les origines de la révolte
Touaregs à Tombouctou en 1977.PIERRE GUILLAUD / AFP
Le Sahara central et une partie du Sahel ont toujours été habités par les Touaregs. Ces grandes sociétés nomades ont toujours affirmé leur indépendance et leur liberté de mouvement sur d'immenses terrritoires désertiques. Mais l'expansion coloniale et la naissance des Etats-nations sur cet espace vont provoquer de nombreuses rébellions qui continuent de marquer l'histoire contemporaine. Retour sur les origines des premières révoltes.
Les Touaregs - le pluriel de Targui - comme on dit en arabe, se nomment eux-mêmes « Kel Tamatsheq », « ceux de langue tamasheq », ou « Kel Taggemoust », « ceux qui portent le voile ». Ce sont des peuples de culture Amazigh (Berbère) qui parlent le « tamasheq » et utilisent une écriture très ancienne appelée le « tifinagh ».
Les Touaregs, qui se disent tous descendants d’un ancêtre mythique, la reine Tin Hinan, sont organisés politiquement en confédérations (Kel Ahaggar, Kel Ajjer, Kel Aïr, Kel Adagh, Kel Tadamakkat, Kel Azawagh et Oudalan) sous la direction d’un chef, l’« amenokal ». Ces confédérations composées de plusieurs tribus, sont elles-mêmes fractionnées en plusieurs castes : les nobles guerriers (imajaghen), les vassaux (imghad), les religieux (ineslimen) et les esclaves (iklan).
Touareg, le peuple « des déserts » du Sahara
Les Touaregs sont traditionnellement des nomades, dont la sédentarisation a commencé à la seconde moitié du XXe siècle. La population globale des Touaregs est estimée, suivant les sources, de 1 à 3 millions de personnes, dont la majorité (85%) vit au Mali. Ils habitent le Sahara central et une partie du Sahel, sur un territoire qu’ils appellent « tinariwen » et qui signifie « les déserts ». Un espace de 2,5 millions de kilomètres carrés qui comprend des régions de montagnes, de plaines, de plateaux et de vallons que sont le Hoggar, le Tibesti, l’Adrar, l’Aïr, le Tanezruft, le Tademaït, le Tawat, l’Azawagh, le Tassili n’Ajjer ou le désert libyen… Un territoire qui, aujourd’hui s’étend, sur cinq pays : l’Algérie, la Libye, le Mali, le Niger et le Burkina Faso.
Dès le XIIIe siècle, les échanges économiques vont croissant entre le Maghreb au nord du Sahara et les territoires soudanais du sud et toute l’activité caravanière qui en résulte est principalement réalisée et contrôlée par les grands aristocrates touaregs, les imajeghen. Le chercheur Julien Brachet, dans Le négoce caravanier au Sahara central : histoire, évolution des pratiques et enjeux chez les Touaregs kel Aïr (Niger) paru dans les cahiers d’Outre-mer, écrit à propos des Kel Aïr qui contrôlaient les deux principales routes transsahariennes : « Ce contrôle socio-spatial concourait à définir un ensemble de territoires politiques et marchands, et participait à l’organisation des groupes ».
« À partir de la seconde moitié du XIXe siècle, un ensemble de facteurs a perturbé la tenue de ce négoce caravanier, amorçant son déclin, poursuit Julien Brachet dans son ouvrage. Les rapports sociaux de production et d’échange, les rapports de domination, ainsi que les rapports des populations à l’espace ont pour une bonne part été bouleversés… entraînant ces populations dans une situation de crise. » Ce que décrit le chercheur pour Kel Aïr vaut pour l’ensemble des groupes touaregs, qui vont être confrontés au déclin du commerce caravanier et à la colonisation du Sahara.
Ce que les Touaregs appellent « tiwta », le « désastre »
Dès 1830, la pénétration française au Sahara bouleverse profondément la société touarègue. La fin de la traite des esclaves - une activité importante qui régissait, depuis de nombreux siècles, les échanges transsahariens -, le contrôle des routes et la monétisation des échanges par exemple entraînent de profondes mutations dans la société touarègue. On assiste alors à la division des grandes confédérations touarègues et à l’apparition de multiples groupes autonomes.
