lundi 26 novembre 2012

MALI : Le refus algérien d’une intervention armée (2e partie) Le trublion qatari finance rebelles et terroristes - Liberté Algérie , Quotidien national d'information

MALI : Le refus algérien d’une intervention armée (2e partie) Le trublion qatari finance rebelles et terroristes - Liberté Algérie , Quotidien national d'information
MALI : Le refus algérien d’une intervention armée (2e partie)
 Par : AlI EL HADJ TAHAR
Tous les chefs des groupes maliens pseudo-djihadistes et pseudo-rebelles du MNLA et d’Ansar Dine viennent du même mouvement du MPLA et du MPA responsables des anciennes rebellions qu’Alger a eu à régler, notamment en 1992 et en 2006. Lorsque Kadhafi était impliqué dans la manipulation, la solution était facile à trouver, mais aujourd’hui il semble que les paramètres aient changé et que d’autres forces soient entrées en jeu. Si, comme le craint notre ministre des AE, les velléités d’une intervention armée entrent dans le cadre d’agendas étrangers, il faut aussi déduire que la situation qui prévaut au Mali a été créée dans le cadre de ce même agenda. De toute évidence, il n’y a plus de doute que le rôle autrefois joué par Kadhafi auprès des Touareg risque de revenir de manière définitive aux manipulateurs exogènes qui avancent leurs pions sur le terrain. Beaucoup d’informations le confirment.
En mars 2012, sur la base d’informations de la Direction du Renseignement Militaire français, le Canard Enchaîné affirmait que l’émir du Qatar avait livré une aide financière aux mouvements armés qui ont pris le contrôle du nord malien : “Les insurgés du MNLA (indépendantistes et laïcs), les mouvements Ansar Dine et AQMI (Al-Qaïda au Maghreb islamique) et MUJAO (djihad en Afrique de l’Ouest) ont reçu une aide en dollars du Qatar”, dit la source de la DRM qui précise à l’hebdomadaire que le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, “n’ignore aucune des mauvaises nouvelles arrivées d’Afrique subsaharienne et que plusieurs notes de la DGSE ont alerté l’Elysée”.
L’Elysée n’a pas réagi et les 4x4 frappés du sigle Croissant-Rouge qatari ont continué à sillonner le désert malien, bourrés de dollars. En outre, Roland Marchal, chercheur au Centre d’études et de recherches internationales de sciences politiques à Paris (CERI) affirme : “De la même façon que le Qatar a fourni des forces spéciales pour entraîner une opposition à Kadhafi, on pense qu’un certain nombre d’éléments des forces spéciales qataries sont aujourd’hui dans le Nord Mali pour assurer l’entraînement des recrues qui occupent le terrain, surtout Ansar Dine.” Quant à Sadou Diallo, l’ex-maire de Gao au Mali, il disait sur RTL : “Le gouvernement français sait qui soutient les terroristes. Il y a le Qatar par exemple qui envoie soi-disant des aides, des vivres tous les jours sur les aéroports de Gao, Tombouctou, etc. “Le Qatar s’est-il permis de distribuer armes et argent aux terroristes et aux “rebelles” sans l’aval français et surtout américain ? Qui finance commande…
Pour mieux comprendre, il faut aller à la genèse : en septembre 2010, lorsqu’AQMI a kidnappé cinq Français employés des sociétés Areva et Vinci à Arlit, un village nigérien. Les faits sont d’autant plus troublants que les preneurs d’otages laissent le Nord algérien et tunisien et vont au Niger, à des milliers de kilomètres, pour enlever des travailleurs qui vont servir d’alibi à l’Elysée pour une intervention au Mali. D’autres détails ont permis à une ONG française, l’Observatoire du nucléaire, d’accuser l’Etat français d’avoir facilité l’enlèvement des salariés d’Areva et Vinci dans le cadre d’une manœuvre tactique destinée à conserver la mainmise française sur les mines d’uranium nigériennes. Selon cet Observatoire, Areva aurait été avertie des menaces par les autorités maliennes, mais elle a abaissé son seuil de vigilance au lieu de le renforcer, tout en refusant l’aide de protection nigérienne. Même le conseiller sécurité d'Areva au Niger, le colonel Jacques Hogard, enfonce le clou en disant que les preneurs d'otage “ont bénéficié d'une excellente information au sein du groupe Areva, c'est clair. On peut même appeler cela une trahison”. Outre l’exploitation actuelle, Areva projetait d’ouvrir une autre mine d’uranium au Niger, or le gouvernement semblait privilégier la Chine.
