De vous à moi - Pourparlers d’Alger : Cassure ou passage à vide
Pourparlers d’Alger : Cassure ou passage à vide
Il n’ y aura pas eu de fumée blanche à Alger la banche. Le ministère des Affaires Etrangères le constate : « les négociations sont suspendues sans accord préliminaire ». Et Moussa Ag Assarid, un des porte-parole des groupes armés confirme également la rupture en prévoyant la possibilité d’un nouveau round de discussions pour janvier 2015. Les suspensions que les rounds initiaux ont connues étaient plus ou moins normales. Elles étaient liées à des questions de procédures ou entachées de maximalisme dont les pourparlers du genre sont coutumiers. Ces postures auxquelles toutes les parties sont habituées ne remettent jamais fondamentalement en cause l’essentiel, c’est-à-dire la nécessité de trouver un compromis. Mais l’interruption hier jeudi des pourparlers entamés en juillet dernier a de quoi inquiéter. On peut même déplorer que ce round aura été celui de la totale contre-productivité. Car il remet en cause l’investissement du médiateur et les gains escomptés des rounds précédents. Notamment pour les groupes armés. Ceux-ci auraient pu se frotter les mains si la mouture proposée par la médiation était adoptée. Mais c’était sans compter avec la mobilisation générale qu’incarne l’imam Cherif Haidara et la marche historique qu’il a initiée contre toute partition du Mali. C’était sans compter avec le branle-bas des états major politiques, de l’Urd au Pdes en passant par le Cnas qui déclarait rejeter sans réserve le document de synthèse tel que venu d’Alger lors du round précédent. C’était enfin sans compter avec le gouvernement qui a expurgé le projet initial de tout ce qui pouvait induire l’idée d’un Azawad, formellement invoqué ou subtilement évoqué. En particulier, pour le gouvernement malien, pas question d’Etat major conjoint des armées rebelle et loyaliste. Pas question, non plus, d’institutions représentant les trois régions Nord comme le proposait le texte de l’accord revu par le gouvernement et contre lequel le président Ibrahim Boubacar Keita n’a pas caché son agacement.
SOMMES-NOUS ALORS RETOURNES A LA CASE DEPART ? On ne peut pas être aussi affirmatif : l’interruption des pourparlers cette fois-ci a un air de rupture. Mais on ne voit pas comment Alger accepterait de se retirer sur ce qui, restant en l’état, constituerait un de ses plus retentissants fiascos diplomatiques. Contre toute attente et contre tous les pronostics. Car pour plus d’un observateur, le pays de Boutef est la puissance régionale dont la médiation peut le plus accélérer le règlement de la crise du septentrion malien. Au fil du temps et des enjeux , est-il possible que les groupes armés se soient émancipés des influents sécuritaires algériens dont Kidal, à défaut d’être la wilaya la plus méridionale passe, dans l’imagerie collective, pour la banlieue intermittente ? Difficile d’accepter qu’en ce novembre 2014, Alger prouve qu’il n’est pas ce déterminant qu’on redoute tant de la sécurité saharo-saharienne. Il a certainement des atouts qu’il fera jouer pour ramener autour de la table des groupes armés plus conciliants pendant que la communauté internationale, elle, réaffirme son attachement à la sauvegarde de la souveraineté et de l’intégrité territoriale du Mali. Curieusement, c’est cette communauté pourtant souvent prise à partie par l’opinion nationale qui garantit aujourd’hui l’unité et ce qu’il y a de paix et de stabilité au Nord du Mali. « Nos forces nationales de défense et de sécurité » sont encore un vœu pieux, on le sait. D’ici à ce qu’elles soient en mesure de remplir leur mission, des passants sauteront sur des mines, soldats onusiens ou officiels maliens. A Aguel Hock, le psychodrame des militaires tchadiens reprendra de temps en temps. Les règlements de compte entre les groupes armés continueront. Et le Sud du Mali continuera sans doute à considérer les jihadistes plus fréquentables que le Mnla.
Adama Thiam
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