« Les chefs et les aristocrates touaregs avaient conscience de l’impact que pouvait avoir l’emprise des Européens sur leurs territoires, ceux-ci leur faisant non seulement perdre le contrôle des espaces marchands qui assuraient leur prospérité et leur hégémonie , mais remettait également en cause les structures de leur organisation socio-politique, écrit le chercheur Julien Brachet. Et face à cette domination, qui remettait en cause le mode de vie des groupes touaregs, des mouvements de résistance virent le jour ».
C’est aussi à cette époque, avec la sortie en 1864 de l’ouvrage d’Henri Duveyrier intitulé Les Touareg du Nord que se développe chez les Occidentaux tout un ensemble de représentation qui vont faire du Targui, qualifié d’« homme bleu » ou de « seigneur du désert », un personnage mythique épris de liberté et de mystère. Avec la domination coloniale, les actions de résistance se multiplient et s’intensifient.
En mars 1880, le lieutenant-colonel Paul François Xavier Flatters, en charge de trouver une route pour la construction d’une ligne de chemin de fer qui aurait relié le nord de l’Algérie au Soudan, tente un premier passage dans le Hoggar mais doit faire demi-tour par manque de nourriture, face à l’hostilité des Touaregs de la région. En décembre, il monte une deuxième expédition forte de 93 hommes et de 280 animaux (chameaux, chevaux, ânes) et retente le passage.
Mais le 16 février 1881, la mission est attaquée près de Bir-el-Gharama par 600 hommes venant de trois tribus de la région, les Touaregs Hoggar, les Ouled-Sidi-Cheikh et les Senoussya et tous les membres de l’expédition sont massacrés à l’exception d’une vingtaine d’indigènes qui parviennent à regagner Ouargla. Cette histoire met un terme au projet de chemin de fer et retarde pendant une vingtaine d’années la progression des forces coloniales qui prendront Tombouctou en 1893 et In-Salah en 1900.
En 1902 à la bataille de Tit, l’armée française affronte les Touaregs du Hoggar et prend le contrôle de toutes les tribus de la région, soumettant en plus les Touaregs de l’ouest comme les Ifoghas en 1903 et les Touaregs de l’Aïr avec l’occupation d’Agadez en 1906. Cette tragédie pour les Touaregs, qui entraîne l’anéantissement de leurs forces combattantes et la destruction d’une grande partie de la société traditionnelle, porte un nom : c’est ce que les Touaregs appellent « tiwta », le « désastre », une période de chaos et de désarroi qui marque profondément l’histoire touarègue contemporaine et qui anime toujours l’esprit de nombreuses rébellions.
«Tégriwela n Kawsen », la révolution de Kawsen
La domination coloniale sur les populations du Sahara central provoque en 1916 une insurrection générale des Touaregs contre la colonisation française, menée par Kawsen, un noble touareg de la confédération guerrière des Ikazhazen de l’Aïr (massif montagneux du Nord-Niger). Kawsen, marqué par plusieurs années d’exil dans l’est du Sahara, dans les zones non contrôlées par les Français, après avoir dû abandonner l’Aïr, s’emploie à organiser la libération des Touaregs. Pour ce faire, il va faire de très gros efforts de communication, comme l’explique Hélène Claudot-Hawad dans Révolutionner l’opinion touarègue : les stratégies novatrices de Kawsen contre la colonisation du Sahara, pour fédérer ses interlocuteurs à sa cause sur des milliers de kilomètres, alors qu’il n’existe ni radio ni aucun moyen de diffusion de masse.
« Kawsen aura recours à des supports multiples : lettres, discours, messages transmis oralement, maximes, aphorismes, poésie, mode vestimentaire particulière, mise en scène théâtrale de certains de ses principes, actions spectaculaires, introduction d’objets nouveaux et usages inédits d’objets anciens, style de comportement particuliers… pour faire comprendre les principes et les enjeux de sa lutte », détaille Hélène Claudot-Hawad.
