lundi 10 juin 2013

NEGOCIATIONS INTER- MALIENNES - Les Editions Le Pays

NEGOCIATIONS INTER- MALIENNES - Les Editions Le Pays
Le médiateur demande d’abord l’arrêt des hostilités
Publié le lundi 10 juin 2013

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Les négociations inter- maliennes pour le retour de la paix ont débuté le 8 juin 2013 dans la salle polyvalente du palais de Kosyam à Ouagadougou. A la cérémonie d’ouverture, il y avait, face au médiateur de la CEDEAO Blaise Compaoré, la délégation malienne conduite par le
représentant spécial du président par intérim du Mali, l’ancien ministre des Affaires étrangères, Tiébilé Dramé, accompagné d’une dizaine de personnes, de la délégation de la coordination du MNLA et du Haut conseil pour l’unité de l’Azawad avec une quarantaine de membres. Les pourparlers se dérouleront dans cette configuration si rien ne change à la dernière minute. Dans sa déclaration tenant lieu de lancement des pourparlers, le médiateur Blaise Compaoré souhaite que les différents groupes déposent les armes afin de préserver l’intérêt des populations et de garantir un retour serein à la paix au Mali.

C’est parti pour les négociations inter-maliennes sous l’égide de la médiation de la CEDEAO conduite par le président du Faso, Blaise Compaoré. Initialement prévue pour le 7 juin 2013, c’est finalement le lendemain que la cérémonie de lancement a eu lieu aux environs de 11h10mn. C’est d’ailleurs à cette heure précise que le président du Faso, médiateur dans cette crise nord-malienne, a fait son entrée dans la salle polyvalente de Kosyam. Pas de temps à perdre. Le médiateur annonce la couleur. Après avoir souhaité la bienvenue à toutes les délégations, il a dit sa foi en la bonne tenue des « négociations directes dont l’objectif est de trouver une solution durable à la grave crise qui secoue en ce moment le pays frère qu’est le Mali ». Mais il y a des préalables à tout. Pour le médiateur, ces préalables sont surtout que toutes les parties déposent les armes d’abord. Enumérant les raisons du dialogue, le médiateur a fait comprendre deux choses. La première est la nécessité de tenir les élections à la date fixée, à savoir le 28 juillet 2013. Cette élection marquera la fin de la transition et dotera le Mali d’autorité et de pouvoir légitime. Il faut que tous s’accordent pour que les élections puissent avoir lieu. La deuxième raison, à en croire le médiateur, est la nécessité de consolider l’unité nationale et la cohésion sociale mises à rude épreuve par la crise. Cela permettra que « le Nord Mali ne soit plus le sanctuaire des groupes extrémistes à vocation transfrontalière ». L’issue heureuse des négociations engagera le retour des populations déplacées et des réfugiés, toute chose qui cimentera le processus de stabilité et de paix, précise le médiateur. Les négociations devront se dérouler jusqu’au début de la semaine et le médiateur a proposé essentiellement les points suivants : la cessation des hostilités pour aller aux élections, le redéploiement de l’administration générale et des services sociaux de base, des forces de défense et de sécurité en particulier à Kidal selon des modalités pacifiques qui seront à négocier, la création d’un mécanisme de suivi et d’accompagnement et la poursuite des pourparlers de paix après les élections. Mais le médiateur n’a pas précisé le calendrier qui guidera ces actions. Pour ce faire, chaque partie est appelée à ne privilégier que l’intérêt du Mali, ses aspirations légitimes de développement et les besoins urgents de sécurité du peuple malien, a conclu le médiateur Blaise Compaoré.

