lundi 11 mai 2015

Malijet Le chef de la tribu Kel Antessar, Abdoul Magid Ag Mohamed Ahmed dit Nasser : «Si les combattants de la CMA sont des hommes qu’ils aillent attaquer le Gatia à Ménaka, au lieu de s’en prendre à des innocents à Goundam» Bamako Mali

Malijet Le chef de la tribu Kel Antessar, Abdoul Magid Ag Mohamed Ahmed dit Nasser : «Si les combattants de la CMA sont des hommes qu’ils aillent attaquer le Gatia à Ménaka, au lieu de s’en prendre à des innocents à Goundam» Bamako Mali

Le chef de la tribu Kel Antessar, Abdoul Magid Ag Mohamed Ahmed dit NasserLe chef de la tribu Kel Antessar, Abdoul Magid Ag Mohamed Ahmed dit Nasser
Le chef de la tribu Kel Antessar, Abdoul Magid Ag Mohamed Ahmed dit Nasser, est en colère, car il ne comprend pas pourquoi les rebelles s’attaquent aux populations du cercle de Goundam qui n’ont rien à avoir avec ce qui s’est passé à Ménaka. Pour lui, les rebelles devraient répliquer à l’attaque de Ménaka, au lieu de tuer des civils innocents à Goundam, M’Bouna, Bintagoungou, Léré et Téninkou.

Dans cet entretien, il nous parle de la caravane de la paix et du vivre-ensemble que les communautés de Goundam viennent de faire ; la recrudescence de la violence et la situation actuelle des populations dans les localités nord du Mali qui sont abandonnées à elles-mêmes.

Le Reporter : À quelques jours de la signature de l’accord d’Alger 2015, on constate la recrudescence de la violence. Comment suivez-vous ces événements ?

Nasser : C’est triste, parce que, moi, je viens tout juste de quitter Goundam, après avoir sillonné toute la zone pour plaider la paix, la cohésion sociale et le vivre-ensemble entre nos différentes communautés dans le cercle de Goundam. Une semaine après, il y a la recrudescence de la violence et le banditisme a recommencé. Je dis à tous les parents tamasheqs et arabes, qu’ils soient à l’intérieur ou à l’extérieur du pays, que leurs mamans, leurs sœurs, leurs papas, leurs enfants sont fatigués. Il est temps qu’ils déposent les armes et signent l’accord le 15 mai 2015. Il ne sert à rien de faire la guerre qui ne peut rien apporter aux communautés. Les gens sont fatigués ; trop, c’est trop. Aujourd’hui, nous avons besoin de la paix. Je dis aux gens de la Cma de l’Ouest que ce n’est pas Bintagoungou qui a attaqué Ménaka, ce n’est pas Léré qui a attaqué Ménaka ; ce n’est non plus Goundam. Ce sont les bandits armés du Mnla qui ont attaqué Ménaka. S’ils sont hommes, qu’ils aillent à Ménaka pour affronter les gens du Gatia, au lieu de s’attaquer à de pauvres populations de Bintagoungou et de Léré, là où leurs parents vont se ravitailler tous les jours. Ces gens-là sont en train de mentir aux populations du Nord en leur disant qu’ils sont en train de lutter pour elles. Ce qui est bien faux. Mais, ils viennent opprimer les populations du Nord. Il faut qu’ils arrêtent tout ça. Nous, on veut la paix parce qu’on sait qu’il n’y aura rien dans ce pays, s’il n’y a pas la paix. Celui qui veut aller cultiver son champ, ne peut y aller s’il n’y a pas la paix. Celui qui veut voyager, ne le fera pas sans la paix. Celui qui veut travailler dans son bureau, ne va pas travailler tant qu’il n’y a pas la paix au Nord. Donc, nous lançons un appel à la communauté internationale de soutenir notre gouvernement pour que cette paix-là revienne rapidement, parce que les populations du Nord de notre pays sont fatiguées. Elles souffrent non seulement de ces attaques, mais aussi de la pauvreté, car elles n’ont plus rien, elles sont laissées à elles-mêmes. Par exemple à M’Bouna et à Bintagoungou, les boutiques des gens ont été pillées, ils ne peuvent plus venir à Goundam et ils n’ont aucun soutien. L’Etat est absent, les organismes sont absents, les cadres qui sont avec eux sont absents. Donc, ils sont laissés à eux-mêmes. Je lance un appel à la communauté internationale, à la Minusma, à la France et à l’Union européenne d’aller soutenir ces populations qui souffrent aujourd’hui à Bintagoungou, M’Bouna, Goundam, Diré et à Léré.