Kawsen rassemble autour de lui de nombreux résistants provenant de toutes les catégories sociales, instaure des stratégies militaires de guérilla et libère la ville d’Agadez le 13 décembre 1916. Face aux succès et à l’audace de ces combattants, les armées françaises et anglaises renforcent leurs troupes et chassent les combattants touaregs d’Agadez le 13 juillet 1917 et de l’Aïr le 25 mars 1918. Kawsen mènera encore de nombreux combats dans le Tibesti et le Fezzan et, traqué par des ennemis de plus en plus nombreux, il sera finalement tué par ses anciens alliés turcs en janvier 1919 à Gatroun, au sud de la Libye actuelle. La mort de Kawsen et la défaite des insurgés entraînent une sévère répression qui n’est jamais parvenue à effacer, notamment au Niger, la forte image de ce héros de la résistance touarègue.
Les Etats-nations du Sahara
A la fin de la période coloniale, les territoires sahariens et sahéliens des Touaregs se retrouvent sur plusieurs nouveaux Etats : la Libye (1951), le Mali (1960), le Niger (1960), la Haute-Volta (1960) et l’Algérie (1962). Pour les Touaregs, cette nouvelle division de l’espace et leur nouvelle dépendance à ces jeunes pays les marginalisent. Avec les pays du Sud Sahara par exemple, les rapports dominants-dominés sont inversés par rapport à ce qu’ils ont été dans l’histoire : les jeunes Etats sont dirigés par des ethnies qui, dans le passé, ont été victimes des Touaregs. Tout cela ne se passe pas très bien. Les Touaregs doivent se contenter d’un statut de minorité où toute forme de contestation est durement réprimée.
Au Mali, la grande révolte des Kel Adagh, ceux qui vivent dans l’Adrar des Ifoghas, de 1963 à 1964, que l’on cite souvent comme étant la première rébellion touarègue, est très violemment réprimée par l’armée de Modibo Keïta, avec le soutien du Maroc et de l’Algérie de Ben Bella. Après avoir longtemps nié la réalité de cette dissidence, le gouvernement de Bamako annonce son écrasement complet en 1964. Cette répression provoque une vaste vague d’émigration dans les pays limitrophes, principalement en Algérie et en Libye.
Ceux qui restent, survivent dans des conditions de très grande pauvreté qui deviennent dramatiques avec les grandes sécheresses de 1973-1974, puis de 1984-1986. Pour survivre, les populations sont obligées de se déplacer et perdent une grande partie de leurs troupeaux. Leur arrivée plus au sud provoque de fortes tensions avec les paysans sédentaires, beaucoup abandonnent le nomadisme et échouent dans les villes. On assiste alors à une nouvelle vague d’exode vers l’Algérie et la Libye. Cette marginalisation et ces vagues d’émigration donnent naissance à une nouvelle génération de résistants dont certains apprendront à combattre sur des terrains extérieurs en Libye, au Tchad ou au Liban.
Un dossier à suivre la semaine prochaine dans Touaregs, les rébellions
Les Touaregs, qui se disent tous descendants d’un ancêtre mythique, la reine Tin Hinan, sont organisés politiquement en confédérations (Kel Ahaggar, Kel Ajjer, Kel Aïr, Kel Adagh, Kel Tadamakkat, Kel Azawagh et Oudalan) sous la direction d’un chef, l’« amenokal ». Ces confédérations composées de plusieurs tribus, sont elles-mêmes fractionnées en plusieurs castes : les nobles guerriers (imajaghen), les vassaux (imghad), les religieux (ineslimen) et les esclaves (iklan).
Touareg, le peuple « des déserts » du Sahara
Les Touaregs sont traditionnellement des nomades, dont la sédentarisation a commencé à la seconde moitié du XXe siècle. La population globale des Touaregs est estimée, suivant les sources, de 1 à 3 millions de personnes, dont la majorité (85%) vit au Mali. Ils habitent le Sahara central et une partie du Sahel, sur un territoire qu’ils appellent « tinariwen » et qui signifie « les déserts ». Un espace de 2,5 millions de kilomètres carrés qui comprend des régions de montagnes, de plaines, de plateaux et de vallons que sont le Hoggar, le Tibesti, l’Adrar, l’Aïr, le Tanezruft, le Tademaït, le Tawat, l’Azawagh, le Tassili n’Ajjer ou le désert libyen… Un territoire qui, aujourd’hui s’étend, sur cinq pays : l’Algérie, la Libye, le Mali, le Niger et le Burkina Faso.
