mardi 9 juin 2015

Touaregs – Toubous : la fausse guerre. | Tamtaminfo

Touaregs – Toubous : la fausse guerre. | Tamtaminfo

Touaregs – Toubous : la fausse guerre.

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Depuis plus d’un mois, au Qatar, plusieurs responsables et dignitaires des communautés Touarègues et Toubous sont en train de créer les conditions d’un cessez-le-feu concernant la crise qui secoue le sud Libyen, notamment la région d’Oubari, majoritairement Touarègue.



Ce conflit n’est pas le premier du genre dans le sud Libyen depuis la chute de Kadhafi, car déjà en 2012 les Toubous et les Arabes Ouled Slimen s’y sont affrontés faisant des centaines de morts. Lors de cet affrontement, la collaboration des Touaregs et des Toubous était manifeste, les deux communautés partageant une histoire et des espaces communs. Cette fois-ci, depuis plusieurs mois, ce sont des Toubous (et non les Toubous) qui tentent vainement de prendre d’assaut la ville d’Oubari, faisant là aussi des centaines de morts ainsi que de nombreux prisonniers. Mais, ce conflit qui paraît opposer ces deux communautés n’en est pas un.

En effet comme au Niger voisin, les deux communautés ont des liens séculaires, et vivent en symbiose. Mais les mouvements Djihadistes qui sévissent en Libye, font que les différentes régions subissent l’influence et la manipulation de ces derniers, car chaque courant extrémiste veut contrôler le plus grand nombre de régions, et surtout Oubari, où les puits de pétrole attendent d’être exploites. C’est en s’appuyant sur des communautés locales, que les djihadistes tentent d’étendre leur Etat, et c’est seulement en cas d’échec qu’ils avancent eux-mêmes.

Toutes leurs tentatives de contrôler Oubari ayant échoué, ils s’appuient désormais sur des mercenaires locaux qui recrutent de nombreux « apprentis » djihadistes pour conquérir de nouveaux horizons et ensuite faire allégeance à l’Etat Islamique. Créant ainsi une confusion totale, qui risque de conduire au chaos cette partie du monde, car aucun ordre n’y règne, aucune force n ‘a encore définitivement imposé sa loi, et les alliances évoluent et changent au gré des conquêtes. Est-ce de ce chaos que voudrait profiter le G5 Sahel, et donc une partie des Etats de la CEDEAO, pour eux aussi avoir leur mot à dire dans le sud Libyen, qu’ils considèrent comme un « incubateur de terroristes ».

Cette stratégie serait ainsi une mise en œuvre de la Doctrine Française de « contre-insurrection », le but étant pour les uns (Djihadistes) comme pour les autres (G5 Sahel) de déloger les Touaregs d’Oubari, qui est considérée comme la base arrière des Djihadistes du Mali, ce qui bien évidemment est faux. Cette tentative de conquête d’Oubari par les Djihadistes, et peut-être par le G5 Sahel par procuration depuis Nouakchot, procède de la même logique que ce qui se passe dans l’Azawad, où il est de notoriété publique que Bamako arme des milices ethniques contre la CMA (Coordination des Mouvements Armés), notamment à Ménaka, où des preuves matérielles l’attestent.

Si des membres du G5-Sahel semblent se reposent sur le Gatia qui rassemble désormais tous les groupes de narcotrafiquants (Mujao, Almourabitoun, Gandakoy, Ganda-izo..) dans l’Azawad ; dans le sud Libyen, ils se serviraient de mercenaires d’origine Libyenne et Tchadienne, pour ce sombre dessein.

Et pourtant, depuis plusieurs mois, les populations du Fezzan (Arabes, Toubous et Touaregs), organisent régulièrement des manifestations socio-culturelles, pour rapprocher les deux communautés. C’est dans ce contexte que plusieurs mercenaires à la « Bob Denard », d’origine Tchadienne recrutent dans les milieux Toubous du Tchad, du Soudan, du Darfour et de Libye (Gatron, Murzouk, Sebha, Koufra …), afin de mener des offensives contre la ville d’Oubari. Il a même été fait prisonniers des combattants du SPLA (Armée Populaire de Libération du Soudan).

Certains évoquent même l’aide des renseignements Français et le soutien du dispositif Barkhane, et bien évidemment, celui des Djihadistes de Tripoli. Il est à noter que les mercenaires pris à Oubari, ne sont pas tous des Toubous, rarement de la région, mais sont de nationalités diverses, tout en reconnaissant tous être en mission commandée. Pour l’instant, les principaux recruteurs de mercenaires cités par les auditions des prisonniers, sont Issa Abdelmajid Mansour (voir photo) et Sherif Edin, les précédents étant morts lors des affrontements.

Ces deux derniers, n’ont aucun intérêt qu’un cessez-le-feu entre en vigueur ce mardi car les enjeux géostratégiques et géopolitiques dépassent de loin les aspirations des deux communautés à la Paix et la Cohésion. Et pourtant, une union Touaregs-Toubous serait un bouclier certain contre la progression de l’E.I (Etat Islamique) car ces deux communautés sont reconnues pour leur témérité au combat. Un sentiment conforté par Goukouni Weddeye, ancien Président Tchadien, Toubou, et fin connaisseur de la Libye, qui estimait récemment que « Sans les Toubous et les Touaregs, on ne pourra pas contrôler les routes du Sahara.

Une fois réconciliés et avec leur concours, on pourra à ce moment chercher à identifier où sont les terroristes et agir efficacement pour les débusquer ». Toutes choses étant égales par ailleurs, en jouant à ce jeu dangereux, le modus operandi ressemble fortement aux scenarios déjà vus en Centrafrique et au Soudan, où il a été reconnu une implication du Tchad dans ces conflits. En tout état de cause, les commanditaires, à travers le Président Idriss Deby qui financent et arment ces mercenaires, sont en train de menacer d’avantage la Paix dans le Sahel, notamment au Niger, qui serait le plus proche des foyers Djihadistes dans sa partie nord, en plus de la menace Boko-Haram déjà présente à l’Est !

C’est surtout pour le Président Deby, très contesté dans son Pays, l’occasion de se débarrasser des rebellions en gestation et qui menacent son pouvoir au Tchad, en leur confiant des missions extra nationales, d’où ils ne reviendront certainement pas (cas des troupes envoyées au Mali et contre Boko-Haram au Nigeria). C’est de cette façon qu’il est en train d’éliminer tous ses opposants aussi bien au sein de l’armée Tchadienne, que dans leurs bases arrière du Soudan, du Darfour ou de la Libye, où des milliers de rebelles tentent de s’organiser sans succès. Il est aussi question du rôle et de l’implication de la France, car du matériel pris sur les mercenaires semble d’origine Française.

De la même manière, un matériel important appartenant à la Minusma, a été saisi aux mains des milices et narcotrafiquants réunis au sein du Gatia à Menaka. Là aussi, la diversité des nationalités des victimes, traduit-elle un soutien tactique de la Minusma aux groupes terroristes, en plus d’un éventuel soutien matériel ? Quel intérêt les Etats de la sous-région et leurs partenaires, ont-ils à laisser perdurer ce conflit intercommunautaire en apparence au moment où l’E.I tend à se diriger vers le sud Libyen et le Sahel ? Les Djihadistes de l’E.I tentent-ils de faire jonction avec ceux de l’Aqmi ?

Si tel est le cas, l’Algérie, le Niger et même le Mali ont du souci à se faire, puisque une telle alliance, pourrait briser définitivement le peu de sécurité qui sévit dans cette partie du Sahara, pour ensuite gangréner toute l’Afrique de l’Ouest

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