Le MNLA, le HCUA, le MAA : ces groupes armés qui défient le Mali
Pendant que les discussions continuent à Alger entre le gouvernement malien et les groupes armés, gros plan sur les trois mouvements radicaux qui réclament l’exclusion des autres groupes armés des présentes négociations.
Les six mouvements politico-militaires présents à Alger ont tous en commun de s’être retirés de toute revendication religieuse et se sont engagés pour le dialogue avec Bamako dans le respect des engagements contenus dans l’accord de Ouagadougou. Cependant, le MNLA, le HCUA et le MAA se jugent seuls légitimes à engager des pourparlers avec Bamako.Mais qui sont réellement ces groupes armés qui réclament le monopole du dialogue avec le pouvoir central ?
Le MNLA : mouvement touareg indépendantiste
Crée le 16 octobre 2011, de la fusion du MNA (Mouvement national de l’Azawad), une organisation pacifique et du MTNM (Mouvement touareg du Nord Mali), un groupe armé, le MNLA (Mouvement national de libération de l’Azawad) est le principal groupe armé ayant ouvert les hostilités de 2012 en s’attaquant, le 17 janvier 2012, aux garnisons de l’armée malienne dans les régions du nord.C’est une rébellion qui avait pour seule revendication l’indépendance de l’« Azawad » (le nom qu’elle donne aux trois régions septentrionales du Mali), soit environ 65% du territoire malien. Elle se veut laïque mais le MNLA a connu de nombreuses mutations.
En mars 2012, à la faveur d’une instabilité politique dans le pays (coup d’Etat militaire contre le président ATT) , le MNLA, après avoir tissé une alliance avec des groupes terroristes (AQMI, MUJAO, Ansar Dine), s’empare de tout le nord du pays et y proclame, le 6 avril 2012, l’indépendance de l’« Azawad ». Cependant, cette déclaration d’indépendance est unanimement rejetée, le même jour, par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et toute la communauté internationale (y compris la France et les États-Unis).
En juin 2012, le MNLA met en place son « Comité transitoire de l’État de l’Azawad » (CTEA) qui sera présidé par Bilal Ag Acherif. Le colonel Mohamed Ag Najim, un touareg malien, ancien officier dans l’armée libyenne est à la tête de l’Etat-major de la rébellion.
Le 27 mai 2012, le MNLA et Ansar Dine fusionnent pour former un « Conseil transitoire de l’État islamique » mais cette alliance de circonstance sera de courte durée puisqu’en juin 2012 le MNLA perd totalement le contrôle de ses territoires conquis, chassé par ses alliés djihadistes. C’est alors qu’il s’inscrira dans une politique de dialogue avec le gouvernement malien tout en s’affichant, aux yeux de la communauté internationale comme la seule alternative face aux groupes islamistes qui occupaient le nord.
En 2013, le mouvement rebelle réussit à se réinstaller à Kidal avec la bénédiction de la France qui, en janvier de la même année, avait déclenché l’opération militaire « Serval » et chassé les islamistes des villes qu’ils occupaient.
En juin 2013, le MNLA, acceptera, sans déposer les armes, la cohabitation avec l’armée malienne, le retour de l’administration malienne et l’organisation des élections présidentielles et législatives sur les territoires sous son contrôle. C’était après la signature de l’accord de Ouagadougou dans lequel, le mouvement reconnait l’intégrité territoriale du Mali. Son combat sera, dès lors, axé sur l’obtention d’une « large autonomie » pour les régions du nord du Mali.