« À partir de la seconde moitié du XIXe siècle, un ensemble de facteurs a perturbé la tenue de ce négoce caravanier, amorçant son déclin, poursuit Julien Brachet dans son ouvrage. Les rapports sociaux de production et d’échange, les rapports de domination, ainsi que les rapports des populations à l’espace ont pour une bonne part été bouleversés… entraînant ces populations dans une situation de crise. » Ce que décrit le chercheur pour Kel Aïr vaut pour l’ensemble des groupes touaregs, qui vont être confrontés au déclin du commerce caravanier et à la colonisation du Sahara.
Caravane de sel au Niger.(CC)/Holger Reineccius/Wikipédia
Dès 1830, la pénétration française au Sahara bouleverse profondément la société touarègue. La fin de la traite des esclaves - une activité importante qui régissait, depuis de nombreux siècles, les échanges transsahariens -, le contrôle des routes et la monétisation des échanges par exemple entraînent de profondes mutations dans la société touarègue. On assiste alors à la division des grandes confédérations touarègues et à l’apparition de multiples groupes autonomes.
« Les chefs et les aristocrates touaregs avaient conscience de l’impact que pouvait avoir l’emprise des Européens sur leurs territoires, ceux-ci leur faisant non seulement perdre le contrôle des espaces marchands qui assuraient leur prospérité et leur hégémonie , mais remettait également en cause les structures de leur organisation socio-politique, écrit le chercheur Julien Brachet. Et face à cette domination, qui remettait en cause le mode de vie des groupes touaregs, des mouvements de résistance virent le jour ».
C’est aussi à cette époque, avec la sortie en 1864 de l’ouvrage d’Henri Duveyrier intitulé Les Touareg du Nord que se développe chez les Occidentaux tout un ensemble de représentation qui vont faire du Targui, qualifié d’« homme bleu » ou de « seigneur du désert », un personnage mythique épris de liberté et de mystère. Avec la domination coloniale, les actions de résistance se multiplient et s’intensifient.
En mars 1880, le lieutenant-colonel Paul François Xavier Flatters, en charge de trouver une route pour la construction d’une ligne de chemin de fer qui aurait relié le nord de l’Algérie au Soudan, tente un premier passage dans le Hoggar mais doit faire demi-tour par manque de nourriture, face à l’hostilité des Touaregs de la région. En décembre, il monte une deuxième expédition forte de 93 hommes et de 280 animaux (chameaux, chevaux, ânes) et retente le passage.
Mais le 16 février 1881, la mission est attaquée près de Bir-el-Gharama par 600 hommes venant de trois tribus de la région, les Touaregs Hoggar, les Ouled-Sidi-Cheikh et les Senoussya et tous les membres de l’expédition sont massacrés à l’exception d’une vingtaine d’indigènes qui parviennent à regagner Ouargla. Cette histoire met un terme au projet de chemin de fer et retarde pendant une vingtaine d’années la progression des forces coloniales qui prendront Tombouctou en 1893 et In-Salah en 1900.
En 1902 à la bataille de Tit, l’armée française affronte les Touaregs du Hoggar et prend le contrôle de toutes les tribus de la région, soumettant en plus les Touaregs de l’ouest comme les Ifoghas en 1903 et les Touaregs de l’Aïr avec l’occupation d’Agadez en 1906. Cette tragédie pour les Touaregs, qui entraîne l’anéantissement de leurs forces combattantes et la destruction d’une grande partie de la société traditionnelle, porte un nom : c’est ce que les Touaregs appellent « tiwta », le « désastre », une période de chaos et de désarroi qui marque profondément l’histoire touarègue contemporaine et qui anime toujours l’esprit de nombreuses rébellions.
