L’Etat ne devrait plus tarder à prendre langue avec les groupes armés du Nord même s’il doit consentir des sacrifices qui ne sont pas de nature à affecter la souveraineté de notre pays. Plus le temps passe, plus la situation se corse et le camp d’en face pourrait en profiter de la plus belle des manières.
La situation dans le Nord du Mali suscite de plus en plus des interrogations. Tout semble au point mort. A l’heure qu’il est, personne ne sait réellement de quoi demain sera fait. L’on se contente d’épiloguer sur de possibles scénarios.
Dans les discours et sur le terrain, les messages sont croisés. Les personnalités qui se disent « optimistes« se prononcent ainsi en vue d’éviter des remous susceptibles d’engendrer de graves conséquences politiques. Au même moment, les « alarmistes« essaient de faire des jugements concrets de la situation sur le terrain et les manœuvres qui se trameraient loin de nos terres.
S’il y a une certitude, c’est que l’Etat du Mali et les rebelles ne regardent pas tout à fait dans la même direction et les jeux politiques ont l’air d’être prééminents. Certains actes et discours de ces dernières semaines n’ont pas manqué de convaincre les observateurs que nous sommes encore loin du résultat escompté, c’est-à-dire la souveraineté de l’Etat du Mali sur tout son territoire.
La récente visite à Bamako de 15 représentants du Conseil de sécurité de l’ONU a confirmé toute la détermination des autorités maliennes à redevenir maîtres du Septentrion comme elles le sont avec les autres parties du pays. Pour cela, le président Ibrahim Boubacar Kéita s’inscrit dans le cadre d’un dialogue « inclusif« et non dans une logique de « confrontation« . IBK souhaiterait d’abord le désarmement des groupes rebelles avant toute négociation.
Ce qui est rationnel venant du chef d’un Etat indépendant. IBK voudrait mouiller le maillot afin qu’il sorte la tête haute de ces échanges avec les activistes du Nord, surtout après les nombreux affronts faits au Mali par la faute de ces mêmes groupes armés. Cependant, l’Etat est une continuité et le Mali a signé avec les rebelles du Nord l’accord politique de Ouagadougou, le 18 juin 2013.
C’était sous le régime transitoire de Pr. Dioncounda Traoré. Dans la capitale du Burkina Faso, les deux parties avaient convenu de faire du désarmement l’un des objectifs des négociations et non un préalable. Le cantonnement des combattants des différents mouvements devaient être la première étape, comme le soutient un diplomate occidental en poste à Bamako.
Visiblement, il y a un problème d’option et d’interprétation. Nos dirigeants devraient donc faire en sorte que le Mali ne soit pas décrédibilisé ou mis en position de faiblesse face à des interlocuteurs prêts à accuser l’Etat de « mauvaise foi« à la moindre occasion.
Devant la délégation de l’ONU, les représentants des groupes rebelles ont d’ailleurs mis en avant l’accord politique de Ouaga pour soutenir qu’il n’y aurait pas de « désarmement total sans véritables négociations« . Le blocage à ce niveau est donc perceptible. Que doit-il se passer maintenant pour surmonter cet obstacle ? Faudrait-il une autre feuille de route ?
Déjouer les pièges
Pour éviter de donner plus de marge de manœuvre et l’opportunité d’une autre campagne politique contre notre pays, l’Etat malien devra proposer un plan de résolution conforme à l’accord de Ouagadougou. Consentir des sacrifices qui aideraient à mieux aborder l’avenir ne serait pas mal vu par l’opinion. Dans tous les cas, Bamako devrait faire attention étant donné que ces mouvements aux velléités sécessionnistes utiliseront tous les subterfuges pour se faire plus de crédibilité aux yeux de la communauté internationale.
La réception le 31 janvier dernier d’une délégation du MNLA par le roi Mohammed VI du Maroc donne un peu de crédit à ce Mouvement. Et tout le monde est conscient que les leaders des différents groupes rebelles du Nord sont toujours prompts à blâmer le gouvernement malien devant des interlocuteurs internationaux.
Après cette réception, le roi du Maroc aura probablement un rôle à jouer dans les négociations entre les protagonistes maliens. A ce niveau aussi se profile une autre confusion, avec un trident de négociateurs qui ne dit pas son nom : Burkina Faso, Algérie, Maroc.
Personne ne sait comment chacun contribuerait au retour de la paix au Nord si jamais tous ces pays sont disponibles à accompagner le Mali dans sa quête de solution à cette question du Nord. Déjà, l’on se demande si la « rivalité légendaire« entre le Maroc et l’Algérie, opposés depuis des décennies à cause notamment du Sahara occidental, favoriserait toute assistance de l’un ou de l’autre dans le processus de paix dans notre pays.
Le cadre et le contexte seraient plus propices aux négociations s’il y avait une authentique complicité entre la Mission des nations unies pour la stabilisation du Mali (Minusma) et le gouvernement malien. Entre les deux camps, ce n’est pas la guerre, mais les esprits se sont échauffés par moments.
Bien que son effectif n’ait pas encore atteint le nombre souhaité, la Minusma ferait mieux d’empêcher certaines dérives du MNLA et de ses acolytes, surtout si elles ont lieu au nez et à la barbe de ses soldats. Sa crédibilité et le succès de la Mission en dépendent.
Ogopémo Ouologuem
(correspondant aux USA)
Les échos
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