Tous en avant pour les élections

Les représentants des autres acteurs ont, tour à tour, salué la tenue de ce cadre de dialogue. D’abord Tiébilé Dramé, représentant du président par intérim du Mali. Ce dernier a dit d’abord s’exprimer au nom de « tous ses compatriotes ». Parvenir à un accord avec les groupes armés du Nord-Mali est le vœu de tout un peuple, s’est-il expliqué, mais la priorité, selon lui, est que ces groupes déposent les armes pour la tenue des élections. C’est à l’autorité élue qu’il reviendra l’obligation d’entamer des négociations avec les groupes armés, précise Tiébilé Dramé. Il a rappelé, lui aussi, les conclusions de l’accord de décembre et a demandé que chacun fasse recours au contenu de cet accord dit « de Ouagadougou » afin de préserver l’unité et l’intégrité du territoire national. Le message lancé par le chef de la délégation du gouvernement malien a été clair : « le moment est venu pour les groupes armés du Nord-Mali de se conformer aux résolutions de la CEDEAO, de l’Union africaine (UA) et des Nations unies en particulier celle du 25 avril 2013 qui dit que les groupes armés doivent déposer les armes et s’inscrire dans une dynamique politique ». Pour ce faire, Tiébilé Dramé a demandé à la communauté internationale d’être témoin de tout ce qui se fera et se dira à Ouagadougou au cours des pourparlers. Il a terminé en redisant toute la reconnaissance du Mali car, elle est venue au secours d’un peuple dont l’existence aujourd’hui n’était pas une évidence il y a de cela quelques mois. Ensuite, c’est Mahamoudou Djéri Maïga qui, au nom de la coordination du MNLA et du Haut conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA), a pris la parole. Il a qualifié cette rencontre de très importante car elle donne l’opportunité de discuter de la « crise qui oppose le Mali à l’Azawad depuis plus de 50 ans ».

Le dialogue a toujours été prôné

Avec une pensée aux réfugiés maliens au Burkina Faso, Mahamoudou Djéri Maïga a confié que leur groupe a toujours privilégié le dialogue avec le gouvernement malien pour trouver une issue pacifique et politique à la crise. Mais l’espoir est permis à cette occasion, précise t-il, et leur souhait est que « cette rencontre soit le début d’un règlement définitif de cette crise qui dure depuis plus d’un demi-siècle », afin de mettre fin aux souffrances des populations. En dépit de tout, le médiateur n’a pas manqué de rappeler aux différentes parties qu’elles avaient marqué leur détermination en décembre 2004 quant au respect de l’intégrité territoriale, de l’unité nationale, de la forme républicaine de l’Etat et de la laïcité de la République du Mali. Le représentant du médiateur associé, l’ambassadeur du Nigeria au Burkina Faso, David G. Bala, a rappelé à son tour que cette médiation devra permettre d’aller aux élections de façon apaisée. Il n’a pas été annoncé une éventuelle rencontre directe entre les différents groupes. Le médiateur devrait rencontrer chaque groupe de façon séparée. Par la suite, les autres groupes, présents à Ouagadougou et qui le souhaitent, pourraient rencontrer le médiateur. C’est le cas du mouvement armé de l’Azawad (MAA) et de la milice d’autodéfense loyaliste Ganda Koy. Mais de source proche du MNLA, il n’est pas question que ceux qui n’ont pas été au départ puissent prendre part aux négociations. « On ne s’occupe pas de ça pour le moment. En tout cas, ils ne vont pas prendre part aux négociations directes entre nous et le Mali ». Les vrais échanges auraient commencé dans la matinée du 9 juin 2013.

