gouvernement et les groupes armés peinent à démarrer : « La fédération de deux entités » proposée par les séparatistes fait craindre le pire
Cela fait plusieurs jours qu’on l’annonce sans qu’elle ait réellement lieu. En effet, à Alger, tout le monde est dans l’expectative avant le démarrage effectif des négociations directes entre le gouvernement malien et les groupes armés du nord. Initialement prévues le vendredi dernier à la fin de l’audition de la société civile, première étape de la deuxième phase des pourparlers inclusifs inter-Maliens d’Alger, ces négociations pourraient être officiellement lancées dès ce lundi 15 septembre. Toutefois, ce qui domine l’actualité à Alger, c’est surtout le protocole d’entente signé par plusieurs mouvements armés, le samedi 13 septembre. Dans ce document, ils réclament » une fédération de deux entités » pour former le nouvel Etat malien. Une prétention rejetée par d’autres mouvements considérant qu’elle remet en cause l’intégrité territoriale du Mali, en violation des résolutions de l’ONU, de l’Accord de Ouagadougou et de la feuille de route signée le 24 juillet dernier à Alger. S’y ajoute que le strict respect de cette intégrité territoriale du Mali est l’une des lignes rouges à ne pas franchir fixées par le gouvernement à ses négociateurs.
Ce que beaucoup de gens redoutaient le plus s’est produit. Dans le cadre de la seconde phase des pourparlers inter-Maliens d’Alger lancée le 1er septembre dernier, certains groupes armés ont bel et bien franchi le Rubicon en réclamant, dans un protocole d’entente signé le samedi 13 septembre dernier, » un statut politique et institutionnel pour l’Azawad à travers un système fédéral « . Ce document, même s’il n’a pas été officiellement transmis à la médiation chapeautée par l’Algérie, a été signé par le camp qui a toujours prôné le séparatisme, en l’occurrence la coordination des mouvements de l’Azawad regroupant le MNLA, le HCUA et le MAA-dissident, soutenue par la CM-FPR2 de Ibrahim Abba Kantao et le MPSA.
Parmi les signataires, on retrouve étrangement certains membres de la plateforme d’Alger – présentés comme proches des autorités maliennes – comme la CPA de l’ex-député de Bourem, Ibrahim Ag Assaleh (transfuge du MNLA) et surtout le MAA-loyaliste. Cependant, après avoir constaté que la majorité de sa base désapprouve totalement cette initiative et prône surtout un Etat unitaire, ce dernier mouvement a revu sa position en rendant publique une déclaration pour annoncer son retrait de ce protocole d’entente. Finalement, parmi les membres de la plateforme d’Alger, seule la CPA a rejoint le groupe des séparatistes.
Dans la soirée du samedi 13 septembre, la CM-FPR de Harouna Toureh, le MAA-loyaliste et le GATIA ont fait une déclaration pour dénoncer cette attitude de l’autre camp qui, à leurs yeux, sape les accords précédents ainsi que la feuille de route du 14 juillet dernier. Pour eux, il s’agirait d’une manœuvre dilatoire destinée à remettre en cause l’intégrité territoriale du Mali, l’unité nationale, le caractère laïc et la forme républicaine de l’Etat. Ce, alors qu’il s’agit là de lignes rouges tracées par le gouvernement malien et contenues dans les accords précédents, en particulier celui de 18 juin 2013 signé à Ouagadougou. Ils ont ainsi demandé à » ceux qui ne voulaient pas de ces points de quitter la table des négociations « . Ils ont également dénoncé cette volonté visant à faire une partition du pays avant d’indiquer que leur groupe continuera de travailler pour l’unité du Mali.
Selon une source contactée par nos soins, ce document n’est encore qu’une proposition. Il appartient au gouvernement et aux groupes qui le soutiennent de faire une contre-proposition afin de lui faire échec. Il convient de rappeler que ce nouveau document des séparatistes s’inscrit dans le même esprit que celui dont le quotidien L’Indépendant s’était fait l’écho dans plusieurs de ses parutions. Il aurait été même remis aux autorités de Bamako ainsi qu’aux différentes parties prenantes aux discussions inter-Maliennes d’Alger. Il prévoit notamment : » une administration propre de l’Azawad, une assemblée régionale commune faisant office de parlement azawadien dont l’objectif est de faire des propositions de loi dans tous les domaines au parlement national, un système judiciaire de l’Azawad, le pouvoir de signer des accords régionaux et internationaux, celui d’exploiter les ressources minières et minérales de la zone. La future entité siégera au sein des instances de l’Union africaine. Au même titre que l’Etat malien « .
