lundi 3 juin 2013

ACCORD ENTRE LE MNLA ET LE HCA - Les Editions Le Pays

ACCORD ENTRE LE MNLA ET LE HCA - Les Editions Le Pays
Bamako ne doit plus se faire d’illusionsPublié le dimanche 2 juin 2013Page visitée 12 fois


Qu’est-ce que la diplomatie ? Exercice ardu, puisqu’il est tout sauf une science. La diplomatie est un art qui exige ruse, patience et discrétion. Elle est aussi l’art de contenir la force, et une loi cardinale en diplomatie est d’écouter le point de vue de l’adversaire, voire de l’ennemi le plus détestable.

Avec les négociations de Ouagadougou qui se tiennent depuis une semaine, sous l’égide du médiateur de la CEDEAO, le président Blaise Compaoré, entre les mouvements touaregs du Nord-Mali, et le représentant spécial de l’Etat malien, Tiébilé Dramé, tout le monde a salué cette volonté et cette stratégie de dialogue. Car dans la vie des individus comme dans celle des Etats, il est toujours regrettable de ne pas chercher à se mettre à la place de l’autre. Et, le recours à la force, quoi qu’on puisse en dire, est et sera toujours considéré comme un échec de la politique. Bref, prévenir une nouvelle guerre civile, au Mali, notamment entre l’armée nationale malienne et les mouvements et groupuscules du Nord-Mali, telle était la priorité de la médiation burkinabè. Mais à l’heure actuelle, on ne peut pas dire que les résultats de cette médiation qui viennent d’être rendus publics, déclencheront l’enthousiasme dans la rue bamakoise encore moins chez les autorités du Mali. En vérité, nous venons d’assister à ce qu’il faut bien nommer un revers pour la diplomatie burkinabè. Pourquoi ? Tentons de comprendre. A Ouagadougou, on peut dire que le seul point positif de la médiation burkinabè, c’est d’avoir réussi à convaincre le MNLA et le Haut conseil de l’Azawad (HCA) de parler d’une seule voix, de trouver un langage commun. L’union, l’entente proclamée entre ces deux entités touarègues, permettent d’éviter le spectre de la « babélisation » de la crise malienne. Mais, à travers cet accord qui scelle leur union sacrée, on note également que l’autre point positif est l’engagement pris par le MNLA et le HCA de sécuriser les régions du Nord en luttant efficacement contre le narco-terrorisme. Cela dit, très vite, les dirigeants de ces structures touarègues ont renoué avec leur sport favori : l’incohérence et l’irresponsabilité politiques. En déclarant, avec véhémence, qu’ils s’opposent à tout déploiement de l’armée malienne, non plus à Kidal, mais sur ce qu’ils appellent « tout le territoire de l’Azawad », le MNLA et le HCA viennent de déclarer une véritable guerre à l’Etat souverain et indivisible du Mali. Car, à travers leurs déclarations, ces deux entités touarègues insistent lourdement sur un point, à savoir que le statut de leur prétendu « territoire de l’Azawad » est tout, sauf objet de négociation. De surcroît, elles exigent que les forces onusiennes de la Misma sécurisent les élections au Nord-Mali, et non l’armée malienne. Telle est la stratégie météorologique du MNLA et du HCA qui ne contribue qu’à ridiculiser la médiation burkinabè. A l’image du sable désertique, les dirigeants du MNLA et du HCA sont versatiles, et ils ont réussi à cacher au médiateur leur stratégie occulte, basée sur la logique de la confiscation d’une partie du territoire malien, logique qui ne peut conduire inéluctablement qu’à la triste perspective d’un affrontement armé et destructeur. Le MNLA et le HCA ont choisi d’empêcher la tenue des élections prévues pour le 28 juillet prochain sur tout le territoire malien. L’espoir d’un accord crédible entre Bamako et les mouvements dits représentatifs de « la cause touarègue » paraît, désormais, déraisonnable. Ces mouvements croient que le Mali est une jungle où n’importe qui peut appliquer sa loi et dicter sa violoné à l’Etat. Ils veulent « créer » non pas un « Etat », mais au sein du Mali, une zone de chaos, dans laquelle le MNLA et le HCA continueraient leur entreprise de sous-traitance terroriste avec la canaille djihadiste. Ces deux structures misent sur un effondrement total de l’Etat national souverain du Mali, en entraînant ce pays dans une guerre civile interminable. Or, l’Etat est vital pour la défense de la paix sur tout le territoire malien ; une paix qui ne peut être durable et solide que si elle repose sur des institutions démocratiques et un régime légitime. La démocratie et les institutions démocratiques sont fermement liées à l’intégrité totale du territoire national. Et, l’armée malienne, malgré sa puissance un peu déclinante, reste une institution nationale que personne ne saurait défier. Se déployer au Nord-Mali constitue pour cette armée, une question de vie ou de mort. Il est totalement faux, comme le laisse supposer la novlangue totalitaire du MNLA et du HCA, basée sur la duperie et l’escroquerie intellectuelle que les populations du Nord-Mali seraient hostiles à l’exercice effectif de l’autorité souveraine de l’Etat malien.