Le HCUA : l’héritier d’Ansar Dine
Né après l’intervention française au Mali, le HCUA (Haut Conseil pour l’unité de l’Azawad), est un mouvement ambigu qui rassemble des anciens du MNLA et d’Ansar Dine. Il a été créé le 2 mai 2013 sous le nom « Haut Conseil de l’Azawad » avant d’être rebaptisé le 19 mai Haut Conseil pour l’unité de l’Azawad. Selon son fondateur, le HCUA « ne réclame pas l’indépendance », est « contre le terrorisme » et prône le dialogue. Ces propos sont à nuancer car, dans les faits, le HCUA apparait beaucoup moins pacifique et résolument autonomiste, voire indépendantiste du fait de sa proximité avec le MNLA.Le HCUA est l’affaire de la puissante famille régnante de la tribu des Ifoghas. Après sa création par Mohamed Ag Intalla, un ancien du MNLA, il sera très vite rejoint par son père l’Amenokal Intalla Ag Attaher, chef coutumier des Ifoghas qui quitte également le MNLA. La famille sera complète lorsque Alghabass Ag Intalla, l’autre fils, dissout son groupe, le Mouvement islamique de l’Azawad (MIA) pour rejoindre son frère et son père dans le HCUA.
Le MIA est un mouvement formé par les combattants d’Ansar Dine. En effet, après l’intervention française au Mali, un certain nombre de combattants d’Ansar Dine ont cherché une porte de sortie en se recyclant au sein d’un nouveau groupe qui dit rejeter le terrorisme. Ils se sont donc réunis au sein du MIA, un mouvement fondé par Alghabass Ag Intalla, membre fondateur du MNLA mais qui avait préféré suivre, dès le début, Iyad Ag Ghaly au sein d’Ansar Dine.Depuis le 19 mai 2013, le HCUA est présidé par le vieux Intalla Ag Attaher. Son état-major est commandé par Cheikh Ag Aoussa, un ancien chef militaire du groupe terroriste Ansar Dine. Il a notamment commandé les forces d’Ansar Dine lors de la bataille d’Aguel’hoc pendant laquelle de graves crimes ont été commis sur les militaires maliens.
Par ailleurs, à l’issue des élections législatives, deux membres du HCUA ont été élus députés à l’Assemblée Nationale du Mali. Il s’agit de Mohamed Ag Intalla et Hamada Ag Bibi, tous du partis présidentiel RPM. Cependant, cela n’a en rien impacté sur l’orientation du groupe armé qui a continué à combattre l’armée malienne avec ses alliés du MNLA et du MAA. Lors des affrontements de mai dernier à Kidal, il avait fait plusieurs prisonniers au sein des forces armées maliennes de défense et de sécurité.
Le HCUA est toutefois signataire de l’accord de Ouagadougou. Alghabass Ag Intalla est même à la tête de la délégation de la coordination MNLA, MAA et HCUA, constituée pour les pourparlers de paix d’Alger.
Le MAA : un mouvement autonomiste arabe
Créé le 1er avril 2012, sous le nom de Front de libération nationale de l’Azawad (FNLA), au cours de l’occupation du nord du Mali par les groupes armés, l’organisation sera rebaptisée, fin 2012, MAA (Mouvement arabe de l’Azawad). Le mouvement, ayant pour principal objectif de défendre l’intérêt des populations arabes du nord du Mali, se dit opposé à l’indépendance de l’Azawad et à l’instauration de la charia mais réclame « une large autonomie pour le nord du Mali ».Le MAA et le MNLA peinent à cohabiter dans la paix. Les deux mouvements se sont affrontés à plusieurs reprises. Les communautés arabes reprochent notamment au MNLA les exactions dont elles avaient été victimes à In-Khalil en janvier 2013, alors que les Touaregs contrôlaient la ville. Le MLNA accuse de son côté le MAA de s’être allié au MUJAO.
Ces tensions eurent raison du mouvement arabe qui connaitra une dissidence en son sein. C’est ainsi que l’autorité du secrétaire général du mouvement, Ahmed Ould Sidi Mohamed, sera contesté par Sidi Brahim Ould Sidati. C’est alors que le mouvement a été scindé en deux sans que le nom ne change ni pour l’un ni pour l’autre. La branche favorable au MNLA est conduite par Sidi Brahim Ould Sidati. Elle participe, au sein de la coordination des mouvements MNLA, HCUA, MAA, aux pourparlers de paix d’Alger.
Ces derniers jours, des combats violents ont encore opposé le MAA à la coalition MNLA-MAA, obligeant les partenaires du Mali, présents à Alger, de tenter une mini médiation, en parallèle aux négociations globales, pour obtenir la fin des violences.
Aliou Hasseye
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