Les otages français seraient retenus au Mali où la France exploite des mines d’or et Total des puits de pétrole. Comme par hasard, le Qatar est actionnaire dans Vinci et dans Total. En 2010, il a voulu participer au capital d’Areva à condition de convertir sa participation dans la division minière de l’entreprise, mais l’Elysée a refusé. Doha a-t-il trouvé un “argument” solide pour s’imposer dans le capital d’Areva ? Quant à Total, il veut obtenir des concessions au Mali et au Niger dans le nouveau bassin pétrolier de Taoudéni (un périmètre de 1,5 million de km2 à cheval entre le Mali, l’Algérie et le Niger) et cela peut susciter d’autres convoitises.  Comme par hasard, le nord du Mali sera occupé par le MNLA, avant de passer sous contrôle entier des islamistes, grâce à l’argent béni du Qatar…
Terreau des conflits, terre des convoitises
Une autorité malienne relâchée, voire inexistante, de la faiblesse au Niger et en Libye, une Mauritanie débordée, une extrême porosité sur des dizaines de milliers de kilomètres de frontières sahéliennes et sahariennes, des organisations djihadistes surarmées, des arsenaux à ciel ouvert, une zone devenue le cœur de la vente d’armes et de drogues (cocaïne sud-américaine et haschisch marocain) : un terreau idéal pour des puissances occidentales cherchant à s’incruster sous un prétexte ou un autre. En outre, l’Afrique du Nord est définie dans plusieurs textes, études et déclarations d’officiels américains et européens comme la zone d’extension de leur influence. Cette zone instable est très riche sur le plan des ressources minières : hydrocarbures, or, uranium, énergies nouvelles… L’OTAN, qui a ouvert la boîte de Pandore de l’arsenal libyen pour tous les groupes armés, est directement responsable de l’implosion du Mali, que l’Occident a au préalable précipité dans une crise économique grave, puis en aidant un coup d’Etat contre le président Amadou Toumani Touré, dit ATT.
Pour créer cette situation, le MNLA et le mythe d’une rébellion de “l’Azawad” – lui-même basé sur un mythe territorial – ont été utilisés comme cheval de Troie pour grossir la nébuleuse terroriste, justifiant ainsi une lutte pour sécuriser un immense corridor qui va de l’Atlantique à la Méditerranée et la mer Rouge et qui fait l’objet de toutes les convoitises. Selon le MNLA, Ansar Dine compte dans ses rangs “seulement 14 touareg, pas un de plus” (1). Or il s’est appuyé sur Ansar Dine, Aqmi et le Mujao pour occuper le Mali : il a donc volontairement engagé des terroristes étrangers dans son propre pays. Puis le MNLA a signé avec Ansar Dine un accord pour l’établissement d’une “république islamique” dans l’Azawad avec une Constitution “basée sur le Coran” (2), reniant ainsi ses premiers engagements pour une république laïque et démocratique. L’alliance a été de courte durée car une guerre les a opposés et a fini au profit d’Ansar Dine et l’exclusion du MNLA des principales villes.
Bilal Ag Acherif, le secrétaire général du MNLA, est le neveu d’Iyad Ag Ghaly, le chef d'Ansar Dine ! Il suffit d’une famille pour faire un parti islamiste et un parti séparatiste tout en guerroyant l’un contre l’autre, parfois.
Apparemment, l’Algérie n’accorde aucun crédit au MNLA dont les éléments utilisent le même argument pour mener une énième fronde, en dépit des postes ministériels qu’ils ont occupé et des accords qu’ils ont signés. L’accord d’Alger de 2006 a donné l’espoir d’une stabilité d’autant qu’après chaque rébellion, le gouvernement malien s’engageait à la décentralisation et à un programme de développement du Nord, en y consacrant parfois jusqu’à 48% de son budget.