L’accord entre le MNLA et le HCA représente un cauchemar politique pour le Mali, et il souligne une fois de plus, la dangerosité de ces deux structures. Car rien ne semble restreindre les velléités et ambitions sécessionnistes. Avec un tel accord, l’avenir du Mali, après la fin de l’occupation djihadiste, pourrait s’avérer pire encore. C’est pourquoi pour Bamako, il est urgent de prendre conscience de l’échec absolu de la médiation burkinabè et surtout de changer de stratégie. Certes, le président Compaoré a engrangé quelques réussites dans la résolution de certaines crises africaines. Mais avec la crise malienne, très tôt, nous avions dit que, pour lui, c’était la médiation de trop.

Militairement et politiquement, Bamako ne peut accepter certains points de l’accord entre le MNLA et le HCA. Et, très sérieusement, la confrontation armée est inéluctable avec ces deux mouvements qui rêvent de détruire l’Etat malien. Leur conception de l’unité du Mali est celle d’un pays balkanisé, en proie au chaos et à l’anarchie. Et leur soi-disant « Etat de l’Azawad », fondé exclusivement sur une prétendue identité raciale, s’annonce comme un Etat raciste, ségrégationniste et fasciste. De nos jours, après les expériences totalitaires du XXe siècle, toute conception raciste de l’Etat n’a plus droit de cité dans la nouvelle humanité en construction. Cet accord entre le MNLA et le HCA pèche par son irréalisme et son fanatisme politiques. Restaurer la loi et l’ordre sur tout le territoire malien, signifie pour Bamako, rétablir la légitimité démocratique. En durcissant subitement, et le ton, et leur position, à l’issue de ces négociations de la dernière chance, à Ouagadougou, le MNLA et le HCA cherchent à faire naître un ressentiment entre Maliens. Ces deux structures ne laissent plus le choix aux autorités de Bamako : obéissant aux ordres du pouvoir de transition, l’armée va régler la question de la confiscation du Nord-Mali créée par le MNLA et le HCA. Certes, cette option militaire peut s’avérer destructrice et coûteuse en vies humaines, politiquement risquée, mais elle est inéluctable. Attendre, négocier indéfiniment n’est pas du tout une politique saine, surtout qu’on est face à des mouvements intrinsèquement dangereux et dont le pouvoir de nuisance ne peut être contenu que par la force. Pour Bamako, c’est la fin du royaume des illusions. Et, si cette confrontation devrait avoir lieu, c’est parce que le MNLA, le HCA et leurs soutiens occultes l’auront voulue, puisqu’ils n’ont rien fait pour l’éviter. L’Etat souverain et indivisible du Mali, ne peut pas, sans commettre son propre suicide, accepter un tel accord, un véritable péril pour l’avenir du pays.

Oui, avec Robert Cooper, il est bon de rappeler que, « quand la diplomatie n’a pas pour mission d’éviter la guerre, il lui incombe de choisir la bonne guerre, le bon moment et les bons alliés ». Les conditions optimales pour une solution politique et pacifique au Nord-Mali ne sont plus réunies. Le peuple malien doit se préparer, de nouveau, à une longue attente. Son avenir ne peut plus continuer à dépendre du bon vouloir du MNLA et du HCA.
« Le Pays »

Aucun commentaire: