusions ou qu’on soit soi-même dans l’illusion. La médiation burkinabè dans la crise malienne depuis le début, n’a pas vraiment bonne presse au pays de Soundjata et pour beaucoup d’observateurs, c’est la médiation de trop. Mais fort de son mandat reçu de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) dont il passe pour être le médiateur attitré, le président du Faso, Blaise Compaoré, s’est cramponné à cette mission contre vents et marées. Depuis le début, cette médiation burkinabè a commis des erreurs d’appréciation, à moins qu’elle ait agi, sciemment. On en veut pour preuve le fait qu’au moment où cette médiation s’évertuait à l’époque à convaincre l’opinion de la possibilité de dialoguer avec le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) et Ansar dine, les mouvements extrémistes peaufinaient leur stratégie de conquête de l’ensemble du Mali. La suite, on ne la connaît que trop bien. Il aura fallu la diligence et la force de frappe impressionnante de l’ex-colon, conjuguée à la témérité du contingent militaire tchadien dépêché en urgence pour parer à l’incapacité des forces ouest-africaines, pour que le Mali soit encore un Etat souverain, relativement libre aujourd’hui. La feuille de route de Al Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) au Mali découverte par les forces françaises à l’occasion de cette opération Serval, a confirmé l’hypothèse d’une collusion entre les mouvements qui sévissent dans le septentrion malien dont le MNLA.
Mais la médiation a persisté et signé : les autorités maliennes devraient négocier avec les rebelles qui ont investi Kidal et en interdisent l’accès à l’armée malienne. Mais peut-on encore vraiment espérer quelque chose de la part du MNLA ? « Qui a bu, boira », dit l’adage. Le MNLA, malgré ses dénégations, a eu des accointances avec les « barbus » qui faisaient la pluie et le beau temps au Nord-Mali. Les liens se sont distendus entre-temps, mais il n’y avait probablement pas de divergence insurmontable entre ce mouvement et ses « amis » djihadistes. La feuille de route de AQMI le confirme. En attendant de voir le contenu du préaccord que propose la médiation pour cette ville, et de prendre connaissance de la réaction des protagonistes, on peut d’ores et déjà tirer la sonnette d’alarme. Il faudra éviter un compromis boiteux qui ne ferait que confirmer l’hypothèse d’un affrontement inéluctable.
Il est dangereux d’accorder un statut particulier à Kidal, de se plier aux desiderata du MNLA. De toute façon, rien ne permet aujourd’hui d’être sûr qu’avec ces rebelles, les djihadistes, ou du moins leur idéologie et leur fanatisme, ne réinvestiront pas le Nord-Mali. Ces mouvements, tant qu’ils sont armés et hors des rangs de l’armée régulière, sont des forces irrégulières et au regard des exactions dont leurs éléments ont pu se rendre coupables, ils sont des groupes terroristes. Ni plus, ni moins.
Ainsi, le MNLA, en dépit de la pertinence qu’on peut concéder à certaines de ses récriminations contre l’Etat malien, n’est pas vraiment fréquentable. Et au regard du traitement de mansuétude que la médiation lui réserve, on peut se poser des questions. De deux choses l’une : soit le médiateur a perdu la main et fait semblant de maîtriser la situation, soit il a pris fait et cause pour les rebelles. Bien des Maliens sont convaincus que les rebelles du MNLA ont de l’ascendant sur le président Blaise Compaoré, et que ce faisant, ce dernier n’est pas qualifié pour avoir une approche objective de la question du statut du Nord-Mali. Sans qu’il soit besoin de affirmer si ces gens ont tort ou raison de penser de la sorte, on peut affirmer que la médiation et les autorités de la transition malienne ne sont pas sur la même longueur d’onde et que ce désaccord pourrait très vite éclater au grand jour si les choses continuent dans ce sens. En effet, on se rappelle la sortie de Dioncounda Traoré, président de la transition malienne, qui disait que l’armée et l’administration maliennes se déploieraient à Kidal. Il n’y a pas mille et une façons de dire que le Mali tient à recouvrer l’intégralité de son territoire, à restaurer l’autorité de l’Etat sur tout le territoire. Et pour ce faire, aucun groupuscule armé, fût-il sympathique pour certaines personnes, ne devrait rester maître d’une quelconque portion du territoire malien. Le message est clair et parfaitement compréhensible. Kidal devra voter en tant que ville malienne à part entière. On ne devrait pas mettre en veilleuse une question aussi centrale que l’appartenance d’une ville à un Etat, sous prétexte qu’il faut respecter quelque calendrier électoral que ce soit. En tout cas, cela ne relève pas du domaine du raisonnable. A force de vouloir ménager aux rebelles du Nord-Mali une porte de sortie au-delà du raisonnable et de l’acceptable, le médiateur pourrait lui-même torpiller les efforts de sortie rapide de la crise. Certes, il est nécessaire que le Mali accorde une attention particulière à sa partie septentrionale en termes de réalisations au plan social, d’efforts de développement avec la pleine participation des populations locales. Mais, si les autorités maliennes cèdent aux exigences maximalistes des rebelles sur Kidal, c’est le pays tout entier qui perd et se perd et c’est la porte ouverte à de nouvelles revendications territoriales. Et bien entendu, il serait illusoire de croire que le Mali acceptera de boire le calice jusqu’à la lie. La diversion et la comédie ont assez duré.Le Pays »
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