mercredi 17 février 2016

« Négrafricanisme » et racisme, par Hélène Claudot-Hawad (Le Monde diplomatique, avril 1995)

« Négrafricanisme » et racisme, par Hélène Claudot-Hawad (Le Monde diplomatique, avril 1995)

par Hélène Claudot-Hawad   

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AU Mali, les miliciens songhaïs du mouvement Ganda Koy, qui se sont autoproclamés « maîtres de la terre » (lire, ci-dessus, l’article de Philippe Baqué ) prônent ouvertement l’extermination des Touaregs et des Maures « blancs ». Dans un discours dont les accents rappellent étrangement l’antisémitisme européen, leurs tracts et manifestes stigmatisent ces « peuplades errantes, sans patrie, sans État, venues du désert en tribus minuscules » . les définissant comme des êtres transnationaux, agents des puissances étrangères, prédateurs, voleurs, asociaux, génétiquement tarés... Symboles mêmes de la barbarie, les Touaregs sont présentés comme des « esclavagistes » au prix d’une amnésie gommant les pratiques des sociétés voisines - Songhaïs, Peuls, Bambaras, Haoussas - comme de nombreuses sociétés africaines, nomades ou sédentaires.

De telles accusations permettent de rationaliser et de justifier les violences contre les Touaregs et les Maures, dans un langage qui, constamment, assimile « rebelle », « bandit » et « touareg » : « Les rebelles-bandits armés sont des racistes, des esclavagistes.... Le banditisme est l’état normal d’un Tamachek. Ils sont un corps étranger dans le tissu social. »

Les divers journaux d’opinion maliens ont largement fait écho à ces thèses discriminatoires, dont les principes essentiels se retrouvent également en un langage parfois moins débridé, mais tout aussi significatif, dans la presse nigérienne et dans les documents produits par le gouvernement du Niger pour préparer les négociations avec la rébellion. L’idée que les Touaregs représentent un stade primitif de l’humanité et (...)

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