lundi 7 janvier 2013

La devise de la transition : « Un chef et deux porte-parole ! » - maliweb.net

La devise de la transition : « Un chef et deux porte-parole ! » - maliweb.net

La devise de la transition : « Un chef et deux porte-parole ! »

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Après avoir crashé la belle navette spatiale de l’astraophysicien Diarra, le capitaine Sanogo n’a nul besoin de conquérir le titre officiel de président du Mali puisque le président et le premier ministre en place ne font que porter et … exécuter sa parole. Comme dans l’armée.
Depuis l’Accord-cadre du 6 avril 2012, le capitaine Amadou Haya Sanogo a officiellement quitté le pouvoir. Mais s’il ne possède plus les titres du pouvoir, il en garde la réalité.
Simple capitaine de son état, Sanogo voit, en effet, ramper à ses pieds colonels et généraux: ce n’est pas que les grades militaires aient cessé d’avoir de l’importance sous nos tropiques mais ils en ont beaucoup moins que l’urgence pour tout citoyen raisonnable de gagner ses trois repas quotidiens. Or quiconque se retrouve dans le collimateur du capitaine a de sérieuses chances de se voir réduit au pain sec et à l’eau plate.
Chef du machin, pardon!, du Comité des réformes de l’armée, Sanogo connaît une surcharge de travail. C’est à ses heures perdues qu’il « facilite » le départ des Premiers ministres, de préférence ceux qui, comme l’astrophysicien Diarra, ont trop lu l’Accord-cadre et pris au pied de la lettre les « pleins pouvoirs » qui y sont stipulés. Bien entendu, quand un capitaine « facilite » les départs, il ne se sert pas de gâteaux au chocolat ni de lait Nido: il use plutôt de baïonnettes, de coups de crosse et de mises en garde sévères: par exemple, il n’a pas caché qu’après le départ de Cheick Modibo Diarra, il saura s’occuper de tout successeur qui afficherait des « ambitions démesurées ». Django Sissoko, malin comme un lièvre, a sûrement compris le message et, par conséquent, n’aura d’autre ambition que de servir le Mali – c’est le vocabulaire consacré, n’est-ce pas ?
Le capitaine Sanogo réside à Kati. Pour d’évidentes raisons de sécurité, il a entouré sa résidence et ses bureaux d’un mur haut comme celui de Berlin mais qui ne l’empêche point de garder l’oeil sur la capitale. La seule chose qui ait vraiment échappé à sa constante surveillance, c’est cette foule de badauds qui a réussi l’exploit de bastonner le président de la transition. Il faut dire que depuis cette bastonnade, Dioncounda a perdu tout piquant et n’arbore plus qu’un foulard blanc en signe de paix. Il ne donne plus de souci au maître de Kati. Du coup, ce dernier est devenu aussi le maître du pays. Et il a renforcé son emprise nationale en adjoignant au très commode Dioncounda un Premier ministre tout aussi doux. A travers ces deux têtes officielles de l’exécutif, le capitaine boit du petit lait: tout ce qu’il ordonne est exécuté à l’instant, sans hésitation ni murmure. Comme dans l’armée. A preuve, le capitaine avait annoncé que le gouvernement Django reconduirait les mêmes ministres avec quelques petits rajouts : il en fut effectivement ainsi alors que les grands professeurs de droit croyaient savoir que le gouvernement est nommé par le président de la République sur proposition du Premier ministre.Entre mars 2012 et maintenant, une centaine d’officiers ont reçu des promotions administratives; nombre d’entre eux ont été nommés « hauts fonctionnaires de défense » dans les ministères. Sans mettre en doute la haute qualité de ces hauts fonctionnaires de défense, je me demande ce qu’ils peuvent faire de leurs dix doigts dans les bureaux qui leur sont affectés dans des ministères comme celui du logement, de la culture ou du tourisme. En tout cas, il semble qu’aux yeux du capitaine, ces hauts fonctionnaires coûtent moins cher à l’Etat que l’ex Premier ministre Diarra dont l’officier a dénoncé les séjours dans les hôtels de luxe. Après ce sermon, délivré à Diarra en guise d’oraison funèbre, il n’y a pas de doute que Django saura à quoi s’en tenir: lorsqu’il voyagera, il devra prendre soin de dormir, sinon à la belle étoile, du moins dans des endroits modestes: pourquoi pas un foyer d’immigrés ? Cela permettra de réaliser d’énormes économies susceptibles d’être investies dans les dépenses de l’armée auxquelles, selon Sanogo, Cheick Modibo Diarra opposait la sourde oreille.Du festin et de la musique en perspective pour les soldats, n’est-ce pas ?
