L’allure que prennent les négociations de paix entre les protagonistes maliens, ne pousse pas à l’optimisme quant à la signature de l’accord par toutes les parties. En effet, réunies à Alger la semaine dernière, les différentes parties en conflit sont en train de se quitter sans être parvenues à la signature de l’accord de paix qui a été renvoyée au 15 mai prochain. Certains mouvements de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) ne cessent de jouer les prolongations et avec les nerfs des autres parties prenantes aux pourparlers, en l’occurrence Bamako qui a donné de la voix pour exprimer son mécontentement. En effet, le président malien, Ibrahim Boubacar Keita (IBK), n’a pas caché sa volonté de siffler la fin de la récréation et de mettre en branle le train de la réconciliation avec les passagers qui sont prêts à monter à bord, en laissant en rade les canards boiteux. « …Il y en a qui ne veulent pas signer l’accord, mais le train avancera sans eux… », a-t-il prévenu.
Cette attitude de Bamako traduit non seulement un agacement face aux tergiversations et louvoiements de ses adversaires, mais aussi la volonté des autorités maliennes de mettre fin à des négociations dont la pierre d’achoppement est bien connus de tous. En effet, pourquoi continuer à perdre du temps quand on sait que l’on n’aboutira pas à de meilleurs résultats, du fait de l’intransigeance du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) et de certains de ses alliés ? De ce point de vue, IBK a toutes les raisons de vouloir avancer, car l’on ne saurait consacrer tout le temps à des négociations sans fin. Mais l’équation malienne est tellement corsée que l’on se demande s’il a les moyens de sa politique. IBK peut-il avancer sans se faire tacler ? Bamako peut-elle si facilement mettre le MNLA et ses alliés à l’écart et espérer avancer sans accroc ? Rien n’est moins sûr quand on sait que certains de ces mouvements occupent de vastes espaces du territoire malien sur lesquels Bamako a toutes les peines du monde à exercer son autorité, mais pour lesquels elle n’est pas non plus prête à leur accorder une quelconque indépendance.
Il va falloir que chacun mette de l’eau dans son vin
Aussi se demande-t-on de quelle façon IBK compte s’y prendre, dès lors que l’on semble s’acheminer vers la fin des négociations sans le consensus tant espéré et que les pressions diplomatiques semblent aussi avoir montré leurs limites. Si fait qu’aujourd’hui, l’on n’est pas loin de l’impasse, avec un MNLA qui, même de plus en plus isolé, semble avoir pris sur lui la responsabilité de se mettre tout le monde à dos, aussi bien les médiateurs que la communauté internationale.
C’est pourquoi il faut craindre une reprise des hostilités sur le terrain. Car, cette situation de ni paix ni guerre commence à lasser ; aussi bien du côté des médiateurs que de la communauté internationale et de Bamako. Or, il y a lieu de croire que c’est fort de sa position sur le terrain, notamment à travers le contrôle de Kidal, que le MNLA se plaît à adopter le comportement réfractaire qui est le sien. Se disant que dans tous les cas, Bamako n’aura pas d’autre choix que de revenir, d’une façon ou d’une autre, à la table des négociations.
Certes, les dissensions au sein des groupes armés dont certains sont favorables à la signature des accords, sont pain bénit pour Bamako qui a là, une autre occasion de prouver la mauvaise foi des radicaux. Mais cela suffit-il à mettre ces derniers hors jeu ? L’on peut en douter car, vouloir avancer sans eux en les ignorant, ne résoudra pas le problème, alors que dans le même temps, l’on ne voit pas comment l’on pourrait les obliger à rentrer dans les rangs sans passer par les armes. C’est pourquoi l’on se demande si après cette sortie de Kankélétigui, l’on ne s’achemine pas vers une reprise des hostilités sur le terrain, d’autant plus que ragaillardi par le ralliement des groupes qui sont favorables à la signature de l’accord, IBK peut se sentir pousser des ailes. Dans ce cas, il s’agirait aussi pour Bamako, d’éviter de frustrer ses alliés, en ne leur donnant pas le sentiment que leurs voix ne comptent pas.
En tout état de cause, tout porte à croire que ce n’est pas demain la veille que les frères ennemis maliens feront la paix des braves pour enfin penser au développement de leur pays. Pourtant, il va falloir que chacun mette de l’eau dans son vin pour parvenir à un consensus. Autant alors y aller franchement, et dès maintenant.
Outélé KEITA
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