Chronologie d’un faux départ Les pourparlers inter- maliennes ont commencé sur des chapeaux de roues. Initialement prévues pour le 7 juin 2013, c’est avec 24 heures de retard que les consultations ont finalement été lancées. En effet, dans la soirée du 7 juin, une partie des invités avait déjà pris place dans la salle devant abriter la cérémonie d’ouverture. Le début est prévu pour 16h, avait annoncé la présidence du Faso. Finalement, le protocole communique le début pour 18h30. A 18h, la délégation du MNLA et du Haut conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA) fait son entrée dans la salle, avec en tête, Alghabass Ag Intala. Elle est composée d’une quarantaine de membres. Tout était fin prêt pour que commencent les travaux. Mais où est donc la délégation du gouvernement malien ? Personne ne saura répondre. Tantôt elle est dans l’avion, tantôt elle vient d’atterrir. Plus tard, les premières informations commencent à circuler. La délégation du gouvernement malien, après avoir atterri à l’aéroport international de Ouagadougou, exige de rencontrer d’abord le médiateur, entend t-on. Le ministre des Affaires étrangères et de la coopération régionale, Djibrill Bassolet, arrive. Il salue quelques officiels, décroche le téléphone et reste longuement en communication. Pendant ce temps, certains journalistes avaient déjà annoncé à leur base l’ouverture des travaux pour 19h45. C’est à cette heure précise que l’information tombera que les travaux débuteront en réalité le lendemain dans la matinée, au moment où venait d’atterrir la dizaine de journalistes maliens. Cette nouvelle n’a pas semblé étonner l’assistance car les reports étaient incessants.

Le reporter de votre quotidien recherché par le MNLA

Après le faux départ, la presse, dans son ensemble, tentait à glaner des informations avec ceux qui acceptaient dire un mot. Nous entendons demander derrière nous : « il y a un représentant du journal « Le Pays » ici ? » Nous sommes interpellés par un confrère car quelqu’un voulait nous parler. Un membre du Mouvement national de libération de l’Azawad s’adresse à nous. Il nous demande de ne pas nous confondre à la presse malienne car, celle-là n’est pas professionnelle.

La composition du groupe de médiation

- Le haut-représentant spécial de l’Union africaine (UA) : l’ancien président Pierre Buyoya

- Le représentant des Nations unies (ONU)
- Le représentant spécial de l’Union européenne (UE)

- Le représentant spécial de l’Organisation de la conférence islamique (OCI), Djibrill Bassolet

- Le médiateur associé : ambassadeur du Nigeria au Burkina Faso, David G. Bala, représentant le président GoodLuck Jonathan

- Les pays accompagnateurs de la médiation : l’Algérie, les Etats-Unis (USA), la France, la Mauritanie, le Tchad et la Suisse.

L’incident des présentoirs

Avant l’arrivée des délégations, le protocole avait disposé des présentoirs indiquant la place de chaque groupe. Il était loisible de voir « Coordination des groupes armés du Nord-Mali » pour la délégation de l’Azawad et « Délégation du gouvernement malien » pour celle qui viendra de Bamako. A l’arrivée de la délégation de l’Azawad, il n’a fallu que quelques minutes, à celle-ci, pour s’insurger contre lesdits présentoirs. Un membre de la délégation, toute diplomatie écartée, s’est levé et a ramassé tous les présentoirs. Il sera interpellé par un membre du protocole du ministère des Affaires étrangères du Burkina Faso afin d’en savoir plus sur son geste. Il fera comprendre qu’il n’est pas d’accord avec l’appellation « Coordination des groupes armés du Nord-Mali ». Le protocole tentera de le raisonner mais il n’en avait cure. Le lendemain, l’on verra d’autres présentoirs avec l’inscription, « Délégation Commission conjointe MNLA et HCUA ». L’on dira que ce sont des détails qui montrent une certaine susceptibilité.

Les participants sont-ils tous des compatriotes ?

Au cours des allocutions des représentants des différents protagonistes, il était difficile de comprendre que toutes les parties viennent du Mali. Tiébilé Dramé, dans son adresse, dira par exemple, à l’endroit de la partie d’en face, « Chers compatriotes ». Pendant ce temps, Mahamoudou Djéri Maïga, lui, appellera l’autre camp, « Messieurs les membres de la délégation malienne ». Chaque partie dit tenir le bon bout et c’est de bonne guerre ; c’est vraiment le temps de la négociation mais il ne faudra pas que chaque partie campe sur sa position et de cette manière.


Aimé NABALOUM

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