Ne pensez-vous pas que la Cma joue aux harcèlements pour empêcher la signature du 15 mai 2015 ?

Les gens de la Cma sont dans une posture de réagir à l’attaque de Ménaka. Ça, ce n’est pas l’Etat malien, c’est Gatia, un groupe d’auto-défense qui les a chassés de là. Ils font tout pour que l’accord ne soit pas signé. Mais, moi, je crois que l’accord sera signé avec eux ou sans eux. L’accord sera signé le 15 mai parce que le peuple malien veut de cet accord, et c’est le peuple qui décide et quand le peuple décide de quelque chose, il le fera. Le peuple, qu’il soit tamasheq, peulh, sonrhaï, bamanan, dogon…veut aujourd’hui un accord de paix. S’ils ne veulent pas la paix, ils n’ont qu’à continuer à faire la guerre.

Quelle est la situation à Goundam, surtout la vie entre les communautés qui vous avaient accueilli à l’unisson lors de la caravane ?

Les populations de Goundam sont déçues des actes de la Cma. Elle a attaqué Goundam, Léré, M’Bouna, Bintagoungou, mais malgré tout ça, l’impact que nous avons voulu est atteint, car les populations blanches et noires sont ensemble aujourd’hui à Goundam, à Bintagoungou et à M’Bouna, malgré la pagaille semée par la Cma. Les populations fréquentent les foires d’Echel, de Bintagoungou, M’Bouna, Léré, de Tombouctou et de Goundam, sans être inquiétées. Donc, c’est ça l’objectif de la caravane de la paix. J’ai dit depuis le début que nous sommes de la société civile, nous aidons pour que la paix revienne. Mais nous ne pouvons pas nous substituer à l’Etat malien, à qui il revient de défendre l’intégrité du pays, d’assurer la sécurité des populations. Et c’est à la Minusma aussi. Nous, notre rôle est de faire en sorte que les populations parviennent à cohabiter ensemble. Ça, c’est atteint aujourd’hui. Maintenant, la population réclame la sécurité, une aide alimentaire et un soutien de la communauté internationale. Nous, notre rôle, on l’a fait. Pendant dix jours, on a sillonné toutes les communes de Goundam et passé des nuits à des rencontres communautaires, intercommunautaires et intracommunautaires. Entre nous et les Arabes, entre nous et les Tamasheqs noirs, entre nous et les Sonrhaï, pour leur dire que si vous êtes ensemble, rien ne pourra vous arriver, parce que vous êtes soudés. Même si une bombe tombe sur vous, vous allez trouver une solution étant ensemble. Voilà ce qu’on a pu cultiver dans le cercle de Goundam.

Avez un message ou un appel ?

Je félicite le courage des populations de Goundam qui, malgré tout ce qui s’est passé, ont su raison garder. Je félicite les autorités maliennes qui nous ont permis de sillonner les 16 communes de Goundam pendant notre caravane. Sans oublier l’armée et la Minusma qui nous ont escortés ; la GIZ et la coopération française qui ont financé cette caravane. Je les remercie infiniment, au nom de toutes les communautés de Goundam. Merci à vous également de nous avoir accompagnés.

Réalisée par Kassim TRAORE

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