Plus de deux mois après des attaques lancées, mi-janvier, par des groupes armés dont des rebelles touareg et jihadistes dans le Nord, le Mali a été secoué le 22 mars par un coup d'Etat militaire, qui a précipité la chute de la moitié du pays aux mains des assaillants. Les jihadistes ont ensuite évincé leurs ex-alliés rebelles touareg et contrôlent désormais totalement ces zones.
Le président malien de transition, Dioncounda Traoré, a demandé mardi à la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao) son aide pour sécuriser les institutions de transition, réorganiser l'armée et restaurer l'intégrité territoriale du Mali.
Mais la perspective d'une reconquête militaire du nord du Mali, aux mains de groupes islamistes depuis cinq mois, reste lointaine, Bamako ne souhaitant pas l'intervention de forces étrangères combattantes sur son sol.
Les autorités maliennes, qui se sont fixé comme priorité absolue de reconquérir le Nord, doivent composer avec l'armée et l'ex-junte militaire responsable du coup d'Etat ayant renversé le président Amadou Toumani Touré (ATT) le 22 mars. Les putschistes ont prévenu qu'une force régionale ne devrait pas s'occuper de la sécurité à Bamako et qu'elle n'aiderait qu'en "appui" à reprendre le Nord.
Dans son courrier, le président Dioncounda Traoré s'inscrit dans cette ligne: il demande "un soutien et un appui aériens", des renseignements, une aide logistique et l'envoi de cinq bataillons "à engager graduellement dans le contrôle des villes reconquises", sans participation aux combats préalables.
Et il prend soin de préciser que "le déploiement de forces militaires combattantes est sans objet" à Bamako, alors que la Cédéao prépare depuis plusieurs mois le déploiement au Mali de quelque 3.300 soldats, force dont les contours demeurent flous.
"Il ne veut pas de troupes pour faire la guerre à la place des Maliens. En gros, il demande des moyens pour permettre aux Maliens de faire le travail", analyse Alexis Kalambry, directeur de publication du quotidien privé malien Les Echos.
"C'est quand même une évolution, parce que ils ont toujours dit: +On ne fera pas de demande.+ Je pense que l'occupation de Douentza (ville du Centre) et l'opinion qui est en émoi ont précipité la lettre. Jusque-là, aussi bien le gouvernement que la junte se refusaient à toute démarche en direction de la Cédéao", souligne-t-il.
Kidal, Gao et Tombouctou, les trois régions administratives composant le nord du Mali, sont tombées il y a cinq mois aux mains du Mujao et d'autres groupes armés, dont des rebelles touareg et jihadistes liés à Al-Qaïda. Les islamistes ont ensuite évincé leurs ex-alliés touareg et contrôlent désormais totalement le Nord.
Pourtant, le secrétaire général de la présidence malienne Baba Berthé, en visite à Abidjan, a encore émis l'espoir mercredi que la négociation rende une intervention militaire "sans objet".
"L'appel à la Cédéao était attendu, mais il a été longtemps différé, parce qu'il divise la classe politique malienne. Il y a un nationalisme malien très fort qui s'accorde mal avec l'idée d'une intrusion étrangère à caractère militaire", explique Babacar Justin Ndiaye, politologue sénégalais et spécialiste du Mali.
Pour lui, l'armée malienne est en mesure de reconquérir le nord du pays, qu'elle a pourtant perdu presque sans combattre.
"C'est le laxisme de ATT et le sous-équipement qui ont été fatals à l'armée malienne. Si ces deux aspects sont comblés, les soldats maliens pourront faire l'essentiel du travail: les effectifs existent et les Maliens connaissent très bien leur territoire", assure Babacar Justin Ndiaye.
Le président Dioncounda Traoré demande d'ailleurs à la Cédéao son aide pour "l'acquisition de matériels militaires majeurs", alors que des armes achetées par le régime de ATT sont bloquées depuis fin juillet en Guinée, en accord avec la Cédéao
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