Les autorités maliennes et les groupes armés touareg qui occupent Kidal, dans le nord-est du Mali, se retrouvent vendredi à Ouagadougou pour des négociations en vue de l’élection présidentielle de juillet, en plein regain de tension.
Le dialogue après le bruit des armes: ces discussions débutent seulement deux jours après que, à l’issue de combats meurtriers, l’armée a délogé les rebelles touareg du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) de la localité d’Anefis, à une centaine de kilomètres au sud de Kidal, ville que Bamako entend aussi récupérer.Médiateur dans la crise malienne au nom de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao), le président burkinabè Blaise Compaoré « ouvre à 17H00 (locales et GMT) les négociations » en recevant les représentants du pouvoir malien et des mouvements touareg, a indiqué à l’AFP une source proche de la médiation.
Pour Bamako, c’est l’ancien ministre Tiébilé Dramé, conseiller spécial du président par intérim Dioncounda Traoré pour le nord du Mali, qui ouvrira la marche. Le MNLA et le Haut conseil pour l’unité de l’Azawad, autre organisation touareg, feront bloc au sein d’une délégation conjointe.
Pour la médiation et la communauté internationale, l’enjeu est de trouver un compromis pour permettre d’organiser aussi à Kidal la prochaine présidentielle le 28 juillet, une élection réclamée avec insistance par les partenaires du Mali, France en tête.
Or le MNLA et les autres groupements touareg ont refusé jusqu’à présent à l’armée et à l’administration maliennes d’entrer dans la ville, exigeant la sécurisation du scrutin par la future force de l’ONU attendue en juillet.
Les mouvements touareg armés occupent Kidal, berceau de cette minorité, depuis fin janvier, après qu’une intervention militaire française a mis en fuite les groupes islamistes armés liés à Al-Qaïda qui occupaient tout le Nord malien depuis 2012. Environ 200 soldats français sont stationnés à l’aéroport de la ville.
Crimes et exactions
Les groupes touareg, qui furent un temps alliés aux jihadistes, ont opposé jeudi une fin de non-recevoir à la France en faisant savoir qu’ils ne déposeraient pas les armes « avant le règlement définitif du statut de l’Azawad », nom donné par ces autonomistes à la région nord du Mali. Ils se réservent aussi « le droit de riposter aux agressions de l’armée malienne ».Si des diplomates proches des négociations se montraient il y a peu optimistes concernant un accord intérimaire sur Kidal, la situation sur le terrain a changé la donne cette semaine.
L’armée malienne a créé la surprise en remontant en direction de Kidal: après de violents affrontements, elle a chassé mercredi le MNLA de la localité d’Anefis.
Des arrestations et expulsions de Kidal de membres des communautés noires par le MNLA, qualifiées « d’épuration raciale » par le régime de Bamako, ont précipité la décision de l’armée de reprendre l’offensive. Cependant, malgré des déclarations guerrières, elle s’est gardée de continuer sur Kidal: sous pression de ses alliés extérieurs, le pouvoir malien laisse manifestement sa chance au dialogue.
Mais ce climat est encore alourdi par de nouvelles informations sur des exactions.
Deux organisations internationales de défense des droits de l’Homme, Amnesty International et Human Rights Watch (HRW), ont dénoncé vendredi dans deux rapports distincts les crimes et exactions commis par l’armée et les groupes armés au Mali depuis janvier.« Le bilan des forces de sécurité maliennes en matière de droits de l’Homme est simplement terrible », a accusé Amnesty, évoquant notamment des cas de torture. Et HRW souligne que les forces du MNLA ont arrêté dans la région de Kidal « une centaine de personnes, dont la plupart étaient des hommes à la peau plus sombre appartenant à des groupes ethniques non touareg ».
Dans tous les cas, si un accord intérimaire sur Kidal est trouvé d’ici lundi, comme on l’espère dans la capitale burkinabè, il restera ensuite à régler le problème de fond des relations entre l’Etat malien et sa région nord, irrédentiste depuis des décennies.
Une fois des autorités légitimes installées à l’issue de la présidentielle, devra se renouer un dialogue entre Bamako, qui ne veut pas entendre parler d’autonomie mais de décentralisation, et les mouvements touareg emmenés par le MNLA, qui estime avoir fait beaucoup en renonçant à sa revendication d’indépendance
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