mercredi 8 août 2012

DJIBRILL BASSOLET AU NORD-MALI

DJIBRILL BASSOLET AU NORD-MALI - Les Editions Le Pays
Que va-t-on négocier ?
Publié le mercredi 8 août 2012

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Le ministre burkinabè des Affaires étrangères a séjourné hier dans le Nord-Mali. Il est vrai que le Burkina Faso conduit la médiation dans la crise malienne, mais l’on se demande ce qu’il espère obtenir en poursuivant les échanges avec les groupes islamistes qui, de jour en jour, radicalisent leur position. Ce déplacement est consécutif à la fin, à Niamey, d’une réunion des ministres des Affaires étrangères des pays dits du "champ". Ces pays ont invité à leur rencontre le Tchad, la Mauritanie et l’Algérie qui plaident pour la négociation en lieu et place d’une intervention militaire. Le voyage du chef de la diplomatie burkinabè intervient également dans un contexte fort agité. Au Nord-Mali occupé, les positions extrémistes qu’affichent les troupes d’Ansar Dine, irritent de plus en plus les populations maliennes. Celles-ci, sans doute lasses d’attendre que des troupes viennent de Bamako les secourir, ont pris sur elles d’assurer leur propre défense. Une détermination qui pourrait tourner au bain de sang, si les islamistes s’adonnent à leur sport favori consistant à réprimer systématiquement tous ceux qui osent les défier. Etant donné l’évolution du contexte, on est enclin à se demander quelles sont les réelles motivations de la médiation burkinabè à l’heure actuelle. Quels résultats espère-t-elle obtenir, vu la position tranchée de Ansar Dine et ses compagnons ? Le Burkina Faso demeure dans la logique de sa médiation : la négociation constitue la seule voie de résolution du problème du Nord-Mali. Dans cette perspective, il faut échanger avec tout le monde, y compris les groupes islamistes. La médiation burkinabè pourrait donc chercher à calmer les esprits de part et d’autre, et surtout à inviter les islamistes à faire preuve de modération. Cette modération pourrait leur ouvrir des portes, et favoriser une invite au débat national dans la capitale malienne. Dans ce sens, le voyage du ministre Bassolet est une opportunité à saisir. En se rendant auprès de ceux que la communauté internationale n’admet point comme interlocuteurs du fait du terrorisme auquel ils s’adonnent, le chef de la diplomatie burkinabè voudrait sans doute leur offrir l’opportunité de s’expliquer. Même s’il n’est pas certain de voir de sitôt les islamistes discuter à Bamako, il est fort probable que la mission de Bassolet servira au moins de cadre d’échange dans un contexte qui est loin d’être facile. Dans la capitale malienne, on semble vouloir enfin se réveiller. L’on voudrait même convaincre que l’heure est bien au rassemblement des énergies, après les échanges houleux dont a fait montre la classe politique malienne ces derniers mois. Celle-ci était jusque-là restée divisée suite au coup d’Etat orchestré par le capitaine Sanogo et ses compagnons en mars dernier. Mais des pro-pustschistes sont toujours accrochés à la personne du capitaine Amadou Sanogo, ex-chef de la junte. En se rendant au Nord-Mali, le ministre burkinabè des Affaires étrangères et de la coopération régionale va peut-être chercher à convaincre les groupes islamistes que la main tendue qu’on leur offre, constitue une sérieuse opportunité. Ils ont donc intérêt à se ressaisir, et à se saisir de l’offre, quelles qu’en soient les limites. Tout refus du dialogue pourrait en effet se traduire par une guerre. Il faut répondre à l’offre éventuelle de la médiation, et profiter des conciliabules de Bamako, pour chercher à faire passer son message. En tout cas, au Mali, ce nouveau gouvernement est très attendu. Avec le maintien ou non de l’actuel Premier ministre dans ses fonctions. Le président intérimaire, Dioncounda Traoré, a mené des consultations avec tous les acteurs de la vie publique et politique, y compris avec le capitaine Amadou Sanogo. Reste donc les islamistes. Le ministre Bassolet parviendra-t-il à les convaincre, d’abandonner la charia et de s’inscrire dans une dynamique républicaine ? Rien n’est gagné d’avance. Mais en envoyant son chef de la diplomatie dans le Nord-Mali, le Burkina Faso aura confirmé son penchant pour la résolution à l’amiable de ce dossier épineux. Aux islamistes de comprendre qu’ils sont vraiment allés trop loin dans leur quête d’un Islam qui aura du mal à prendre dans la sous-région.
« Le Pays »

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