mardi 14 octobre 2014

Nord-Mali : Les rebelles renoncent à leur projet de fédération

Nord-Mali : Les rebelles renoncent à leur projet de fédération

Les rebelles renoncent à leur projet de fédération

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L’Algérie médiateur du dialogue inter-malien ?
Mahamadou Djeri Maiga, vice-président du MNLA et sa délégation sont à Alger pour discuter des accords de paix, le 16 juillet 2014.
AFP PHOTO/FAROUK BATICHE
La situation du nord-Mali s’éclaircit-elle enfin ? Il n’est pas interdit de le penser, même si de nombreuses questions restent sans réponse.



En effet, galvanisés par leur victoire sur l’armée malienne, le 21 mai 2014, et par la conquête de plusieurs localités du nord, les groupes armés sont venus à la table des négociations avec un esprit de domination.Ils avaient, avant l’ouverture des pourparlers d’Alger, fait savoir au président IBK, par émissaires interposés, que leur but était l’indépendance des trois régions du nord.



C’est dans cette logique qu’ils ont élaboré et déposé sur la table un projet de « traité de paix » qui prône la transformation du Mali en une fédération composée de deux Etats fédérés: celui du Mali et celui de l’Azawad. Dans notre précédente livraison, nous expliquions comment, derrière ce projet de fédération, les rebelles tentaient de cacher l’indépendance de l’Azawad. Car non seulement ils prétendaient obtenir 30% du gouvernement et la vice-présidence de la République fédérale, mais en plus, ils entendaient assurer, seuls, la défense, la sécurité, l’économie et la diplomatie de l’Azawad. Selon nos sources, les groupes armés ont tenu à publier leur projet fédéral afin de prendre l’opinion malienne et internationale à témoin: ils ne veulent surtout pas signer avec les représentants du Mali un accord ignoré du peuple malien et, pour cette raison, susceptible d’être ultérieurement remis en cause par lui. « Nous ne voulons pas faire les frais d’une politique qui consiste à signer des accords et à venir raconter autre chose au peuple afin de gouverner tranquillement le sud », note un proche des groupes armés.



Le problème, c’est qu’une fois connu, le projet fédéral a suscité des interrogations dans la communauté internationale.La marche géante organisée par la société civile malienne dans la fouléé a achevé de convaincre tout le monde que ni la fédération, ni l’indépendance ne seront acceptées par le peuple malien. De plus, la fédération suppose une modification de la Constitution malienne par voie de référendum: ce scrutin serait perdu d’avance même si IBK lui-même appelait à voter oui, ce qui relève de la fiction, le chef de l’Etat malien étant économiquement et politiquement trop fragile pour prendre un tel risque.



C’est pourquoi le médiateur algérien a demandé une levée de séance dès que les groupes armés ont exposé leur projet fédéral. Profitant de cette pause, le médiateur a tenu un huis clos avec les représentants des groupes armés pour leur dire, en substance, ceci: « La résolution 2100 du Conseil de Sécutrité de l’ONU ainsi que l’Accord de Ouagadougou imposent le respect de l’intégrité territoriale du Mali. Or une fédération implique la division du Mali en deux entités étatiques: le Mali et l’Azawad. Ce schéma n’est acceptable ni par les Maliens ni par la communauté internationale, garante de tout accord. Nous vous mettons donc en demeure de retirer ce projet et d’envisager d’autres solutions qui préserveraient à la fois l’intégrité territoriale du Mali et vos intérêts propres ! ».



Les rebelles, notamment ceux du MNLA, n’avaient pas de plan B. Ils estimaient que la fédération était le moins qu’ils pouvaient obtenir, compte tenu des rapports de force. Mais le MNLA eut beau plaider le maintien du projet fédéral, l’Algérie resta intraitable.Selon des sources proches du dossier, le puissant voisin algérien alla jusqu’à menacer le MNLA de le faire tailler en pièces par les groupes jihadistes. Message bien compris par les indépendantistes touaregs qui consentirent finalement à mettre leurs velléités fédérales sous l’éteignoir.



Pourquoi l’Algérie défend-elle si âprement l’intégrité territoriale du Mali ? L’explication tient à trois choses:

- d’abord, elle veut donner des gages de bonne foi au président IBK qui, à travers une lettre formelle, a déclaré s’en remettre à elle;



- ensuite, elle remet le MNLA à sa juste place, l’essentiel des groupes armés (les jihadistes du HCUA et d’Ançar Dine) étant très liés à Alger qui, d’ailleurs, offre le gîte et le couvert à Iyad Ag Ghali;



- Enfin, l’Algérie, après avoir rassuré le Mali et tenu en respect le MNLA, se donne les moyens d’imposer sa propre solution au problème du nord.



Ces constats ne rassurent pas certains connaisseurs du dossier. Ils estiment qu’Alger a le plus grand intérêt à maintenir la zone de Kidal ouverte aux trafics d’AQMI afin que ce groupe terroriste desserre son étau sur le sud algérien. L’entretien d’une insécurité résiduelle dans la région de Kidal n’empêchera nullement l’Algérie d’y installer sa prédominance économique, notamment à travers l’exploitation des gisements de pétrole par la SONATRACH, le méga-groupe algérien. Bref, l’Algérie ne paraît défendre l’intégrité territoriale du Mali que pour mieux assurer ses propres intérêts géostratégiques. D’autant, faut-il le rappeler, que le MNLA est une création franco-mauritanienne et que les groupes armés les plus puissants – HCUA, Ançar Dine et consorts – mangent dans la main algérienne.



En conséquence, dans l’hypothèse la plus probable, il sera instauré au nord du Mali une autonomie basée sur une grande liberté de manoeuvre des élus locaux, l’intégration des groupes armés dans l’armée nationale (même s’ils doivent rester au nord), et l’affectation de ressources financières et humaines considérables au développement du nord. Bien entendu, la solution de l’autonomie ne déplairait pas à la France qui a besoin de paix pour sécuriser ses sources d’approvisionnement en uranium (au Niger et, peut-être, demain à Kidal) et de maintenir, en collaboration avec l’Algérie, un dispositif antiterroriste au nord du Mali.



Tiékorobani

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