Mali : qui sont les islamistes touaregs d'Ansar Dine ?
Créé le 05-12-2012 à 16h05 - Mis à jour à 18h56
Par Jean-Paul Mari
Un chef charismatique et des tribus fidèles... Ansar Dine est le mouvement islamiste armé le plus puissant du désert. Reportage.
Mots-clés : islamiste, Tombouctou, Kidal
Rebelles d'Ansar Dine près de Tombouctou en avril 2012. (Sipa)
Il fait nuit noire à Bamako. Au bord du fleuve Niger, le café occupe une cour protégée des regards. Au fond, une grande case couverte plantée de banquettes en cuir, de coussins et d’un épais tapis. Tout autour, des chaises en plastique blanc face à l’orchestre, trois guitares électriques et un micro. Sur la piste de danse, deux rangées face à face d’hommes et de femmes, tous touaregs, qui se frôlent sans se toucher.
Mali : retour de Bamako où les Touaregs dansent... par LeNouvelObservateur
Les femmes ne sont pas voilées, les hommes, jeunes, dansent et fument des cigarettes. Et portent des cicatrices blanches sur le corps, traces d’anciennes batailles. Certains sont membres du MNLA, le Mouvement national de Libération de l’Azawad, laïque et indépendantiste, d’autres appartiennent à Ansar Dine (Défense de l’islam), mouvement islamiste, conservateur et religieux. La charia, la musique et le tabac, tout cela paraît incompatible. Et pourtant, ils dansent tous ensemble, s’embrassent, viennent de la même tribu, parfois de la même famille. "Nous ne sommes ni laïques ni islamistes, dit Bilal, Touareg de Kidal, nous sommes d’abord touaregs. Et musulmans."
La plus connue et la plus menaçante, c’est Aqmi, Al-Qaida au Maghreb islamique, adepte du djihad international, de la lutte à mort contre les croisés, du terrorisme et de la prise d’otage. Il y a aussi le Mujao, son excroissance mafieuse, spécialisée dans le narcotrafic et l’islamisme radical. Et encore le MNLA, les indépendantistes qui se proclament laïques.
Enfin, il y a Ansar Dine, basé essentiellement à Kidal, un mouvement touareg à qui on prête beaucoup mais que l’on connaît peu. Et pour cause : ses chefs ne parlent pas, ou rarement. Chacun a sa méthode. Aqmi, c’est la stratégie de conquête ; le Mujao, celle des affaires ; le MNLA, la force de la communication à Nouakchott ou à Paris. Pour Ansar Dine, c’est le choix du silence. Pourtant, avec ses trois mille hommes armés, sa nature exclusivement touarègue, sa légitimité historique, un chef charismatique et des tribus fidèles, Ansar Dine apparaît comme le mouvement clé de la guerre du désert. [...]
Les musiciens manient la guitare et la kalachnikov
L’orchestre s’appelle Amanar, "l’Etoile", et ses voluptueuses mélopées ne parlent pas d’amour mais de la libération de l’Azawad, le pays des Touaregs. D’ailleurs, les trois musiciens connus sont tous des combattants, grandis dans les camps d’entraînement, qui manient tour à tour la guitare et la kalachnikov. Quand ils entonnent leurs plus grands succès, le public envahit la piste : "La rébellion est comme un long fil, facile à tordre, difficile à tendre."Mali : retour de Bamako où les Touaregs dansent... par LeNouvelObservateur
Les femmes ne sont pas voilées, les hommes, jeunes, dansent et fument des cigarettes. Et portent des cicatrices blanches sur le corps, traces d’anciennes batailles. Certains sont membres du MNLA, le Mouvement national de Libération de l’Azawad, laïque et indépendantiste, d’autres appartiennent à Ansar Dine (Défense de l’islam), mouvement islamiste, conservateur et religieux. La charia, la musique et le tabac, tout cela paraît incompatible. Et pourtant, ils dansent tous ensemble, s’embrassent, viennent de la même tribu, parfois de la même famille. "Nous ne sommes ni laïques ni islamistes, dit Bilal, Touareg de Kidal, nous sommes d’abord touaregs. Et musulmans."
Quatre organisations contrôlent le désert
Décrypter la réalité dans le nord du Mali, c’est d’abord aller au-delà des idées reçues et des étiquettes caricaturales. Dans le désert au nord du fleuve Niger, les sigles des organisations ne veulent rien dire sans les paramètres géographiques, ethniques, religieux et idéologiques qui les définissent. Aujourd’hui, quatre organisations contrôlent ce désert de 220.000 kilomètres carrés, grand comme la moitié de la France, si loin de Bamako mais si près des frontières avec l’Algérie, la Mauritanie, le Niger et le Burkina Faso.La plus connue et la plus menaçante, c’est Aqmi, Al-Qaida au Maghreb islamique, adepte du djihad international, de la lutte à mort contre les croisés, du terrorisme et de la prise d’otage. Il y a aussi le Mujao, son excroissance mafieuse, spécialisée dans le narcotrafic et l’islamisme radical. Et encore le MNLA, les indépendantistes qui se proclament laïques.
Enfin, il y a Ansar Dine, basé essentiellement à Kidal, un mouvement touareg à qui on prête beaucoup mais que l’on connaît peu. Et pour cause : ses chefs ne parlent pas, ou rarement. Chacun a sa méthode. Aqmi, c’est la stratégie de conquête ; le Mujao, celle des affaires ; le MNLA, la force de la communication à Nouakchott ou à Paris. Pour Ansar Dine, c’est le choix du silence. Pourtant, avec ses trois mille hommes armés, sa nature exclusivement touarègue, sa légitimité historique, un chef charismatique et des tribus fidèles, Ansar Dine apparaît comme le mouvement clé de la guerre du désert. [...]
- A LIRE : l'intégralité du reportage de Jean-Paul Mari dans "le Nouvel Observateur" du 6 décembre.
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