Il est donc clair que les séparatistes n’ont jamais réellement abandonné leur volonté de partitionner le Mali, ce qui montre clairement leur mauvaise foi vis-à-vis des accords antérieurs, de la feuille de route d’Alger de juillet 2014 et même de la résolution 2164 adoptée le 25 juin précédent par le Conseil de Sécurité de l’ONU prévoyant le renouvellement d’un an du mandat de la MINUSMA.
Pour l’heure, la médiation algérienne multiplie les actions afin que ces pourparlers n’aboutissent pas à un échec et aboutissent plutôt à un accord de paix. Mais reste à savoir si face à ces positions tranchées, les négociations pourront être sauvées. Il faut préciser que le gouvernement malien entre dans ces pourparlers diminué par les récentes conquêtes des groupes armés séparatistes qui discutent en position de force.
Des absences que le gouvernement pourrait amèrement regretter
Par ailleurs, certains ont aussi dénoncé le fait que – comme à la phase initiale des pourparlers – les autorités maliennes ont écarté plusieurs personnalités de poids ayant une parfaite connaissance de la question du septentrion malien. C’est le cas notamment de l’ancien ministre de l’Intérieur sous la transition et actuel directeur de l’Ecole de maintien de la paix Alioune Blondin Bèye à Bamako, le Général Moussa Sinko Coulibaly, qui est signataire de l’accord préliminaire de Ouaga. Il y a également le président du parti PARENA, Tiébilé Dramé, qui avait dirigé la délégation malienne des discussions ayant conduit à la signature de cet accord.
D’autres experts sur la question comme les ex-premiers ministres Ousmane Issoufi Maïga et Ahmed Ag Hamani ou encore le président du Haut Conseil des collectivités territoriales du Mali, Oumarou Ag Mohamed Ibrahim, ont été ignorés. C’est aussi valable pour le leader du MPR et actuel président de l’AMRTP, Choguel Kokala Maïga ainsi que l’honorable Mme Haïdara Aïssata Cissé, députée de Bourem. On ignore ce que le gouvernement leur reproche, mais ces personnalités pouvaient peser de façon considérable dans ces discussions. L’absence des chefs de tribus et fractions touareg, traditionnellement attachés à l’unité du Mali, a été aussi une faute commise par ceux qui ont eu la responsabilité de composer la délégation officielle malienne à ces pourparlers. Reste à savoir si ces absences de taille ne feront pas regretter au gouvernement son attitude de bunkérisation et de repli sur soi.
En tout cas, une chose est sûre : le peuple malien, dans sa grande majorité, qui suit de près le déroulement de ces pourparlers, n’acceptera pas un résultat autre que celui garantissant le respect de l’intégrité territoriale du Mali et de son unité dans la diversité.
Massiré DIOP
Envoyé spécial à Alger
Ce que beaucoup de gens redoutaient le plus s’est produit. Dans le cadre de la seconde phase des pourparlers inter-Maliens d’Alger lancée le 1er septembre dernier, certains groupes armés ont bel et bien franchi le Rubicon en réclamant, dans un protocole d’entente signé le samedi 13 septembre dernier, » un statut politique et institutionnel pour l’Azawad à travers un système fédéral « . Ce document, même s’il n’a pas été officiellement transmis à la médiation chapeautée par l’Algérie, a été signé par le camp qui a toujours prôné le séparatisme, en l’occurrence la coordination des mouvements de l’Azawad regroupant le MNLA, le HCUA et le MAA-dissident, soutenue par la CM-FPR2 de Ibrahim Abba Kantao et le MPSA.
Parmi les signataires, on retrouve étrangement certains membres de la plateforme d’Alger – présentés comme proches des autorités maliennes – comme la CPA de l’ex-député de Bourem, Ibrahim Ag Assaleh (transfuge du MNLA) et surtout le MAA-loyaliste. Cependant, après avoir constaté que la majorité de sa base désapprouve totalement cette initiative et prône surtout un Etat unitaire, ce dernier mouvement a revu sa position en rendant publique une déclaration pour annoncer son retrait de ce protocole d’entente. Finalement, parmi les membres de la plateforme d’Alger, seule la CPA a rejoint le groupe des séparatistes.
