maliweb.net - Mahamadou Djeri Maiga à bâton rompu : "Le gouvernement a signé le partage du pouvoir"
« Le gouvernement a signé le partage du pouvoir »
Sur le comité de suivi de l’accord, la question des ministères dédiés aux groupes
armés, les mesures de confiance, la libération des prisonniers civils et militaires, le vice-président de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), Mahamadou Djeri Maïga à bâtons rompus.
A la signature du 20 juin dernier de l’accord, Bilal Ag Cherif était absent, il se dit qu’il est contre l’accord. Est-ce qu’au sein de la CMA et du MNLA, il y a des divergences ?
Dès que je suis quelque part, Bilal y est. Mais tout le monde était là. Pourquoi les gens posent la question ? Bilal avait une très bonne volonté de venir, mais Dieu seul sait qu’il était malade ce jour-là. Il était très malade, c’est pourquoi, il n’a pas pu faire le déplacement. Cela ne veut pas dire qu’il n’est pas avec nous. Bien au contraire. La CMA, vous le constaterez, c’est une seule personne qui signe en son nom. Ce qui montre notre unité et on va encore la renforcer. Après la fête de ramadan, il y aura une très grande rencontre pour prouver que nous sommes un seul grand bloc. Ça ne sera jamais deux ou trois.
Le comité de suivi tarde à se mettre en place, comment se porte-t-il à votre avis ?
Nous avons voulu mettre en place la commission, mais il y a eu des contraintes. Donc on l’a reporté au 20 de ce mois. Des consultations sont en vue et tout le monde est animé de la bonne volonté de faire la paix. Je pense que cela ne fait pas l’ombre d’aucun doute.
Quelles sont les raisons de la suspension des travaux ont du comité de suivi ?
Les travaux ont été suspendus parce que de notre côté il y a eu le problème de la représentativité. Si vous lisez l’accord, il définit les signataires comme étant ceux qui ont signé la feuille de route. Et nous avons toujours dit que pour ne pas créer de problème, il faut se référer à l’accord. L’accord énumère les parties, le regroupement de la CMA, la Plateforme et le gouvernement. Tous ceux qui ne se trouvent pas dans ces regroupements n’existent pas. Dans la salle, des gens ont demandé au gouvernement de dire sa politique, comment il envisage de mettre l’accord en œuvre. Nous pensons que c’est des choses qui concernent la médiation. C’est un problème de représentativité.
A quel niveau vous en êtes sur les questions relatives au DDR, à humanitaire et au judiciaire ?
Nous pensons qu’il faut faire la paix, mais la paix ne peut pas empêcher les poursuites judiciaires. On avait demandé la mise en place d’une commission d’enquête internationale qui enquêtera sur des crimes qui ont été commis de part et d’autre de 1960 à nos jours
Donc celui que la commission va inculper répondra de ses actes. Sur les questions humanitaires, nous avons signé l’accord, nous avons dit qu’il y a une urgence. Aujourd’hui, il faudrait aider les couches les plus fragiles non seulement sur le terrain, mais partout au Mali. Il y a des prisonniers qui ont été pris non pas du fait de la guerre, mais dans les marchés. Ceux-ci remplissent les prisons de Bamako. Il faudrait les libérer.
De notre côté, les militaires que nous avons, nous les libérerons. Car, ils sont nos frères. Vous allez les voir, ils sont dans toutes les conditions, il n’y a aucun problème de leurs côtés. Nous avons montré à la population que nous sommes dans la voie de la paix. Nous devons libérer tous les prisonniers. En tout cas, ceux qui se sont fait prisonniers sous les contraintes de la guerre doivent être libérés. S’il y a d’autres qui ont été pris dans le cadre du terrorisme, on ne peut pas intervenir dedans.
Justement, par rapport à ces questions, vous êtes à quel niveau avec le gouvernement malien ?
Nous sommes de bonne mèche avec le gouvernement. On a rencontré les ministres Konaté et Ould Zahabi, nous parlons le même langage. Vraiment, ils ont la volonté de faire la paix et nous aussi. Je pense que la paix sera une réalité.
Quelle analyse faites-vous des dernières attaques qui ont visé des casques bleus à Tombouctou ?
Nous disons qu’il urge qu’on fasse une application stricte de l’accord. Parce qu’il y a beaucoup de gens qui ne veulent pas la paix et ce n’est pas tout le monde qui a signé non plus. Il y a des mouvements obscurantistes qui n’ont pas signé l’accord et qui ne le signeront jamais.
Il faut que le gouvernement sache qu’il y a une urgence sur le terrain et qu’il faut appliquer l’accord à la lettre. Une fois que l’accord est appliqué, on aura la solution à tous ces problèmes. Les gens font les mouvements sur le terrain et quand on va commencer à appliquer l’accord, leurs marges de manœuvres seront réduites. Nous sommes victimes et disons que les forces obscurantistes profitent du désordre.
Par rapport aux mesures de confiance, ce qu’on appelle l’arrangement sécuritaire, deux villes sont stratégiques, Kidal et Ménaka. Dans un communiqué, vous dénoncez le fait que l’armée se déplace. Dites-nous, réellement ce qui se passe aujourd’hui sur le terrain ?
Lors des événements du 21 mai qui ont vu des affrontements entre nous et l’armée malienne à Kidal, il y a eu le cessez-le-feu du 23 mai qui a été signé sous l’égide du président mauritanien. Ce cessez-le-feu confère à chaque partie une position.
On a demandé à chaque partie de garder ces positions jusqu’à l’aboutissement de l’accord. Et c’est le cessez-le-feu qui fait de Ménaka une position de la CMA. Donc on a été attaqué à la veille où on a donné la lettre à Mongi Handi afin de lui manifester notre bonne volonté d’aller parapher. Et à chaque fois qu’on se met dans une logique de paix, on demande aux gens de dégarnir.
Nos gens ont laissé leurs positions et à notre grande surprise, elles ont été récupérées par la Plateforme. Donc à Alger, le 5 juin, nous avons signé l’arrangement sécuritaire. Il a été demandé que la Plateforme quitte Ménaka et retourne dans ses positions initiales et que l’armée retourne dans le camp de la Minusma.
Nos forces qui étaient à Ménaka doivent partir à une vingtaine kilomètres de la ville pour laisser la sécurisation de la ville à la Minusma et à Barkhane. C’est l’application de l’arrangement sécuritaire que nous demandons. Si on ne parvient pas à l’appliquer, ce n’est pas l’accord qu’on pourra appliquer. C’est la responsabilité de la communauté internationale qui est engagée. Ce n’est ni la Plateforme ni la CMA, ce sont le gouvernement et la communauté internationale.
S’ils n’arrivent pas l’appliquer, nous aurons de sérieux problèmes dans l’application de l’accord lui-même. Son application nous facilite la tâche parce qu’on peut mettre en place tout de suite des patrouilles mixtes. Des patrouilles dans lesquelles il y a la Plateforme, la CMA et le gouvernement. Ce qui va créer une symbiose entre les forces sur le terrain et cela montrera qu’on est ensemble. Mais il faudrait d’abord respecter les engagements pris au préalable. Même si c’est 24 heures, il faut les respecter pour donner la chance à l’accord.
Récemment, un responsable de la CMA réclamait des portefeuilles ministériels de souveraineté ? Est-ce vrai que la CMA fait de cela un préalable pour l’aboutissement de l’accord ?
Nous n’avons jamais fait de ça un préalable pour l’accord. On a demandé un partage de pouvoir. Il y a les portefeuilles ministérielles, on est des Maliens aussi, on a signé l’accord, on veut la paix. Donc, il faudrait qu’on nous voie à l’œuvre pour savoir si ce que nous sommes en train de dire est vrai ou faux. Ce n’est pas un préalable mais une manière de partager le pouvoir. Il faut qu’on est des représentants dans les ministères, des chancelleries et dans les ambassades.
La CMA a-t-elle demandé des ministères spécifiques ?
Nous n’avonspas spécifié de ministères, nous avons dit seulement qu’il faut qu’on discute avec le gouvernement par rapport au partage du pouvoir et le gouvernement l’a accepté et signé. Nous avons signé et la communauté internationale l’a signé.
En tant que vice-président du MNLA et de la CMA, est-ce qu’il y a un espoir pour la paix au Mali ?
J’ai beaucoup d’espoir, si je n’avais pas espoir, je ne signe pas même si tu fais descendre le tonnerre. Si tu vois qu’on a signé cet accord, c’est parce qu’on pense que si on applique cet accord à la lettre le Mali aura non seulement la paix mais il sera le pays le plus sécurisé de la sous-région. Tout dépend de la volonté des uns et autres. Même si nous avons fait des réserves par exemple sur la problématique de l’Azawad, on nous a dit que c’est une question politique qui doit être réglée politiquement. C’est au gouvernement de créer les mécanismes pour aborder cette question afin d’aboutir à une solution définitive.
Réalisé par Alpha Mahamane Cissé
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