Sédentaires-Djihadistes-Touaregs : Peut-on éviter le pire au Nord ?
Déjà, des groupes d’auto-défense ont affronté des combattants séparatistes qui accusent à leur tour les djihadistes. Au même moment, la mission de l’Onu dont le nouveau mandat insiste sur la nécessité de protéger les civils semble immobile face à cette escalade ethnique au nord du Mali. L’embrasement de cette zone par des affrontements intercommunautaires ne tient plus qu’à un fil, alors que les forces gouvernementales n’arrivent plus à assurer la défense du territoire national.
Les germes de cette division ethnique ont été semés par le Mnla qui s’est pourtant empressé d’accuser le gouvernement de vouloir en tirer profit. Le mouvement séparatiste et ses alliés ayant entrepris une occupation progressive des localités du nord, la violence interethnique devient imparable dans cette zone où la majorité non Touareg en a gros sur le cœur.
C’est le Mnla qui a inventé l’histoire d’une communauté Touareg persécutée, discriminée et violentée au Mali pour avoir des gens acquis à sa cause au sein de la communauté internationale. Ce postulat est d’autant plus grave qu’il tranche avec la servitude des Bella, une injustice à la fois historique et sociale qui frappe les Noirs paradoxalement majoritaires des campements Touareg.
Les membres de cette communauté discriminée ne sont pas les plus actifs des milices d’auto-défense qui bravent le Mnla et ses alliés. Les milices Peulhes de la région de Gao attendent de pieds fermes l’occasion de se venger, convaincues que le Mnla protège ceux qui volent leurs bétails, pillent leurs villages, campements et véhicules chargés de forains.
Au début de l’année, un déchaînement de violence a conduit ces milices à entreprendre des descentes sur les campements Touaregs. Le Mnla pris de court a crié sur tous les toits que le Mujao soutenait les combattants Peulhs, tandis que ces derniers disaient se battre pour défendre leurs intérêts afin de survivre dans un environnement qui leur est hostile.
Comme une traînée de poudre, l’éveil des Peulhs débuté dans la région de Gao s’était rependu à d’autres régions du nord et du centre du pays. Dans les régions de Mopti et de Tombouctou, précisément dans le Delta intérieur du fleuve Niger, des expéditions punitives contre les Touareg accusés de pillage ont été évitées de justesse.
Si rien n’est fait pour stopper l’occupation progressive des localités du nord par le Mnla et ses associés, les milices d’auto-défense Sonrhaï pourraient entrer dans la danse. Elles ont été en marge des combats depuis le début de la crise au nord du pays, malgré les violences commises contre la population civile quand le Mnla s’installait au nord en 2012 avec les djihadistes.
Les islamistes qui étaient chassés des villes de la zone profitent du repli des forces gouvernementales pour revenir, parfois sous la couverture du Mnla afin d’échapper. Si les séparatistes sont basés à Kidal, de nombreux combattants d’AQMI et d’Al Mourabitoune y sont également présents, sans oublier certaines figures importantes du terrorisme comme Iyad Ag Ghali, le fondateur du groupe islamiste Ançar Dine.
Dans ce contexte où il est difficile de faire la part entre les groupes armés, le rôle de la Minusma est de protéger les populations civiles contre les menaces armées. L’urgence est donc d’entamer le processus de cantonnement et de désarmement des milices armées, mais la liberté de mouvement dont jouit le Mnla rendra ce travail difficile en attendant l’ouverture des négociations avec le gouvernement malien.
D’ici là, le Mnla et ses associés parent au plus pressé en occupant autant de localités que possible pour être plus représentatifs que les groupes armés rivaux. Au pire des cas, ils entendent s’imposer par la force, les forces armées maliennes étant presque invisibles dans les localités qu’ils occupent depuis l’assaut avorté contre Kidal en mai dernier.
Soumaïla T. Diarra
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