 En 2006, certains rebelles et opposants ont été intégrés au sein des structures de l’État, dont l’actuel chef d’Ansar Dine et deux membres du MNLA qui étaient ministres dans le précédent gouvernement qui comptait trois ministres touareg alors que cette ethnie ne représente pas plus de 200 000 personnes sur une population de 15 millions d’âmes. Depuis, le Mali a aussi enrôlé plus de 3 000 rebelles dans l’armée, en plus de la nomination de milliers d’hommes bleus dans les administrations. Les Touaregs sont essentiellement des nomades du Nord-Mali qui compte aussi des Maures, des Peulhs, des Sonrhaïs et des Kountas.
Le MNLA ose revendiquer les 2/3 du territoire alors qu’il ne représente même pas les Touareg et même pas la fratrie à laquelle il appartient. Aucun chef traditionnel, aucun amenokal n’a rejoint ce mouvement ou ses prédécesseurs, le peuple touareg étant de tradition pacifique. Majoritairement opposés à la création d’un État indépendant, les Touareg, comme toutes les communautés africaines, comprennent des gens modérés et des modernistes mais aussi quelques trublions séparatistes et des islamistes, bien que leur majorité se conforme à l’islam ancestral et se montre très réservée vis-à-vis de l'extrémisme, préférant les solidarités inter-ethniques et claniques qui garantissent la vie dans le désert. 
Azawad : une création d’officines étrangères
Les problèmes essentiels des Touareg sont liés au pastoralisme qui connaît des difficultés du fait de la sécheresse, même en Algérie. La manipulation étrangère d’une détresse humaine a aggravé le cas malien. Arrivée dans les valises bourrées de dollars du Qatar, l'idéologie wahhabite a quant à elle peu de prise sur les populations locales. L’Algérie a donc raison de prôner le dialogue avec Ansar Dine, car il est essentiellement composé d’étrangers malheureux et d’enfants qu’il est aisé de renvoyer chez eux si les chefs de ce parti sont ramenés à la raison et arrachés à l’emprise qatarie. Entre rébellion ethnique et revendications islamistes, certains groupes touareg maliens ne cherchent que l’intérêt personnel et ne font que noircir l’image de leur communauté qui continue cependant à jouir d’un immense respect dans tout le Sahel et le Sahara.
Mais avant d’aller plus loin, il faut dire que la notion d’Azawad diffusée par les médias occidentaux depuis une décennie est une véritable mystification. André Bourgeot, chercheur au CNRS français, dit : “La notion d’Azawad est une construction politique. Sur le plan historique il n’y a eu ni royaume de l’Azawad, ni empire de l’Azawad, ni chefferie de l’Azawad, donc il s’agit bien d’une construction politique qui est animée par un groupe, je dis bien un groupe, touareg ultra-minoritaire.” Quant à Y. Togora, membre fondateur du Collectif pour la paix et le développement du Mali, il écrit qu’il existe “à  Tombouctou un endroit appelé Azawad, mais qui n'est connu que de quelques autochtones. C'est une bande de terre désertique, située au nord-est de Tombouctou et au sud d'Arawane. Sa superficie ne dépasse guère les 350 km2. C'est la seule Azawad reconnue par la mémoire collective, et peut-être les Archives nationales”. Aidés par les médias occidentaux, les mouvements séparatistes touareg ont créé cette supercherie qui fait du lieu-dit territorial de l’Azawad une immense aire géographique. Sur aucune carte ancienne et dans aucune encyclopédie on ne trouve le terme Azawad.
Les manipulateurs se sont permis de découper un morceau de Sahara, au nord du Mali, et l’appeler Azawad. Si à l’Azawad on veut donner une connotation ethnique, pourquoi donc ne pas y inclure Tamanrasset et tout le Sahara algérien, une partie du Niger, du Burkina Faso et du Sahara libyen ? Alors cela correspondra à la zone que la France coloniale voulait concrétiser par la loi
n° 57-27 du 10 janvier 1957 et qui porte création d’une “Organisation commune des régions sahariennes” (OCRS) afin de n’accorder que des indépendances incomplètes aux pays de l'Afrique occidentale française (AOF) et de l'Afrique équatoriale française (AEF), comme l’a prouvé le rêve gaullien d’amputer l’Algérie de son Sahara. C’est une même promesse qu’on fait miroiter aujourd’hui dans le cadre des politiques impérialistes et néocolonialistes. Joli scénario pour les futurs James Bond franco-américo-qataris…

A.E.T.
Interview de Mohamed Ag Najem dans Mon Journal, 7 novembre Jeune Afrique, 13 juin 2012

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