En somme, avec le capitaine Sanogo, le Mali a instauré un système politique nouveau ignoré des plus éminents constitutionnalistes. Ce système se compose d’un chef (celui qui tient le fusil et le bâton) et de deux porte-parole : le président de la transition est porte-parole officiel et le Premier ministre porte-parole par intérim. Ce système a l’avantage d’éviter tout conflit de compétence puisque le chef seul décide et les porte-parole exécutent. Quand l’un des porte-parole a la hardiesse de vouloir porter sa propre parole, le chef « facilite » son départ, de préférence la nuit et à travers une lettre démission lue à 3 heures du matin comme si elle s’adressait à des hiboux insomniaques. La CEDEAO, si elle a quelque cohérence dans sa démarche, ne devrait pas se plaindre d’un tel système de pouvoir: n’a-t-elle pas exigé que les Maliens s’unissent et suivent une même feuille de route ? La feuille de route malienne, c’est celle qui porte la marque Sanogo, marque déposée, brevetée et protégée depuis la fuite du « Vieux Commando ». Toute autre feuille de route résulte d’une contrefaçon. Or la contrefaçon est un crime réprimé par le code pénal. Les Bérets rouges de Djikoroni ne me contrediront pas: ils passeront bientôt en cour d’assises pour avoir tenté de rectifier, donc de contrefaire, la feuille de route tracée par l’homme de Kati.
On ne me croira pas mais j’estime que Sanogo, malgré ses menaces, ne fera rien pour devenir le chef de l’Etat en titre. En effet, dans sa position actuelle, il a le joker en main: il tire en douce les ficelles de l’Etat et quand elles se cassent, il renvoie, pardon !, il « facilite » le départ des gouvernants officiels pour« incompétence ». S’il devenait président officiel du pays, il se mettrait à découvert. Plus de manoeuvres dans l’ombre. Plus de bouc émissaire. Il répondrait seul et personnellement de tout ce qui ne marcherait pas au pays. Or rien ne marche ni ne marchera au pays avant longtemps. Que dirait le capitaine au bon peuple si, en tant que chef de l’Etat, il n’arrivait pas à libérer le nord à bref délai ? Que dirait-il s’il n’arrivait pas à payer les salaires, faute de financements extérieurs ? Sans compter qu’il va devoir rouvrir de nouveaux bagnes pour interner les politiciens décidés à lui chercher des poux dans la tête. Voilà pourquoi je pense que les concertations nationales pourraient déboucher sur le renvoi du gouvernement actuel mais pas à l’installation du capitaine à la place de Dioncounda. Le vrai but de ces Concertations, c’est de donner à manger à ceux qui sont sortis brédouilles du grand changement du 22 mars. Voyez-vous, les Yerewolo Ton, les Younouss Hamèye Dicko et autres MP22 ont, jusqu’à présent, tiré les mauvais numéros à la loterie Sanogo. Depuis 8 longs mois, ils crient et hurlent sans qu’une âme charitable leur jette le moindre os à ronger. Il y a vraiment là de quoi donner des idées révolutionnaires ou…concertationnelles. Vous comprenez que si ces gens-là n’ont rien à se mettre sous la dent, ils inviteront bientôt l’ange Israfil à souffler dans la trompe afin que crève tout être vivant et que se produise la fin du monde. Les Concertations nationales souveraines demandées par les grognards locaux signifient donc des Concertations alimentaires souveraines. Celui qui ne l’a pas compris n’a rien compris à la politique.

Tiékorobani

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