«Tégriwela n Kawsen », la révolution de Kawsen
La domination coloniale sur les populations du Sahara central provoque en 1916 une insurrection générale des Touaregs contre la colonisation française, menée par Kawsen, un noble touareg de la confédération guerrière des Ikazhazen de l’Aïr (massif montagneux du Nord-Niger). Kawsen, marqué par plusieurs années d’exil dans l’est du Sahara, dans les zones non contrôlées par les Français, après avoir dû abandonner l’Aïr, s’emploie à organiser la libération des Touaregs. Pour ce faire, il va faire de très gros efforts de communication, comme l’explique Hélène Claudot-Hawad dans Révolutionner l’opinion touarègue : les stratégies novatrices de Kawsen contre la colonisation du Sahara, pour fédérer ses interlocuteurs à sa cause sur des milliers de kilomètres, alors qu’il n’existe ni radio ni aucun moyen de diffusion de masse.
« Kawsen aura recours à des supports multiples : lettres, discours, messages transmis oralement, maximes, aphorismes, poésie, mode vestimentaire particulière, mise en scène théâtrale de certains de ses principes, actions spectaculaires, introduction d’objets nouveaux et usages inédits d’objets anciens, style de comportement particuliers… pour faire comprendre les principes et les enjeux de sa lutte », détaille Hélène Claudot-Hawad.
Kawsen rassemble autour de lui de nombreux résistants provenant de toutes les catégories sociales, instaure des stratégies militaires de guérilla et libère la ville d’Agadez le 13 décembre 1916. Face aux succès et à l’audace de ces combattants, les armées françaises et anglaises renforcent leurs troupes et chassent les combattants touaregs d’Agadez le 13 juillet 1917 et de l’Aïr le 25 mars 1918. Kawsen mènera encore de nombreux combats dans le Tibesti et le Fezzan et, traqué par des ennemis de plus en plus nombreux, il sera finalement tué par ses anciens alliés turcs en janvier 1919 à Gatroun, au sud de la Libye actuelle. La mort de Kawsen et la défaite des insurgés entraînent une sévère répression qui n’est jamais parvenue à effacer, notamment au Niger, la forte image de ce héros de la résistance touarègue.
Les Etats-nations du Sahara
A la fin de la période coloniale, les territoires sahariens et sahéliens des Touaregs se retrouvent sur plusieurs nouveaux Etats : la Libye (1951), le Mali (1960), le Niger (1960), la Haute-Volta (1960) et l’Algérie (1962). Pour les Touaregs, cette nouvelle division de l’espace et leur nouvelle dépendance à ces jeunes pays les marginalisent. Avec les pays du Sud Sahara par exemple, les rapports dominants-dominés sont inversés par rapport à ce qu’ils ont été dans l’histoire : les jeunes Etats sont dirigés par des ethnies qui, dans le passé, ont été victimes des Touaregs. Tout cela ne se passe pas très bien. Les Touaregs doivent se contenter d’un statut de minorité où toute forme de contestation est durement réprimée.
Au Mali, la grande révolte des Kel Adagh, ceux qui vivent dans l’Adrar des Ifoghas, de 1963 à 1964, que l’on cite souvent comme étant la première rébellion touarègue, est très violemment réprimée par l’armée de Modibo Keïta, avec le soutien du Maroc et de l’Algérie de Ben Bella. Après avoir longtemps nié la réalité de cette dissidence, le gouvernement de Bamako annonce son écrasement complet en 1964. Cette répression provoque une vaste vague d’émigration dans les pays limitrophes, principalement en Algérie et en Libye.
Ceux qui restent, survivent dans des conditions de très grande pauvreté qui deviennent dramatiques avec les grandes sécheresses de 1973-1974, puis de 1984-1986. Pour survivre, les populations sont obligées de se déplacer et perdent une grande partie de leurs troupeaux. Leur arrivée plus au sud provoque de fortes tensions avec les paysans sédentaires, beaucoup abandonnent le nomadisme et échouent dans les villes. On assiste alors à une nouvelle vague d’exode vers l’Algérie et la Libye. Cette marginalisation et ces vagues d’émigration donnent naissance à une nouvelle génération de résistants dont certains apprendront à combattre sur des terrains extérieurs en Libye, au Tchad ou au Liban.
Un dossier à suivre la semaine prochaine dans Touaregs, les rébellions
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