Dans la soirée du samedi 13 septembre, la CM-FPR de Harouna Toureh, le MAA-loyaliste et le GATIA ont fait une déclaration pour dénoncer cette attitude de l’autre camp qui, à leurs yeux, sape les accords précédents ainsi que la feuille de route du 14 juillet dernier. Pour eux, il s’agirait d’une manœuvre dilatoire destinée à remettre en cause l’intégrité territoriale du Mali, l’unité nationale, le caractère laïc et la forme républicaine de l’Etat. Ce, alors qu’il s’agit là de lignes rouges tracées par le gouvernement malien et contenues dans les accords précédents, en particulier celui de 18 juin 2013 signé à Ouagadougou. Ils ont ainsi demandé à » ceux qui ne voulaient pas de ces points de quitter la table des négociations « . Ils ont également dénoncé cette volonté visant à faire une partition du pays avant d’indiquer que leur groupe continuera de travailler pour l’unité du Mali.
Selon une source contactée par nos soins, ce document n’est encore qu’une proposition. Il appartient au gouvernement et aux groupes qui le soutiennent de faire une contre-proposition afin de lui faire échec. Il convient de rappeler que ce nouveau document des séparatistes s’inscrit dans le même esprit que celui dont le quotidien L’Indépendant s’était fait l’écho dans plusieurs de ses parutions. Il aurait été même remis aux autorités de Bamako ainsi qu’aux différentes parties prenantes aux discussions inter-Maliennes d’Alger. Il prévoit notamment : » une administration propre de l’Azawad, une assemblée régionale commune faisant office de parlement azawadien dont l’objectif est de faire des propositions de loi dans tous les domaines au parlement national, un système judiciaire de l’Azawad, le pouvoir de signer des accords régionaux et internationaux, celui d’exploiter les ressources minières et minérales de la zone. La future entité siégera au sein des instances de l’Union africaine. Au même titre que l’Etat malien « .
Il est donc clair que les séparatistes n’ont jamais réellement abandonné leur volonté de partitionner le Mali, ce qui montre clairement leur mauvaise foi vis-à-vis des accords antérieurs, de la feuille de route d’Alger de juillet 2014 et même de la résolution 2164 adoptée le 25 juin précédent par le Conseil de Sécurité de l’ONU prévoyant le renouvellement d’un an du mandat de la MINUSMA.
Pour l’heure, la médiation algérienne multiplie les actions afin que ces pourparlers n’aboutissent pas à un échec et aboutissent plutôt à un accord de paix. Mais reste à savoir si face à ces positions tranchées, les négociations pourront être sauvées. Il faut préciser que le gouvernement malien entre dans ces pourparlers diminué par les récentes conquêtes des groupes armés séparatistes qui discutent en position de force.
Des absences que le gouvernement pourrait amèrement regretter
Par ailleurs, certains ont aussi dénoncé le fait que – comme à la phase initiale des pourparlers – les autorités maliennes ont écarté plusieurs personnalités de poids ayant une parfaite connaissance de la question du septentrion malien. C’est le cas notamment de l’ancien ministre de l’Intérieur sous la transition et actuel directeur de l’Ecole de maintien de la paix Alioune Blondin Bèye à Bamako, le Général Moussa Sinko Coulibaly, qui est signataire de l’accord préliminaire de Ouaga. Il y a également le président du parti PARENA, Tiébilé Dramé, qui avait dirigé la délégation malienne des discussions ayant conduit à la signature de cet accord.
D’autres experts sur la question comme les ex-premiers ministres Ousmane Issoufi Maïga et Ahmed Ag Hamani ou encore le président du Haut Conseil des collectivités territoriales du Mali, Oumarou Ag Mohamed Ibrahim, ont été ignorés. C’est aussi valable pour le leader du MPR et actuel président de l’AMRTP, Choguel Kokala Maïga ainsi que l’honorable Mme Haïdara Aïssata Cissé, députée de Bourem. On ignore ce que le gouvernement leur reproche, mais ces personnalités pouvaient peser de façon considérable dans ces discussions. L’absence des chefs de tribus et fractions touareg, traditionnellement attachés à l’unité du Mali, a été aussi une faute commise par ceux qui ont eu la responsabilité de composer la délégation officielle malienne à ces pourparlers. Reste à savoir si ces absences de taille ne feront pas regretter au gouvernement son attitude de bunkérisation et de repli sur soi.
En tout cas, une chose est sûre : le peuple malien, dans sa grande majorité, qui suit de près le déroulement de ces pourparlers, n’acceptera pas un résultat autre que celui garantissant le respect de l’intégrité territoriale du Mali et de son unité dans la diversité.
Massiré DIOP
Envoyé spécial à Alger
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